Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)
« Nous avons logé dans le Var sans-abri supplémentaires »
Ils sont hébergés dans des hôtels. Suivi social et sanitaire, chèques-services et masques distribués... Arnaud Pouly, directeur départemental de la cohésion sociale, fait le point et se projette
Aux premières heures du confinement, mardi 17 mars à midi, soixantesept millions de Français ont été contraints de limiter leurs déplacements pour lutter contre l’épidémie du coronavirus. Une mesure d’autant plus difficile à vivre pour des femmes et des hommes privés de toit, pour qui les accueils de jour, les maraudes et les équipes mobiles de précarité santé sont des points d’ancrage. Pour vivre, survivre bien souvent à la rue, et emprunter un nouveau parcours de vie avec l’aide de bénévoles et travailleurs sociaux pour les mettre l’abri et les aider sur le chemin de la réinsertion sociale. Comment faire pour que les sansabri ne vivent pas cela, comme « une double peine » ? Rencontre avec Arnaud Pouly, directeur départemental de la cohésion sociale. Lequel agit, pour le compte du préfet du Var, dans le cadre de cette crise sanitaire du Covid-19.
Le conseil « Restez chez vous » a-t-il un sens pour les sans-abri ?
Avant le mars, en temps normal, personnes étaient prises en charge dans tous les dispositifs d’hébergement et de réinsertion. Depuis le début du confinement, nous avons logé dans le Var personnes supplémentaires. Elles étaient soit à la rue, soit logées chez des tiers ou vivaient dans un squat.
Où ces personnes ont-elles été hébergées ?
Elles l’ont été sur tout le Var, et principalement dans des hôtels. Le SIAO (Service intégré de l’accueil et de l’orientation), qui travaille avec l’État, a passé des conventions avec un certain nombre d’hôtels. Nous avons des accords supplémentaires avec des établissements, notamment le centre de vacances sur la presqu’île de Giens qu’on avait ouvert pour l’accueil des sansabri sous la gestion de la Fédération des oeuvres laïques , et amplifié en nombre de places.
Quelle réponse donnez-vous aux personnes à la rue qui ne souhaitent pas être hébergées ? Les trois équipes mobiles départementales de ToulonProvence-Méditerranée, Draguignan et Fréjus/SaintRaphaël continuent leurs maraudes. Elles continuent d’aller vers les sans-abri pour leur apporter l’aide alimentaire.
Comment se déroule la prise en charge alimentaire de ces sansabri hébergées à l’hôtel ?
Un travail est mené avec un certain nombre d’associations. Elles ont mis en place l’aide alimentaire en lien, aussi, avec la Banque alimentaire. Cela se traduit par une distribution de sandwiches ou de repas. La Marine nationale a passé, aussi, une convention avec l’Union diaconale du Var pour l’aide alimentaire. Le directeur du SIAO a accepté cette mission supplémentaire de coordination de l’aide alimentaire, et on ne peut que l’en féliciter.
Certains éprouvant des difficultés à se déplacer n’ont pas toujours accès à cette aide alimentaire. Quelle solution ? Au-delà de la question des repas qui sont proposés par les associations, des personnes à la rue et logées à l’hôtel n’ont pas forcément accès à cette aide alimentaire pour plusieurs raisons, notamment des difficultés à se déplacer. En plus de cette aide alimentaire apportée en direct par les associations, l’État a débloqué, depuis le début avril, au niveau national avec une déclinaison dans le Var, chèquesservices.
Ces chèques-services concernent quel public ?
Des chèques-services d’un montant de , euros sont remis tous les jours aux sans-abri pour qu’ils puissent se rendre dans les supérettes. L’État en a confié la gestion aux équipes mobiles du (précarité santé de Promo soins sur Toulon, Sendra à Draguignan, Paola Solidarité à Fréjus/SaintRaphaël) et à l’accueil de jour de l’Avaf (Association varoise d’accueil familial) sur Brignoles. Ce dispositif va continuer dans les semaines qui viennent, et va perdurer après le mai.
Au-delà de la question alimentaire, quelle est la nature de la prise en charge sociale ?
Avec le confinement, certains sans-abri ont demandé à être hébergés. Ils ne sont pas connus des services et des travailleurs sociaux. Il faut profiter de les rencontrer et de commencer à travailler sur l’accompagnement social et sur la réinsertion. À partir d’aujourd’hui, lundi, nous mettons en place un partenariat avec la Croix rouge française (CRF). Sur une liste que va donner le SIAO , en charge d’effectuer l’orientation vers les hôtels, l’association va commencer un travail d’accompagnement social avec des personnes qui en auraient besoin. On va voir avec eux quelles sont leurs problématiques, notamment administratives.
Au début de cette crise sanitaire, des sans-abri ont eu comme ressenti d’être « les grands oubliés »...
Avec les associations, l’État a mis en place des dispositifs qui permettent à une personne qui souhaite sortir de la rue de l’être. Pour certains, les problèmes d’addiction, il est vrai, peuvent compliquer le chemin de la réinsertion, mais ne le rendent pas impossible.
Cette crise sanitaire a renforcé la chaîne solidaire...
L’État est là pour coordonner mais seul, il ne peut rien faire, c’est évident. Il faut ce triptyque – État, associations, collectivités – pour qu’il y ait une bonne solidarité locale. Si nous travaillons tous ensemble, nous avons de très bons résultats. Ce qui est démontré en tout cas aujourd’hui dans le Var. Il y a toujours des personnes à la rue qui ne souhaitent pas être hébergées. Malheureusement, on ne peut pas les forcer à l’être, à être confinées. En revanche, nous continuons, avec les équipes mobiles, à nous en occuper.
Des masques vont-ils être fournis aux sans-abri ?
L’État va demander aux équipes mobiles d’en fournir à ceux qui en auraient besoin.