Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)
« Les maires prêts à jouer le jeu, pas à porter le chapeau »
En première ligne pour la réouverture des écoles de ce prochain 12 mai, les maires sondent, se préparent, mais ont encore besoin de réponses et d’engagements des autorités
Dans dix jours, les écoles du Var vont progressivement rouvrir leurs portes. Un défi inédit pour tous les acteurs concernés, avec pour ultime priorité la santé de tous. Membre du bureau national de l’Association des maires de France, présidée par François Baroin, le maire de Cotignac, Jean-Pierre Véran, a échangé sans relâche ces dernières heures avec les représentants des quelque 36 000 communes de France afin de préparer au mieux l’échéance.
Dans quel état d’esprit sentez-vous les maires de France ?
La situation est compliquée pour tout le monde. Mais en bons républicains, les maires semblent globalement – c’est mon impression – favorables à cette voie. Sous conditions évidemment. Même le représentant des maires du Haut-Rhin – un département qui a tant souffert ! – s’y est dit favorable, si les conditions sont réunies.
Dans quel état d’esprit voyez-vous approcher cette échéance ?
Il y a évidemment encore beaucoup de points à clarifier ! Pour les maires, le plus important concerne celui de la responsabilité. Leur responsabilité pénale ne saurait être engagée si, malheureusement, des cas de Covid- venaient à être détectés malgré toutes les précautions prises.
Vous encouragez donc les maires à prendre part à cette réouverture ?
Chaque commune est différente, chacune a ses contraintes de locaux, de personnel, etc. Donc il ne s’agit surtout pas de jeter la pierre aux maires qui déclarent que les conditions ne sont pas réunies dans leurs communes pour cette réouverture.
Qu’attendez-vous des autorités, du préfet et de l’Éducation nationale notamment ?
Déjà, que chacun assume bien ses parts de responsabilités. Ensuite, nous avons besoin de consignes claires et concises. Nous venons de recevoir un document protocolaire de pages, vous imaginez ? C’est presque illisible… Nous, nous sommes dans le concret, la réalité, et nous avons besoin de consignes et recommandations réalistes et concrètes.
Comment s’y prendre ?
Dans le Var, une réunion est programmée ce mardi, à Toulon, avec les autorités préfectorales, l’Agence régionale de santé, les représentants de l’Éducation nationale et des maires du Var. Il nous faut, à l’issue de celle-ci, pouvoir adresser à tous les maires des consignes claires et concises. Et très concrètes, y compris sur les cantines, les transports, etc. Les enjeux sont de taille !
Cette réouverture progressive des écoles vous semble-t-elle utile ?
Les temps ne sont certainement pas à des débats politiques et des positions idéologiques. Il est important de maintenir une cohésion sociale à tous les niveaux du pays face à cette crise sans précédent. Sur le fond, on ne peut ignorer les souffrances endurées par certaines familles, certains enfants qui vivent très mal ce confinement. Si on fait tout pour assurer la sécurité sanitaire de chacun, on ne peut pas non plus balayer d’un revers de main l’indispensable relance de la machine socio-économique, sinon on court à la catastrophe.
Mais nombre d’acteurs avancent qu’à quelques semaines des grandes vacances, il serait plus sage de reporter à septembre le retour à l’école…
Je peux l’entendre. Mais rien ne dit que l’épidémie sera alors derrière nous, quand on entend les délais nécessaires pour le vaccin… Et nous aurons alors, fin août, les mêmes discussions qu’aujourd’hui, et aurons simplement perdu quatre mois. Le gouvernement a fait ce choix, à chacun d’adopter un comportement responsable. On a le droit de critiquer l’action du gouvernement, mais il faut reconnaître qu’il fait face à une situation exceptionnelle et incroyablement complexe, je doute que nombre de candidats souhaiteraient aujourd’hui être à la place d’Édouard Philippe. Je rappelle d’ailleurs que tout est basé sur le volontariat.
Comment réagissez-vous aux positions déjà exprimées par certains maires, comme David Rachline (RN), de ne pas rouvrir les écoles ?
Tant qu’il ne s’agit pas d’une posture politique ou idéologique, je n’ai aucun commentaire à en faire. Je le répète : chaque commune a ses contraintes, chaque maire doit être libre d’exprimer ses difficultés, ou son impossibilité, de rouvrir les écoles. Il ne faut surtout pas l’accabler. Au contraire, à Fréjus ou ailleurs, il s’agit plutôt d’aider le maire, avec le préfet par exemple, à chercher et trouver des solutions.
La pression est bien grande sur les épaules des maires...
On a plutôt l’habitude, mais, encore une fois, si nous sommes prêts à jouer le jeu, nous ne sommes pas là pour porter le chapeau. Et les maires ne sont pas les seuls en première ligne pour la réouverture des écoles. Outre les préfets, la balle est aussi dans le camp des enseignants et des parents d’élèves. Sans cohésion entre ces différents acteurs, il n’y a pas de réouverture sereine possible.
Nous avons reçu un document de pages presque illisible.”
Il ne faut pas accabler un maire qui ne peut pas rouvrir : il faut l’aider à trouver des solutions.”