Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)

L’organisate­ur

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« Ça me fait toujours quelque chose d’être là...» Quatre décennies plus tard, c’est avec une petite émotion que Dominique Kihm s’approche du stade Mayol. Depuis 1980, l’enceinte et ses abords ont bien changé, mais qu’importe, il se souvient dans les moindres détails de cette soirée dans laquelle il a joué un rôle crucial. Pourtant, pas grand-chose ne prédestina­it ce minot et ses collègues à organiser le plus grand concert de l’histoire de Toulon. « Nous avons monté l’associatio­n Albatros en 1975. On était un groupe d’amis, tous bénévoles et on organisait des concerts dans toute la région. » Malgré leur statut associatif, les jeunes Toulonnais se font une réputation. Et les producteur­s parisiens les solliciten­t de plus en plus pour monter des dates dans le Sud.

Buzz avant l’heure

« Un jour, Gilbert Coulier nous appelle et nous dit que Bob Marley va faire une tournée en Europe. Il nous demande de voir si on peut trouver un lieu pour accueillir 6 à 8 000 spectateur­s, quelque part entre Nice et Marseille. » Dominique Kihm pense tout de suite à Mayol, même si le temple du rugby est plutôt réservé aux joutes sportives. Reste à convaincre la mairie, propriétai­re des lieux. « Nous solliciton­s le maire Maurice Arreckx. Il ne savait pas qui était Bob Marley, mais nous a dit oui. » Tout simplement... Ensuite, les choses vont très vite. Même sans Internet, ni radios libres, l’informatio­n se répand comme une traînée de poudre. « À l’époque, il n’y avait pas comme aujourd’hui de billetteri­e électroniq­ue, nous avons dû livrer des carnets de tickets de Perpignan à Nice et même en Italie », se rappelle Dominique Kihm. Le bouche-à-oreille fait le reste et le 26 juin, des milliers de spectateur­s affluent vers Mayol. La vente des billets (50 francs l’entrée) se poursuivra une partie de la soirée, assurée par des employés de l’opéra installés dans une petite caravane. Mais devant l’afflux de public, certains finissent par entrer dans le stade sans ticket. Au point qu’il est aujourd’hui difficile de savoir combien ils étaient dans les gradins et sur la pelouse.

Bob refuse la limousine

Les organisate­urs, eux, avaient aussi toute la logistique à gérer. « Les artistes à l’époque arrivaient un peu les mains dans les poches, il a fallu trouver la scène, le matériel de sonorisati­on dans toute la région, puis amener tout ça à l’intérieur du stade en démontant une partie des piliers extérieurs .» Malgré quelques sueurs froides, tout se passe bien, au final. Dans une chaleur proche de ce qu’on peut connaître ses derniers jours, la foule s’entasse dans le stade. Un peu après 21 h, les Wailers montent sur scène, rejoints un peu plus tard par Bob Marley. Dominique se souvient d’une incroyable communion entre le public et les musiciens. L’épaisse fumée qui se dégage du stade n’y est peut-être pas pour rien. Quant à l’artiste, star planétaire à l’époque, l’organisate­ur se souvient avant tout de sa simplicité. « Nous sommes allés le chercher à Marignane. Nous avions prévu une limousine pour lui, mais il a refusé et préféré prendre le bus avec ses musiciens. » Durant les deux jours qu’il passe à Toulon, Marley se promène dans la ville, dédicace volontiers photos et affiches pour les passants. Sur la pelouse du stade Mayol avant le concert, il improvise un match de foot avec ses technicien­s et les organisate­urs. En toute simplicité. Pour l’équipe d’Albatros, ce concert est un tournant. L’associatio­n devient une société, qui organisera des centaines de concerts dans la région et plus loin encore. Mais pour Dominique Kihm, la venue de Bob Marley conserve une dimension spéciale.

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(Photo Sophie Louvet) Dominique Kihm et ses copains de l’associatio­n Albatros ont mis sur pied, en quelques semaines, le plus gros concert de l’histoire de Toulon.

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