Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)
CLASSES OBLIGATOIRES
Emmanuel Macron a défendu hier son action durant la crise et esquissé ses priorités : souveraineté, écologie, solidarité, décentralisation. Sa feuille de route sera précisée en juillet
Beaucoup avaient, jusqu’ici, reproché à Emmanuel Macron de parler trop longtemps pour ne pas dire grand-chose. Pour sa quatrième intervention liée à la crise sanitaire, le chef de l’État a gommé hier soir l’un de ces deux écueils : il n’a causé dans le poste qu’un gros quart d’heure. Après quelques mesures très concrètes balancées pied au plancher, il s’est, en revanche, contenté de tracer des perspectives très génériques, une feuille de route plus cadrée étant promise pour juillet. On sait déjà, sans surprise, qu’elle visera à une reconquête de notre souveraineté et accentuera le virage écologique, social et décentralisateur. Le chef de l’État, dans une sorte de coup d’envoi du dernier tiers de son quinquennat, s’est aussi employé à calmer les tensions, en adressant un double message à la jeunesse et aux policiers, associés dans le même idéal républicain.
Restos, écoles : tous les feux passent au vert
Emmanuel Macron a d’emblée délivré, en rafale, les annonces tangibles. Tout le territoire français, à l’exception de Mayotte et de la Guyane, passe dès aujourd’hui en zone verte. Ce qui va notamment permettre la réouverture des cafés et restaurants en Ile-de-France. Dès ce lundi également, les visites « devront désormais être autorisées » (donc a priori sans restrictions) en maisons de retraite. L’école et le collège redeviendront obligatoires pour tous à partir du 22 juin. A la même date, les crèches devront accueillir tous les enfants. Le second tour des municipales aura bien lieu, comme prévu, le 28 juin. Dès le 1er juillet, les voyages redeviendront également possibles hors d’Europe, « dans les pays sûrs ». En revanche, le Président a indiqué qu’il « faudra continuer d’éviter au maximum les rassemblements, car nous savons qu’ils sont les principales occasions de propagation du virus ».
« Nous pouvons être fiers de ce qui a été fait »
Le chef de l’État, dont la cote s’est encore émoussée durant la crise, très injustement à ses yeux, s’est aussi efforcé de rehausser les mérites de son action. « Si nous pouvons rouvrir le pays, c’est que chacun à sa place y a pris sa part. Nous avons fait le choix humaniste de placer la santé au-dessus de l’économie. Nous n’avons pas à rougir de notre bilan. Des dizaines de milliers de vies ont été sauvées grâce à nos choix. Nous avons montré de la ressource, nous avons été inventifs, réactifs, solides, nous pouvons être fiers de ce qui a été fait. » Sans occulter certains ratés : «Ilfaut tirer les leçons des échecs, de ce qui a été moins bien fait. Nos faiblesses, nous les corrigerons. »
Vers un nouveau modèle social et écologique
Faire mieux, adapter notre pays aux nouveaux défis imposés par la crise, ce sera donc l’objet des deux dernières années du quinquennat. Emmanuel Macron en a érigé les cinq piliers : plus de souveraineté, plus d’Europe, plus d’écologie, plus de solidarité et plus de décentralisation. « Il faut accélérer la reprise, pour faire pleinement repartir notre économie. Nous devons ouvrir une nouvelle étape afin de retrouver la maîtrise de nos vies en France et en Europe. Nous devons retrouver notre indépendance pour vivre mieux. » La « première priorité » sera donc de « reconstruire une économie forte, écologique et solidaire. Nous avons mobilisé près de 500 milliards pour notre économie et les travailleurs, c’est inédit. Dans combien de pays cela a-t-il été fait ? Cela montre la force de notre modèle social. » Et le Président l’a promis clairement : « Nous ne financerons pas ces dépenses en augmentant les impôts. » Tout sera mis en oeuvre « pour éviter les licenciements et créer de nouveaux emplois, en investissant pour notre indépendance écologique, numérique et agricole ». Un plan de modernisation du pays autour de la rénovation thermique et de déplacements moins polluants sera ainsi proposé. Comme déjà promis, cette « reconstruction sociale et solidaire » passera en outre par une revalorisation des personnels soignants, une organisation plus efficiente de notre système de santé, « une meilleure protection des aînés et des plus pauvres » et des « investissements massifs pour l’éducation et la jeunesse ».
Un ancrage plus que jamais européen
S’il est un cap dont Emmanuel Macron ne dévie pas depuis son arrivée à l’Élysée, c’est celui de l’Europe. Tout en reconnaissant en léger retard à l’allumage de l’Union européenne au début de la pandémie, il estime qu’elle a ensuite pleinement assumé ses responsabilités. « La reconstruction se fera avec l’Europe. Elle doit même être l’occasion de consolider une Europe plus forte, plus souveraine. » Le Président entend s’y atteler cet été.
« Libérer la créativité du terrain »
La feuille de route à venir en juillet fera aussi la part belle à la décentralisation et à « de nouveaux équilibres dans les pouvoirs ». « Tout ne peut pas être décidé à Paris. Faisons davantage confiance aux territoires, libérons la créativité du terrain, des hôpitaux, des entrepreneurs, des maires… Les temps imposent de dessiner un nouveau chemin, chacun doit se réinventer et je l’applique à moi-même. »
Égalité des chances mais… ordre républicain
Macron ne serait pas Macron sans le fameux « en même temps ». Face aux désordres actuels du pays, il y a sacrifié pour appeler à « l’unité autour du patriotisme républicain ». Une manière de donner du grain à moudre à tout le monde : « Le nom, l’adresse, la couleur de peau réduisent les chances. Nous serons intraitables face au racisme et à l’antisémitisme », a-t-il martelé, annonçant des mesures fortes pour l’égalité des chances. « Mais ce combat, a-t-il nuancé, est inacceptable lorsqu’il est récupéré par les séparatistes : la République n’effacera aucun nom de son histoire et ne déboulonnera pas de statues. Nous n’avons pas à nier ce que nous sommes. Il n’y a ni sécurité ni liberté sans ordre républicain, et cet ordre, ce sont les policiers et les gendarmes qui l’assurent : ils méritent le soutien de la puissance publique et la reconnaissance de la nation. » Pour en savoir plus sur la traduction concrète des intentions affichées hier soir, il faudra maintenant attendre juillet…