Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)
« Les travailleurs détachés et surtout les travailleurs détachés non déclarés sont une concurrence déloyale »
Quelle est la situation du BTP dans le secteur Dracénie Haut Var ?
Les chiffres sont les suivants dans notre ressort : % des défaillances d’entreprises et de commerçants concernent des entreprises du BTP. Et sur ces %, % sont des toutes petites entreprises (TPE) de moins de dix salariés et faisant moins de deux millions d’euros de chiffre d’affaires. Enfin, dans ces %, % sont des liquidations directes. Les entreprises n’ont plus de trésorerie, leurs comptes bancaires sont coupés, leur carnet de commandes est vide.
Quelles sont à votre avis les causes de ces faillites ? Ces TPE, et en particulier dans le bâtiment, sont touchées par les travailleurs détachés, surtout les travailleurs détachés non déclarés. C’est dramatique. Je me suis battu contre ça, mais les décrets sont tels qu’on ne peut pas lutter contre cela. Il y a trop de décalage. La concurrence porte sur le prix de la maind’oeuvre. En France, un employeur paye presque % de charges en plus du salaire, avec les travailleurs détachés déclarés en Pologne il ne donne que %, et % s’ils viennent de Roumanie. % des TPE qui aboutissent au tribunal sont victimes des travailleurs détachés.
Les services de l’État luttent-ils efficacement contre les travailleurs détachés non déclarés ?
Il faudrait effectivement des contrôles. Mais depuis quelque temps, les services de police, de gendarmerie, l’URSSAF et la justice, qui doivent contrôler et sanctionner, tout cela, sont défaillants parce qu’ils manquent de moyens pour le faire. Avec la fédération du BTP, un numéro vert avait été mis en place pour que les entreprises victimes puissent le signaler, mais les gens n’osaient pas le faire.
Les marchés publics ne devraient-ils pas être interdits aux entreprises utilisant des travailleurs
détachés, nombreux dans la sous-traitance ?
Il y a des sous-traitants en cascade dans les gros chantiers. Depuis quelques années, c’est le donneur d’ordre qui est sanctionné, tout en haut de la pyramide.
Quel est l’impact sur l’emploi ?
C’est difficile à quantifier. Une fois que la liquidation est engagée, c’est le liquidateur qui peut mesurer l’impact. Il est sûr que ça met des gens directement au chômage.
Les chefs d’entreprise se plaignent des difficultés à recruter.
C’est exact, ce manque de main-d’oeuvre concerne beaucoup d’activités. Et c’est aussi l’une des raisons du grand nombre de travailleurs détachés.
N’y a-t-il pas un problème de formation et d’attractivité de la filière ?
Il y a un problème d’orientation, de formation, de stages en entreprises. Les entreprises hésitent alors qu’il faut absolument former des jeunes, surtout les jeunes en alternance. On devrait même imposer le stage aux entreprises. Il y a milliards de budget de formation en France, on se demande comment ils sont utilisés… Le bâtiment nécessite une formation pratique, sur le tas. Cela ne peut se faire que sur les chantiers. Et ça peut susciter des vocations.
La création d’un CFA du BTP à Draguignan avait été annoncée en juin pour une ouverture en . Depuis, ce projet semble abandonné…
C’est l’Arlésienne, un feuilleton à rebondissements depuis des années. Le dossier est très compliqué. Pourtant ce CFA est nécessaire. J’espère qu’il se fera.