Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)

Drôle de famille en or

Produite par HBO, Succession nous plonge dans une guerre de succession où tout est permis

- MATHIEU FAURE

Immoral. Scandaleux. Irrévérenc­ieux. Sans coeur. On pourrait en tartiner des lignes sur la manière de décrire la famille Roy. Autour du patriarche Logan (immense Brian Cox), propriétai­re d’un des plus grands congloméra­ts des USA – regroupant journaux, télévision­s, télécommun­ications, parc d’attraction­s – va s’articuler une forme de guerre de succession entre ses quatre enfants : Roman, Connor, Shiv et Kendall. Un Game of Thrones des temps modernes en quelque sorte. Et le parallèle n’est pas anodin puisque HBO, déjà à la fabrique de la série phénomène, est également derrière Succession. Avec deux saisons au compteur, Succession a déjà trouvé ses marques, son public et un certain style. Les thèmes abordés sont universels : le pouvoir, l’empire qu’il faut défendre coûte que coûte et la compétitio­n. Logan, le patron vieillissa­nt, s’amuse à mettre ses quatre enfants en compétitio­n avec un machiavéli­sme presque jouissif. Car le carré d’As est unique. Connor, l’aîné issu d’un premier mariage, est presque hors-jeu. Lunaire, il ne songe qu’à se présenter à la Maison-Blanche tout en vivant avec une escort girl. Kendalll, le successeur naturel, est un drogué qui n’a pas confiance en lui mais qui meurt d’envie d’être adoubé, au moins aimer, par son père.

Apprécier des salopards

Roman, le benjamin (campé par le génial Kieran Culkin) est immature, ingérable et névrosé. Enfin, il reste Siobhan, dit Shiv, la seule fille, protégée de son père, mais surtout la plus brillante et qui souhaite faire carrière dans la communicat­ion politique. Face à une figure paternelle imposante et sournoise, ils se serrent les coudes tout en se défiant mutuelleme­nt. L’histoire rappelle forcément l’empire de Rupert Murdoch, milliardai­re d’origine australien­ne (Logan est, lui, écossais) fondateur de News Corporatio­n. C’est aussi une histoire de dynastie comme les Américains en raffolent : les Kennedy, les Trump, Hearst ou Redstone. Ces grandes familles qui ont bâti des empires mais que le destin, parfois, déchire. La force de la série réside principale­ment dans sa capacité à nous faire apprécier des salopards. Tous les personnage­s, sans exception, sont odieux, tristes, névrotique­s et froids. Et extrêmemen­t fortunés.

Des repoussoir­s à audiences au départ, avant que la folie ne s’empare de la série à tel point de devenir virale. En plein mandat Trump, cette série sur le machiavéli­sme du pouvoir est terribleme­nt d’actualité. Notamment parce que tous les coups sont permis. « Utilise les avocats, les détectives privés, les putes et toutes les personnes désagréabl­es à notre dispositio­n. On te doit des services : le Président, les sénateurs suce boule qu’on a soutenus », suggère d’ailleurs Roman à son père lors d’une OPA hostile...

Tous les coups sont permis

Il y a une filiation naturelle à l’oeuvre shakespear­ienne du Roi Lear dans Succession, allant même jusqu’à une réplique tirée de Hamlet en guise d’hommage : « Good night, sweet ladies ». D’ailleurs la qualité d’écriture et des dialogues donnent parfois la sensation d’un style très britanniqu­e où l’on rit de la veulerie de chaque personnage. Le duo de seconds couteaux composé de Tom et Greg, respective­ment mari et cousin de Shiv, est succulent. Bref, vous l’aurez compris, cette série sur les coulisses d’une famille riche et puante est fabuleuse. Sans oublier la bande-son et notamment ce pilote ou Kendall, dans sa limousine luxueuse, s’envoie un son des Beastie Boys dans les oreilles pour se donner de la motivation avant d’aller défier son père. Son but ? Monter sur le trône. 2 saisons, disponible sur OCS.

Money, money, money

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