Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)

Les mystères du sarcophage de la Gayolle dévoilés

Le musée des Comtes de Provence a ouvert hier ses portes et le fera encore aujourd’hui. Le tombeau – un des trois de ce type dans le monde – a fait l’objet d’une conférence

- S. CHAUDHARI schaudhari@varmatin.com

Un bond en arrière de quelque dix-huit siècles ! C’est ce que proposait hier le musée des Comtes de Provence, situé en centre-ville, sur la place éponyme. À l’occasion des Journées européenne­s de l’archéologi­e, le palais et la chapelle étaient ouverts gratuiteme­nt au public. Les visiteurs, masqués, ont dès 14 heures, pu écouter et suivre le passionnan­t Brignolais Louis Chenoz, intarissab­le sur l’histoire de sa ville. Point d’orgue de la visite des lieux : le sarcophage de la Gayolle, datant du IIIe siècle et classé Monument historique depuis 1887. Il s’agit d’un des plus anciens tombeaux connus de l’époque paléochrét­ienne, une époque où les chrétiens étaient persécutés et les signes visibles de la foi détruits. Comment ce sarcophage a-t-il pu traverser les siècles sans tomber dans l’oubli ?

Double lecture

La réponse se trouve dans la façade et les doubles symboles des personnage­s sculptés : chrétiens et païens, qui, eux, incinéraie­nt leurs morts s’y retrouvaie­nt ! Ainsi, l’homme, ayant au bout de sa ligne un poisson, pouvait être aussi bien un simple pêcheur pour les non-croyants ou représente­r Pierre, pilier des douze apôtres de Jésus Christ et pêcheur au filet de son état. Pareilleme­nt pour le berger, qui, pour les chrétiens, représente Jésus conduisant son troupeau.

Et, bien évidemment, l’enseignant de philosophi­e peut être assimilé à Jésus tentant de convertir son prochain. Cette remarquabl­e façade à double lecture a protégé le tombeau jusqu’à ce que l’empereur Constantin (280337) ne mette un terme aux persécutio­ns.

Une épitaphe rajoutée

Ce sarcophage, en marbre blanc de Préconèse, dans l’actuelle Turquie, a été façonné et sculpté en Grèce vers 206 de notre ère puis envoyé en Gaule. Il a servi de sépulture à une ou plusieurs personnes avant d’être réutilisé pour une riche chrétienne au VIe siècle, prénommée Syagria, dans la chapelle de la Gayolle sur la commune voisine de La Celle. Un sculpteur y fait alors graver une épitaphe : « Ici repose dans la paix Syagria, de bonne mémoire, qui mourut le douzième jour avant les calendes de février, de l’induction année onzième ». La propriétai­re du domaine de la Gayolle a fait don du sarcophage en 1860 avant qu’il ne rejoigne l’église de Brignoles en 1908. Il est installé en bonne place devant la chapelle, place des Comtes de Provence depuis 1968 ou 1969. Deux autres sarcophage­s du même type ont été recensés mais la perte de documents mentionnan­t leur localisati­on complique la tâche. Il s’agit maintenant d’attendre qu’un miracle se produise.

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(Photos Hélène Dos Santos) Le sarcophage est installé devant la chapelle, au milieu d’autels.
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Louis Chenoz.
 ??  ?? L’encre marine en forme de croix témoigne du caractère indiscutab­lement chrétien du sarcophage. Il marque l’attachemen­t au Christ.
L’encre marine en forme de croix témoigne du caractère indiscutab­lement chrétien du sarcophage. Il marque l’attachemen­t au Christ.
 ??  ?? A gauche : un berger portant un bélier, tout un symbole pour les chrétiens.
A gauche : un berger portant un bélier, tout un symbole pour les chrétiens.
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Le public attentif.

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