Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)
Nice : le camp « Luciano » évacué
Les pouvoirs publics ont procédé, hier matin, à l’expulsion d’une cinquantaine d’hommes, femmes et enfants roumains, serbes, bosniaques, installés depuis un an aux Iscles du Var
Sur la route, un peu en retrait de la 202, des hommes, des femmes et des enfants, tentent de s’extirper du bruit et de la poussière des engins de chantier qui s’affairent pour faire « place nette » sur le campement « Luciano ». Sur le goudron à peine chauffé des premiers rayons de soleil, des mères de famille poussent d’une main des Caddie qui débordent. Dans l’autre, elles tiennent des enfants apeurés. D’autres en pleurs, les yeux rivés sur la police, nationale et municipale, qui a procédé, dans le calme, à l’évacuation de ce campement illégal installé aux Iscles du Var, à l’ouest de Nice. Les services sociaux et préfectoraux sont là, aussi, en appui, pour proposer, épaulés par des associations, des solutions à la petite cinquantaine de personnes qui était encore présente, hier matin. L’occupation de ce terrain, propriété de la Ville, a débuté le 2 août 2019. Dans la cinquantaine de caravanes et de baraquements vivaient des ressortissants européens et extra-européens, notamment roumains, serbes et bosniaques.
Diagnostic social
La semaine dernière, alors qu’Anthony Borré, premier adjoint au maire en charge de la sécurité, et le préfet des Alpes-Maritimes s’étaient rendus sur place, ils étaient encore plus de 120 dans cette installation de fortune qui a accueilli jusqu’à 200 personnes (dont une centaine d’enfants) pendant le confinement. Mais, prévenus en amont de l’évacuation, de nombreux occupants de ce campement avaient choisi de partir avant l’arrivée des forces de l’ordre. « Cela fait des mois que nous réalisons un diagnostic social des occupants de ce campement, nous avons étudié toutes les situations et, en fonction, nous avons proposé les solutions adéquates : aide au retour volontaire, ou hébergements dans des hôtels, entame la sous-préfète en charge de la politique de la ville. Toutes les personnes vulnérables, malades, les femmes enceintes ou les familles avec des enfants en bas âges ont été mises à l’abri. » Que ce soit par les services de l’État ou de l’Office français de l’immigration et de l’intégration. Patricia Valma assure : « Nous avons trouvé une solution pour trente-cinq personnes. » Anthony Borré détaille, de son côté : « Nous avions de nombreuses réclamations, à cause de nuisances, des branchements électriques dangereux. Et la situation sanitaire était terrible. En plus, les différentes communautés ne s’entendaient pas forcément bien entre elles. » « Il y en avait qui se comportaient bien et d’autres moins », convient le président de Pralès, l’association de défense des Roms issus de l’Europe de l’est. Mais Viorel Kostache s’insurge : « Les solutions qui ont été trouvées ne sont pas pérennes et sont seulement pour les Roumains. Il n’y a pas de solution de logement pour les Bosniaques ou les Serbes car ils ne sont pas de l’espace européen. » Viorel Kostache en appelle à l’État : « comment on peut travailler utilement à l’intégration de ces populations si on ne connaît pas leurs coutumes, leurs traditions et qu’on ne parle pas la langue ? Il faut que les pouvoirs publics travaillent en collaboration avec les associations, car nous pouvons les aider à trouver des solutions pour l’intégration, et l’éducation des enfants. » Il conclut : « Les enfants roms ne pourront se sortir de la misère que grâce à l’éducation. On ne peut pas les chasser tout le temps de partout il faut s’occuper de leur avenir. » Travailler main dans la main avec les associations ? « C’est exactement ce que nous allons faire, j’y suis très favorable », répond la sous-préfète Patricia Valma. La mairie réclamait depuis un an l’expulsion de ce campement installé sur le futur site de la Cité des sports dont les travaux vont débuter à la fin de l’année. Ce terrain a déjà été occupé illégalement et la Ville avait agi en renforçant le dispositif anti-intrusion. Cette fois, afin de procéder au plus vite à l’expulsion, la Ville avait saisi le tribunal de grande instance à la mi-septembre. Le juge des référés avait notifié en décembre l’obligation de quitter les lieux mais avait donné un délai jusqu’au 1er avril. Le préfet des Alpes-Maritimes avait accordé le concours de la force publique pour l’évacuation. Puis, le Covid a tout décalé… L’adjoint de Christian Estrosi regarde le terrain : « Cela va prendre une semaine de travail, jour et nuit, à nos agents pour tout nettoyer. » Il révèle que la Ville envisage d’user de tous les moyens juridiques nécessaires afin «que ceux qui ont dégradé ce bien public paient pour sa remise en état ». Qu’il évalue à « environ 100 000 euros. » C’est pas gagné. Lors d’une précédente affaire, avec des gens du voyage, cette fois, la Ville avait porté l’affaire devant la justice et avait été déboutée en seconde instance.