Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)

De nouveaux enjeux pour le yachting

Le chantier naval de La Ciotat reprend doucement son activité. Jean-Yves Saussol, directeur général de La Ciotat Shipyards, livre une première analyse des effets du Covid

- PROPOS RECUEILLIS PAR LAURY HOLSTE lholste@nicematin.fr

Le Covid-19 n’a épargné aucun secteur. Le chantier naval de La Ciotat a été très impacté par la crise sanitaire. Après quasiment un mois d’arrêt, les entreprise­s reprennent doucement leurs activités, bien qu’adaptées aux nouvelles mesures sanitaires. Jean-Yves Saussol, directeur général de La Ciotat Shipyards, revient sur ces quelques semaines de flottement et sur l’impact de la pandémie pour l’avenir du chantier naval.

Comment s’est adapté le chantier à la crise ?

Nous avons été très concernés puisque, comme pour beaucoup d’entreprise­s, le confinemen­t a mis un coup de frein brutal à l’activité des sociétés travaillan­t sur le chantier. Nous n’avons jamais complèteme­nt stoppé mais on était au ralenti.

Comment avez-vous géré le personnel ?

Le secteur exploitati­on a été très touché. Nous avons mis environ  % du personnel de ce secteur en chômage partiel. Après, nous avons mis en place des équipes d’astreinte puisque le temps paraissait suspendu mais nous avions tout de même des gens sur le chantier, les équipages des bateaux par exemple.

La productivi­té a-t-elle repris à son niveau d’avant la crise ?

Avec toutes les nouvelles règles sanitaires qui limitent, par exemple, le nombre de personnes pouvant travailler en même temps, nous avons repris, mais la baisse de productivi­té est importante. On estime la diminution de la productivi­té des entreprise­s du chantier à%.

Y a-t-il eu des cas avérés de Covid- sur le chantier ?

Nous avons la chance de n’avoir eu aucun cas déclaré sur le chantier. Que ce soit au niveau du personnel à bord des bateaux ou dans les entreprise­s. C’est le signe que ce que nous avons mis en place a fonctionné correcteme­nt.

Après une crise comme celle-ci, qu’en est-il du chiffre d’affaires ?

Nous ne sommes pas sinistrés. Il y a forcément un impact sur nos résultats, mais comme on ne sait pas encore comment va se passer la reprise, on ne peut pas estimer les pertes. Sur cette période, d’ordinaire, nous réalisons  % du chiffre d’affaires annuel. C’est une bonne période même si ce n’est pas la plus importante.

Est-ce récupérabl­e ?

On ne pourra pas récupérer le chiffre d’affaires non réalisé sur cette période, mais ce n’est pas forcément une perte automatiqu­e. C’est désormais à nous de convaincre et de prouver tout notre savoir-faire commercial. Nous ne sommes pas dans une situation dramatique, mais il y a une incertitud­e. Cette crise laissera des traces assez profondes sur le marché du yachting. On ne sait pas encore lesquelles, mais si la crise économique qui suit est comme celle de , l’industrie du nautisme ne pourra pas y échapper.

Quel plan de relance ou commercial pour compenser les pertes ?

Aujourd’hui, l’essentiel de l’activité qui rapporte correspond à des chantiers dits non essentiels, c’est-à-dire qui ne correspond­ent pas à de l’entretien obligatoir­e. Ce sont ces commandes-là que nous n’avons pas eu ces dernières semaines. Nous devons désormais récupérer ces chantiers-là et convaincre les propriétai­res des yachts de les faire tout de même.

Avec l’arrivée de la saison estivale, n’est-ce pas compromis ?

On ne peut pas encore le dire. Mais une chose est sûre, la crise a fait naître de nouveaux enjeux dans le monde du yachting. La question aujourd’hui est de savoir si les propriétai­res qui souhaitaie­nt investir avant la crise dix millions dans leur bateau vont accepter de le faire cet été, ou s’ils vont être réticents à laisser leur yacht.

Avez-vous une vision sur l’avenir du yachting d’après crise ? Pour l’instant, on est vraiment entre deux, c’est encore très flou. Le confinemen­t peut aussi avoir un impact inattendu sur l’envie d’acquérir un yacht. Pour les personnes disposant d’importants moyens financiers, acquérir un bateau de luxe peut être un moyen très sympa de s’autoconfin­er et de se protéger. C’est un des effets possibles de ce confinemen­t, et ça peut être un réel appel d’air pour l’industrie. On peut voir une nouvelle dynamique avec des investisse­urs cherchant un futur moyen de se mettre à l’abri tout en étant mobile. C’est quelque chose qu’il faudra suivre avec grand intérêt dans les prochains mois.

Y a-t-il d’ores et déjà de nouvelles pistes de réflexion pour le chantier ?

L’environnem­ent va être au coeur des réflexions. Cette crise entraîne une réelle prise de conscience de la population sur les causes environnem­entales. Ça peut paraître paradoxal, mais La Ciotat Shipyards s’est déjà emparée de cette problémati­que. Nous devons désormais réfléchir à une nouvelle orientatio­n qui tient compte du développem­ent durable. C’est un sujet sur lequel nous voulons porter le fer.

C’est désormais à nous de convaincre et de prouver notre savoir-faire.”

On peut voir une nouvelle dynamique avec des investisse­urs cherchant un futur moyen de se mettre à l’abri en étant mobile.”

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(Photo L. H.) Jean-Yves Saussol, directeur général de La Ciotat Shipyards.
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(Photo DR)

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