Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)

Ma rando’ : échec lamentable bercé de mauvaises décisions

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Selon un proverbe afghan, « si haute que soit

la montagne, on y trouve un sentier ». Celui qui a écrit ça ne devait pas me connaître. Parce que pour trouver le sentier, moi, il faut m’expliquer longtemps. Quand, au petit matin, dans l’ombre du plus haut sommet du Var, je me retrouve face à ce que la décence devrait m’empêcher de qualifier “une route”, je doute. Un coup de fil à Marc Sauvan, mon guide du jour, confirme mes craintes. Je ne suis pas au bon endroit. Le rendez-vous était donné au sommet du Lachens. Le plan était simple : parce que le temps nous était compté, nous devions laisser une voiture en haut, puis redescendr­e à La Bastide, avant de remonter, mais à pied cette fois. Au téléphone, Marc est catastroph­é : « Il y a une route tout à fait goudronnée, mais plus loin. Je ne sais pas pourquoi vous êtes passé par La Roque… »

Pour vous éviter le même genre de déconvenue, je vous conseille donc fortement, en arrivant du sud, de ne pas écouter le guide Google.

Le silence est d’or

Plan de secours : on attend Marc qui était déjà arrivé près de l’aire de décollage des parapentes qui s’élancent dans le ciel. À La Bastide, on a une petite heure de retard sur notre planning déjà serré quand enfin on part à l’assaut du mont Lachens. D’une gentilless­e à toute épreuve, Marc ne nous accable pas, et marche d’un pas aérien vers le départ de la randonnée. C’est à se demander s’il produit le moindre effort… Parce que dès les premiers mètres, après un passage dans le sous-bois qui borde le village, ça grimpe. Et pas qu’un peu. D’habitude bavard, je me tais, histoire d’être certain d’optimiser chaque bouffée d’air. Ce n’est pas facile, mais au final, c’est loin d’être désagréabl­e. D’abord parce que le calme de la marche a quelque chose d’apaisant, ensuite parce que la températur­e, sur les pentes de la montagne, est parfaite : ni trop chaude, ni trop froide. Alors on avance, et les paysages qui défilent le long du sentier dont il est difficile de s’échapper éblouissen­t plus d’une fois. Alternant passages ombragés et clairières baignées de soleil, la marche se poursuit, en montée, toujours en montée. La nature étant bien faite, s’offrent à nos mollets de véritables escaliers naturels, faits de roches sculptées par l’usage des hommes, ou par des

racines déterrées par ces mêmes passages fréquents. « On rencontre parfois du monde, confirme Marc. Et ces derniers temps, ce sont surtout des vététistes, qui descendent à toute

allure. » Vu le dénivelé, on voit mal comment le moindre vélo peut espérer tenir plus de 5 secondes avant de s’envoyer en l’air, parfois littéralem­ent… «Si,si», confirme Marc, nous enjoignant à visionner les exploits de certains pros sur Internet. Et effectivem­ent, un passage sur YouTube confirme les dires du randonneur qui poursuit, en sautillant, sa marche tandis que notre démarche est, elle, de plus en plus lourde. Je tente de temps en temps quelques plaisanter­ies, histoire de faire comme si je n’étais pas à l’article d’une perte de conscience. Mais mon esprit, que j’imagine si fin, n’est pas au top de sa forme. Marc esquisse un sourire : « Je ne ris pas par manque d’oxygène », dit-il poliment. Je fais mine de le croire, histoire de sauver le peu d’honneur qu’il me reste. Parce que c’est désormais certain : nous n’arriverons pas au sommet. Il faut le dire tout net : il n’est pas question ici de défaillanc­e physique, que j’aurais avouée sans détour. Non, l’heure tourne. Il va falloir rentrer, d’autres reportages nous attendent. Et c’est le moment d’élaborer un plan C. Histoire de prendre la mesure du Lachens dont on parcourt les pentes depuis deux petites heures. Après un passage au pied du château (lire

page suivante), retour au parking, pour une marche plus rapide mais pas plus simple : il faut maîtriser une descente raide, surtout quand le sol parsemé de cailloux se défile. Mais on y arrive. Et on prend la voiture vers les hauteurs du départemen­t. Pour ne pas qu’on se perde, Marc ouvre la voie et nous mène au pied de la (vraie) route. Le véhicule grimpe les lacets du Lachens sans souci. Et enfin, on y arrive. En haut. Sur le toit du Var. Là, on prend la peine de monter encore quelques mètres pour atteindre la table d’orientatio­n qui fait face à la station militaire aux nombreuses antennes. Et, enfin, le Lachens dévoile sa véritable nature. À 360°, le Var est à nos pieds. Les forêts. Les nuages. C’est ça qui marque : le ciel. Comme s’il était plus… près. Soufflé dans tous les sens du terme, on a gravi le Lachens. Avec toutefois un léger goût d’inachevé… Mont Lachens : je reviendrai !

‘‘ Je ne ris pas, parce que je manque d’oxygène”

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