Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)

Un Canadien retrouvese­s trois frères niçois

Michael Sovyn, Canadien de 74 ans, a passé sa vie à chercher son père Lucien, un soldat français qui avait eu une brève romance avec sa mère en 1945 en Allemagne. Hier, il a rencontré pour la première fois sa « nouvelle » famille à l’aéroport de Nice.

-

Beau moment d’émotion, hier, à l’aéroport de Nice. Trois Niçois de 70 ans (ou presque) ont fait la rencontre de leur demi-frère Michael, dont ils ignoraient l’existence il y a encore six mois. Une histoire dingue. Alain, Christian et Jean-Marie Laurent ont appris la nouvelle en janvier quand la généalogis­te parisienne Murièle Gadaut les a contactés. « Elle m’a demandé si j’étais bien assis avant de m’annoncer que j’avais un demifrère au Canada », se remémore Alain. « Un frère qui sort du chapeau à 62 ans comme ça, c’est fou », sourit Jean-Marie, le cadet. Ce nouveau membre de la fratrie s’appelle Michael Sovyn, un Canadien de 74 ans originaire de Saskatoon, une ville de 295 000 habitants située en plein coeur de la province de Saskatchew­an (ouest du Canada). Aidée par sa fille Sherri, il a passé une grande partie de sa vie à rechercher son père biologique, dépensant autant d’argent que d’énergie dans cette quête. « J’ai su, quand j’avais quatre ou cinq ans, que j’avais de la famille à l’étranger. On a essayé maintes et maintes fois de la retrouver. En vain », raconte Michael. Il faut dire que le Canadien ne connaissai­t quasiment rien de son paternel : seule une photo en noir et blanc datée du 8 juillet 1945 avec au dos un mot écrit en français le rattachait à ses racines. Une phrase manuscrite signée d’un certain « Lulu ». Lucien. Sa mère Maria, décédée en 2005, lui a raconté avoir rencontré cet homme, « un beau soldat français » en Allemagne à la fin de la Seconde Guerre mondiale dans le restaurant où elle travaillai­t. Une « brève romance » est vite née entre eux et s’est achevée tout aussi rapidement.

D’improbable­s points communs

Le devoir a appelé Lucien ailleurs. Maria était enceinte, il ne le savait pas. L’Ukrainienn­e a accouché dans un camp allemand pour étrangers avant qu’une famille canadienne ne les aide, elle et son fils, à s’installer en Amérique du Nord. Lucien Laurent, lui, s’est posé à Nice après un passage en Tunisie avec son corps d’armée. Il a fait sa vie, a eu trois beaux enfants. Aidée par sa fille Sherri, Michael Sovyn a bien tenté de partir sur les traces de son père mais il est à chaque fois rentré bredouille de ses voyages en France. Jusqu’au tournant. « Un énorme coup du hasard », rembobinen­t les frangins niçois. Grâce aux nouvelles méthodes de recherche, Michael a fait un typage ADN, qui, un jour, a « matché » avec celui d’un habitant de l’Aveyron, Bastien, un cousin germain des frères Laurent. Ce dernier s’était inscrit tout récemment sur Myheritage.fr. «Découvrez vos origines ethniques uniques et trouvez de nouveaux liens familiaux », vend le site Internet. Promesse tenue. Les recherches de la généalogis­te engagée par Michael Sovyn mènent tout droit à Alain, Christian et Jean-Marie. Le doute n’est pas possible. Le Canadien est le portrait craché de son père. Plus que ne le sont les trois autres. Et si leur nouveau demi-frère n’en avait que pour leur argent ? «Impossible, on n’en a pas », balaientil­s immédiatem­ent avec le sourire. « J’ai tout de suite ressenti une grande joie pour ce garçon qui a passé sa vie à chercher sa filiation », se souvient Alain, l’aîné relégué tout d’un coup au deuxième rang de la fratrie. Les deux familles prennent rapidement contact. Les échanges, sur Zoom la plupart du temps, sont simples et chaleureux. La langue – Michael est anglophone – n’est même pas une barrière tant ces clans familiaux, qu’un océan sépare, ont envie de se connaître plus. Dans la vie, ça « matche » aussi. Les Sovyn et les Laurent se découvrent d’étonnants points communs, comme ces prénoms similaires donnés aux petits-enfants et aux cousins. Ou ces livres « qu’on est peut-être 150 à posséder dans le monde ».

« L’apparition de Michael les a rapprochés »

Sherri, chapelière reconnue au Canada, s’était toujours demandé d’où lui était venu son talent pour les chapeaux. Elle apprend qu’elle l’a hérité de son grand-père Lucien, qui en fabriquait avant d’être réquisitio­nné pour la guerre. Les deux familles devaient initialeme­nt se rencontrer en mars mais le Covid-19 est passé par là. Un tout petit obstacle quand on a reconstitu­é le puzzle de sa vie après des années de recherches. Dans la zone des arrivées de l’aéroport de Nice, l’émotion est palpable. Alain, Christian et Jean-Marie se tiennent droit, serrés les uns contre les autres. Le reste de la famille est un peu plus loin. « L’apparition de Michael dans leur vie les a rapprochés », confie à demi-mot l’un des fils. A l’arrivée du Canadien et de sa famille, les poignées de mains timides laissent rapidement place aux embrassade­s plus généreuses. « Il ressemble tellement à papa », remarque Jean-Marie. « Je suis si heureux. J’ai cherché cette famille toute ma vie, je ne pensais pas que ça pouvait arriver », s’émerveille Michael Sovyn, tout heureux de voir que ses demifrères sont « aussi petits que lui ». Sa fille Sherri et sa femme Lorraine sont au bord des larmes. «Iln’apas eu une vie facile. C’est tout ce dont il

 ?? (Photo Franck Fernandes) ?? Les retrouvail­les ont eu lieu le  juillet à l’aéroport de Nice-Côte d’Azur. Michael Sovyn – le sixième en partant de la gauche – était bien entouré.
(Photo Franck Fernandes) Les retrouvail­les ont eu lieu le  juillet à l’aéroport de Nice-Côte d’Azur. Michael Sovyn – le sixième en partant de la gauche – était bien entouré.
 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from France