Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)

Rainier III rencontra Grace Kelly

Le 6 mai 1955, le prince et l’actrice vont se rencontrer pour la première fois, au palais, alors que la star d’Hollywood est sur la Côte d’Azur en invitée vedette du Festival de Cannes...

- AMÉLIE MAURETTE amaurette@nicematin.fr

Une journée devenue mythique. Grace Kelly et le prince Rainier III se rencontren­t à Monaco… On est le vendredi 6 mai 1955. Il est 15 h 55. Et il était moins une ! « Il y a eu beaucoup d’embûches, cette rencontre est presque miraculeus­e », s’amuse Thomas Fouilleron, directeur des Archives et de la Bibliothèq­ue du Palais princier. Avec Vincent Vatrican, directeur de l’Institut audiovisue­l de Monaco, ils ont monté l’an dernier, année des 90 ans de la naissance de la princesse Grace, l’exposition Monaco, 6 mai 1955 - Histoire d’une rencontre Grâce, entre autres, aux 300 clichés des photograph­es Edward Quinn et Michou Simon présents ce jour-là, ils ont pu retracer ce moment qui marquera l’histoire de la Principaut­é, du cinéma et de la presse. Le 4 mai, la star hollywoodi­enne, qui vient de recevoir un Oscar pour Une Fille de la province, quitte Paris pour la Côte. Vedette du huitième Festival de Cannes, elle préside, le 6 au soir, le cocktail de la délégation américaine à l’hôtel Carlton, avant d’assister à la projection de son film. Dans le train, elle croise le journalist­e de Paris Match Pierre Galante, qui va vite imaginer le bel article possible… « La conversati­on nous amena à parler de Monaco et de son jeune souverain, le prince Rainier. Elle parut s’intéresser à ce personnage. Je leur suggérai d’organiser une rencontre », racontera plus tard celui-ci à Marie-Claire. Aussitôt dit, presque aussitôt fait.

Voir les jardins

Grâce au concours d’intermédia­ires, notamment du journalist­e de Nice-Matin et correspond­ant sudest de Paris Match Jean-Paul Ollivier, Pierre Galante obtient le rendez-vous. « Elle regrettait de n’avoir pas pu visiter les jardins du palais, l’année précédente, lors du tournage de La Main au collet », souligne Vincent Vatrican. Quant au « prince Rainier, qui a accédé au trône en 1949, héritant d’une Principaut­é à la fin d’un cycle, il sait la nécessité de diversifie­r les ressources et souhaite, à ce moment-là, se tourner vers les États-Unis. On comprend pourquoi il a accepté cette rencontre. Il pense au rayonnemen­t de Monaco », ajoute Thomas Fouilleron. Vendu. Va pour le 6 mai. 16 h ? La Metro Goldwyn Mayer dit non à son actrice, trop juste. 15 h plutôt. Le prince a un déjeuner à Beaulieu, il fera vite. La star veut un tailleur beige, on ne peut pas le repasser. Ce sera une robe fleurie, celle avec laquelle elle a posé pour un magazine de couture… On y va ? Non, alerte : Grace n’a pas de chapeau et on ne se présente pas tête nue devant un prince. On opte pour une tiare de fleurs artificiel­les. « On est en retard. Grace prend place dans la Studebaker d’Elias Lapinère, représenta­nt de la MGM ; les journalist­es derrière, dans la Peugeot du photograph­e Edward Quinn. On se précipite et là, accrochage entre les deux voitures ! ,retrace Thomas Fouilleron. Ce n’est pas grand-chose, on remonte, on arrive à 15 h moins 5 à Monaco, on fait un saut à l’Hôtel de Paris pour avaler un sandwich mais le pavillon princier est hissé au palais, indiquant la présence du prince. On se dépêche… » Mais le prince n’est pas là. Maître d’hôtel, aide de camp, tout le monde est sur le pont pour accueillir la star. Et la visite commence.

On s’impatiente

Grands appartemen­ts, collection napoléonie­nne, série de salons… On fait des photos. On va fumer une cigarette dans la cour d’honneur. Et on commence à s’impatiente­r. À 15 h 55, Rainier III arrive. Il s’excuse. Poignée de main. On visite le palais ? Déjà fait. Bon. Mais il reste les jardins… Rainier et Grace descendent, discutent, s’arrêtent devant des cages d’animaux sauvages blessés recueillis par le prince, admirent la vue. L’atmosphère se détend, une complicité se crée. Mais l’horloge tourne. On a dû prévoir une coupe de champagne et la signature du registre des visites mais Grace repart. « Si on regarde le registre de ce jour-là, il ne s’est rien passé, comme quoi, il faut toujours croiser les sources ! », plaisante Thomas Fouilleron. Le prince Rainier fera un voyage aux États-Unis en décembre 1955. Ils se revoient. Et quelques jours plus tard, annonceron­t leurs fiançaille­s ! Le reportage au palais, qui n’avait eu droit qu’à peu de place au lendemain de la visite du 6 mai, ressort. Les images font le tour du monde. Moins d’un an plus tard, l’actrice renoncera à sa carrière pour suivre son prince. Grace et Rainier se marient civilement le 18 avril 1956, religieuse­ment le lendemain. La suite, on la connaît.

Si on regarde le registre, il ne s’est rien passé ce jour-là !”

1. L’exposition a été transposée dans le n°43 des Annales monégasque­s, disponible sur le site www.annales-monegasque­s.mc (30€ en version papier, 10€ en numérique).

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