Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)
Le grand coup d’accélérateur
Dès les premières minutes de l’intervention d’Édouard Philippe, l’affaire était entendue. Dans le sens où chacun l’espérait. D’une jolie et maligne trouvaille mitterrandienne, « la rigueur tranquille », la vie a repris du poil de la bête. Une mâle assurance, enfin, après tant de repli et de frilosité. Bien sûr, le Premier ministre a entouré ses annonces de quelques garde-fous et obligations de responsabilité. Mais chacun aura d’abord retenu de son intervention l’ouverture des vannes de la liberté. En beaucoup plus grand même qu’on s’y attendait. Parcs, restos, voyages, spectacles… Malgré les circonvolutions d’usage, il flottait un doux parfum de juillet à Matignon. Une jubilation péniblement contenue perçait sous la barbe bicolore d’Édouard Philippe. Depuis quelque temps déjà, la peur avait changé de perspective. À mesure que le total des morts a décru et celui des chômeurs explosé, les Français ont changé leur fusil d’épaule. Ils ne se satisfont plus de largesses sociales factices, conscients que la planche à billets ne peut tourner à l’infini en surrégime, sans réclamer demain des comptes douloureux. Ils sont inquiets pour l’avenir. Le leur, le flot des demandeurs d’emploi ayant grossi de personnes en avril ; celui de leurs enfants, alors que l’école à distance, divine surprise du début de confinement, se relâche chaque jour un peu plus, du côté des élèves comme des profs. Nombre de jeunes en fin d’études mesurent aussi que trouver un boulot, voire un simple stage, sera coton cette année ! Ne parlons même pas du secteur touristique, pour lequel la reprise était vitale. Sur un air de vacances, le plus dur démarre : remettre en route une économie que l’épreuve sanitaire a durablement fragilisée. Ce sera long. Et il ne faut pas attendre grand soutien de l’application StopCovid, usine à gaz numérique dont on doit plus redouter l’inefficacité que l’atteinte aux libertés.
« La planche à billets ne peut tourner à l’infini en surrégime. »