Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)
LE BOOM DU VÉLO DANS LE VAR EN SELLE
Peur des transports en commun, trafic automobile moindre… La période de confinement aura été favorable au vélo. Surtout dans les grandes villes. C’est moins vrai dans la métropole toulonnaise
Même au plus fort du confinement, José Pereira, gérant de la boutique AJP Bike Store n’a jamais complètement baissé le rideau de son commerce toulonnais. « Tous les matins, je venais à vélo depuis La Crau. Sans ça, il y avait de quoi devenir fou », raconte l’intéressé. Une soupape psychologique en quelque sorte, car il faut bien l’avouer, ce n’est pas la perspective de réaliser des affaires qui l’a motivé. « Pendant les deux mois de confinement, où plus grand monde ne sortait, j’ai dû vendre quatre chambres à air par semaine ». Dans le vélo depuis 1985, José n’est donc pas mécontent de la levée des restrictions de circulation depuis le 11 mai. « Ça fait quand même du bien de revoir du monde », lâche-t-il. Pour autant, on ne peut pas parler de retour à la normale. Les ventes ne sont pas au rendez-vous.
Des réparations pas toujours simples
« C’est au mois de mars qu’on vend les derniers modèles de vélos. Avec le confinement qui interdisait aux cyclistes de rouler, on a raté un gros mois. L’an dernier, fin mars, j’avais pour 42 000 euros de commandes. Cette année, certains clients qui n’ont pas pu être livrés à temps annulent même leurs commandes et demandent à être remboursés », explique José, fataliste. Et pas question de rattraper. « Depuis la fin du confinement, il y a de la demande. Malheureusement, les produits ne sont disponibles. Les fournisseurs, qui ont pu continuer à vendre dans le nord de l’Europe pas soumise au même confinement, sont en rupture de stock ».
Dans sa boutique, José Pereira est pourtant loin de se tourner les pouces. Une suractivité qu’il doit en grande partie à l’opération coup de pouce lancée par le gouvernement. « Depuis que le dispositif de prime est réellement opérationnel, ça n’arrête pas. Il y a des vélos de partout. En ce moment, je dois en réparer entre 8 à 10 par jour ! ». Des réparations pas toujours simples. Même pour un professionnel. « On voit parfois arriver des vélos de derrière les fagots ! Alors, on peut être bloqué à cause d’une pièce de rechange qui nous fait défaut ». Mais José joue le jeu, estimant que « ça fait partie de [son] métier ».
Et les biclous ne sont pas la seule difficulté liée à la prime gouvernementale. Sans cracher dans la soupe, José et son épouse Sylvie expliquent : « Pour l’instant, on fait les banquiers. On ne sait pas quand l’État nous remboursera les réparations effectuées. Sans parler des contraintes administratives : pour chaque vélo réparé, il faut envoyer une photo et une facture détaillée des travaux effectués ». Secrétaire du Club Cyclos randonneurs Gardéens (CCRG), Patrice Suriano ne ne croit guère à un boom durable pour le vélo. « On connaît les engouements forcés liés à des incitations financières. Ça ne dure jamais très longtemps. Surtout par chez nous, où les néo-cyclistes se rendent vite compte que les routes ne sont pas plates ».
« C’est cyclique »
S’il « espère avoir tort », Patrice n’a pour l’heure « pas constaté de fièvre » au niveau de son club, dont les effectifs plafonnent autour de 60 membres. Mais il est vrai aussi que les sorties en groupe n’ont pas encore repris. « Le département étant en vert, on a toutes les raisons de croire que les restrictions – respecter des distances de 10 m entre les vélos et limiter les groupes à 10 personnes – seront levées début juin », confie le secrétaire du CCRG. Tenace comme pouvait l’être Bernard Hinault, Patrice Suriano revient sur le pseudoengouement pour le vélo. « C’est cyclique. La dernière grande mode pour le vélo, on l’a connue dans les années 1980, quand les Français gagnaient le Tour de France ».