Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)

Edith Toulon-Meron se souvient du  août 

- P. H.

Edith Toulon-Meron était âgée de 8 ans en août 1944. Les souvenirs de la libération du village sont gravés dans sa mémoire. Elle se rappelle parfaiteme­nt ce jour et la journée qui a précédé.

« Un avion allemand survolé le village »

« La températur­e était caniculair­e ce 18 août 1944. En fin d’après-midi, un avion allemand a survolé le village au ras des maisons. Je l’ai vu passer alors que je jouais avec Maryse Michel, la fille de l’institutri­ce, dans le jardin de la maison situé au 10, de la rue de la République. Ma mère nous a dit de rentrer. Comme l’église n’était pas accessible pour cause de danger, nous sommes allés chez Mlle Odout afin de faire la neuvaine du 15 août. Mes grands-mères et d’autres personnes y étaient également. »

« Canons et blindés près de la chapelle »

« Pendant ce temps, sur la place du Posteuil, les FFI peignaient sur les camions remplis d’armes des croix de Lorraine encastrées dans un V, au parfum de victoire. C’est alors qu’un violent orage de grêle s’est abattu sur la commune. Les camions ont été mis à l’abri dans les remises. Peu de temps après, une division allemande occupait Rians. Canons et blindés étaient positionné­s près de la chapelle Saint-Enfant. Les troupes se trouvaient au bout de notre jardin près d’un grand mur au bas de la chapelle. La nuit qui a suivi, nous n’avons pas dormi tellement les Allemands déambulaie­nt dans les rues en parlant très fort. »

« Un obus est tombé près de nous »

« Le 19 au matin, mon père décidait d’évacuer la maison pour nous rendre à un poste de Résistants situé à Louvière. Nous avons pris des provisions et nous voilà partis à travers la campagne. Alors que nous nous trouvions à hauteur des Espargades un obus est tombé près de nous. Nous avons progressé vers Saint-Maurin et nous nous cachions dans les ruisseaux dès que des troupes allemandes arrivaient. »

« Un soldat allemand nous a mis en joue »

« Alors que nous étions cachés et allongés dans un ruisseau, un soldat allemand nous a mis en joue avec sa mitraillet­te, il nous a tous visés, sans ouvrir le feu, puis il est parti, emportant nos victuaille­s. Nous avions peur. En fait, nous étions partis dans la mauvaise direction. Nous étions pris entre les tirs allemands qui fuyaient et les tirs des Américains qui les poursuivai­ent. Nous entendions le crépitemen­t des balles dans les chênes. Puis nous sommes arrivés enfin au camp des Résistants à Louvière. A cet instant nous ignorions que Rians avait été libéré en fin d’après-midi. »

Retour au village

« Le 20, mon père décidait de rentrer à la maison. Sur le chemin du retour, nous avons croisé une Jeep avec à son bord deux soldats, un noir et un blanc. Les Américains occupaient le village. Dans notre maison, nous avons vu deux soldats alliés dans la cour. Ils se lavaient au lavoir. D’autres étaient dans les champs de ma grand-mère, derrière la maison, où se trouve actuelleme­nt l’école maternelle. Ils ont campé quelque temps dans ce secteur. Le sol de la cour et du jardin était recouvert d’éclats d’obus. Nous avons même trouvé des morceaux des vitraux de l’église pourtant située loin de la maison. Le village dansait depuis la veille. Ma grand-mère ouvrait des bonbonnes sur la banque de tailleur de son défunt mari. Elle servait des verres et les Américains riaient de l’accueil des Riansais. Dans les bars, tout était gratuit. »

« Un ruban bleu, blanc, rouge dans les cheveux »

« Pendant ce temps, j’étais à la fenêtre de ma chambre, ruban bleu, blanc, rouge dans les cheveux. Je faisais signe aux soldats qui défilaient sous mes yeux émerveillé­s, ils me lançaient chewinggum­s, corned-beef, biscuits. Le sol de ma chambre en était jonché. C’était fini, Rians reprenait vie, nous étions libres. »

 ?? (Photo P. H.) ?? Edith Toulon-Meron dans le jardin où elle a vécu la libération du village.
(Photo P. H.) Edith Toulon-Meron dans le jardin où elle a vécu la libération du village.

Newspapers in French

Newspapers from France