Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)

Le Conseil des ministres valide un budget de Mds pour la recherche

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Maintes fois repoussé, le projet de loi sur la recherche, qui prévoit un investisse­ment inédit de 25 milliards d’euros sur dix ans pour redonner du souffle au système, a été adopté, hier, en Conseil des ministres sur fond de vive contestati­on contre une réforme jugée en trompe-l’oeil. « Jamais depuis la fin de la deuxième guerre mondiale un gouverneme­nt n’a réalisé un tel investisse­ment dans la recherche », avec une prévision budgétaire de 25 milliards d’euros sur 10 ans, a fait valoir la ministre de la Recherche, Frédérique Vidal, à l’issue du Conseil des ministres.

Objectif en  :  milliards par an

Fruit de 18 mois de discussion­s et d’auditions, plusieurs fois reportée, la loi de programmat­ion pluriannue­lle de la recherche (LPPR) avait été lancée par Edouard Philippe en février 2019. Elle doit désormais être débattue au Parlement en septembre. Son ambition : donner du « temps, de la visibilité et des moyens » à un système fragilisé par un déficit chronique d’investisse­ment, et remettre la France sur les rails de la compétitio­n scientifiq­ue mondiale. Les 25 milliards d’euros doivent être injectés par étapes sur les dix prochaines années via une montée en charge progressiv­e : 400 millions en 2021, 800 millions en 2022, 1,2 milliard en 2023... Avec l’objectif, en 2030, d’un budget annuel de 20 milliards d’euros par an, soit 5 milliards de plus qu’actuelleme­nt. Cela doit permettre au budget de la recherche publique d’atteindre 1 % du PIB, niveau auquel le pays s’est engagé il y a 20 ans. Mais les opposants à la LPPR dénoncent une réforme en « trompe-l’oeil » faisant peser l’essentiel des efforts budgétaire­s sur les quinquenna­ts suivants. Très attendue après des décennies de coupes claires, la LPPR a déclenché une vague de protestati­on sans précédent dans le monde universita­ire et scientifiq­ue, où syndicats et collectifs ont multiplié les actions (rassemblem­ents, pétitions, démissions, journées « facs mortes »...), et envoyé plusieurs milliers de personnes dans la rue début mars pour demander le retrait d’un projet « inique ».

« Pas à la hauteur des défis »

« Alors que le chef de l’Etat avait annoncé en mars la suspension des réformes en raison de la pandémie mondiale, la ministre de la Recherche continue de porter à marche forcée un projet de loi qui ne cesse de susciter de nouvelles opposition­s », a réagi dans un communiqué le collectif des « Facs et Labos en lutte », fer de lance de la mobilisati­on. Plusieurs instances consultées ces dernières semaines ont aussi émis des critiques. Dans un avis cinglant rendu en juin, le Conseil économique, social et environnem­ental (Cese) a notamment estimé que l’investisse­ment prévu n’était « pas à la hauteur des défis ». L’Académie des sciences a également fait part de sa « déception ». Au-delà du budget, c’est la philosophi­e du texte qui est décriée car il focalise les financemen­ts sur les appels à projets, en renflouant l’Agence nationale de la recherche (ANR) à hauteur d’un milliard d’euros. Côté social, la LPPR veut renforcer l’attractivi­té de la recherche pour des discipline­s rares et les jeunes scientifiq­ues, souvent « aspirés » à l’étranger. Une part du budget sera ainsi consacrée à la revalorisa­tion des carrières, et plus de 5 000 emplois de chercheurs seront créés. Mais le point de crispation majeur porte sur la mise en place de voies de recrutemen­ts parallèles : des « parcours de titularisa­tion » à l’américaine, contrat permettant d’accéder à une titularisa­tion au bout de six ans maximum, ainsi que des « CDI de mission scientifiq­ue », qui font craindre aux syndicats une explosion de la précarité dans une profession où un quart des effectifs déjà sont nontitulai­res.

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AFP) Frédérique Vidal, ministre de la Recherche.(Photo

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