Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)

DISPARITIO­N Guy Bedos tire sa révérence à l’âge de  ans

L’humoriste s’en est allé hier à l’âge de 85 ans, laissant derrière lui des sketchs féroces et un indéfectib­le engagement à gauche

- ALAIN GRASSET

On le savait souffrant, très affaibli, et ces derniers temps on s’attendait au pire. Cinq jours seulement après la disparitio­n de son grand ami, Jean-Loup Dabadie, qui avait écrit « Nous irons tous au paradis », Guy Bedos l’a suivi très vite tout là-haut. Il avait 85 ans. Incroyable destin pour ces deux artistes qui se sont tant aimés, nous ont tant fait rire et souvent émus aux larmes. C’est son fils Nicolas (Bedos) qui l’a annoncé hier en fin d’aprèsmidi sur son compte Instagram accompagné d’une jolie photo en noir et blanc, « Il était beau, il était drôle, il était libre et courageux. Comme je suis fier de t’avoir eu pour père. Embrasse Desproges et Dabadie. Vu que vous êtes tous au Paradis. ». Un fiston Bedos, lui aussi humoriste, comédien, metteur en scène, et qui poursuit brillammen­t les traces de son paternel au cinéma. Au ciel, Guy Bedos va encore bien se marrer avec sa prochaine réalisatio­n, « OSS 117 : Alerte rouge en Afrique Noire » avec Jean Dujardin (sortie le 3 février 2021) dont ils avaient sans doute beaucoup parlé ensemble avant le tournage au

Kenya l’hiver dernier. Avant de devenir l’un des monstres sacrés de la scène française avec son humour féroce, des rendez-vous de Michel Drucker, un anar de gauche comme il se définissai­t, voire très critique envers elle, Guy Bedos avait connu une enfance assez difficile. Né le 15 juin 1934 à Alger, après la séparation de ses parents, son beaupère battait sa mère, laquelle frappait son fils en retour. Conséquenc­e, le gamin développai­t des troubles obsessionn­els compulsifs et il était aussi très choqué par le traitement cruel que les colons, dont ses parents, faisaient subir aux autochtone­s.

« Pouvoir tout dire, y compris beaucoup de conneries »

Après Alger, c’est à Paris que sa famille s’installe en 1946. Trois ans plus tard, lycéen, Guy entre à l’Ecole de la rue Blanche. Tout en débutant sur les planches, il décroche son premier rôle au cinéma dans « Futures vedettes » de Marc Allégret (1955). À l’horizon des années 60, sa rencontre avec la blonde Sophie Daumier (qu’il épouse) change le cours de sa jeune carrière. Leur premier duo comique en 1963 fait un tabac. Et leur sketch « La Drague », écrit par Jean-Loup Dabadie (1965) va emporter l’adhésion du public. En solo, Guy Bedos, se produit à Bobino en 1968. C’est la consécrati­on. En privé, son couple explose. Il se sépare d’avec Sophie Daumier en 1977. Une rupture douloureus­e. Heureuseme­nt, le cinéma le réclame. En 1969, Claude Berri lui offre l’un de ses meilleurs rôles au cinéma dans « Le Pistonné ». Dans ce film autobiogra­phique du réalisateu­r, il incarne le fils d’un tailleur juif parisien incorporé dans l’armée après avoir tenté d’être pistonné. Drôle, fragile, roublard, il fait merveille dans cette tragicoméd­ie corrosive, mélancoliq­ue et antimilita­riste, qui aborde aussi le racisme pendant la guerre dans les colonies du Maghreb. Guy Bedos, très demandé, va alors partager l’affiche de « Un éléphant ça trompe énormément » d’Yves Robert (1977) et de sa suite « Nous irons tous au paradis ». Il joue un jeune médecin traumatisé par sa mère trop envahissan­te. Deux énormes succès au box-office, aux côtés de Jean Rochefort,

Claude Brasseur et Victor Lanoux. Mais voilà ce petit bonhomme, aux yeux espiègles, très angoissé, n’oublie pas la scène. «Je me sens d’abord humoriste et satiriste. C’est ça ma religion. Je veux pouvoir tout dire, y compris beaucoup de conneries. ». Dans les années 80/90, à la télévision, dans des salles remplies, il s’en donne à coeur joie. En véritable sniper, il tire sur la droite, sur la gauche, avec ses revues de presse où il allume les hommes politiques qui n’en ressortent pas intacts. «On me traite de méchant. Je récuse cette réputation. Mais je ne cherche pas à blesser à tout prix. » Bedos, piquant, caustique, avait fait ses adieux le 23 décembre 2013 à l’Olympia pour une formidable dernière revue de presse. Marié trois fois, avec Karen Blanguerno­n, Sophie Daumier (décédée en 2003) et Joëlle Bercot, Guy Bedos était père de quatre enfants, Leslie, Mélanie, Victoria et Nicolas. Il partageait son existence entre Paris et la Corse. Selon son souhait, il sera d’ailleurs enterré au cimetière de Lumio (Haute Corse) dans la plus stricte intimité familiale.

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 ?? (Photo Claude Dronsart) ?? Pieds dans l’eau, ou presque, avec France Gall, Sophie Daumier et Eddie Barclay.
(Photo Claude Dronsart) Pieds dans l’eau, ou presque, avec France Gall, Sophie Daumier et Eddie Barclay.
 ?? (Photo Dominique Leriche) ?? En juin , escale varoise du côté de La Garde, au domaine de Massacan.
(Photo Dominique Leriche) En juin , escale varoise du côté de La Garde, au domaine de Massacan.
 ?? (Photo Patrice Lapoirie) ?? Avec sa fille Victoria, en , sur le tapis rouge du Festival de Cannes...
(Photo Patrice Lapoirie) Avec sa fille Victoria, en , sur le tapis rouge du Festival de Cannes...

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