Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)

« Le Pr Raoult nous a fait beaucoup de tort »

Coup de gueule des médecins libéraux sur le Covid. « On nous a mis sur la touche », dénoncent ces profession­nels de santé. Entretien avec leur représenta­nt, le docteur Laurent Saccomano

- PROPOS RECUEILLIS PAR LAURE BRUYAS lbruays@nicematin.fr

aurent Saccomano est médecin de ville. Installé à MouansSart­oux depuis des années. Un cabinet au contact. En prise avec la réalité. Avec les patients. Président de l’union régionale des profession­nels de santé médecins libéraux Paca, il représente   médecins libéraux. Et dénonce « une gestion hospitalo centrée » de la crise du Covid-.

Vous publiez un livre blanc sur la gestion de crise Covid...

C’est un coup de gueule sur le Covid et ce qui en découle. On dénonce la non prise en compte des médecins de santé libéraux dans cette crise qui a été hospitalo-centrée. On aurait pu faire. Mais on nous a dit : fermez vos cabinets. Et on a dit aux patients : si c’est grave, appelez le . On a été mis sur la touche. On a proposé notre aide, on n’en a pas voulu : on nous a dit « vous êtes inutiles ». On est considéré comme négligeabl­es. Pour preuve, le Ségur : aucune mesure réelle, aucune annonce ne concerne les médecins libéraux. Nous n’avons pas été conviés quand  organisati­ons l’ont été.

Résultat ?

Aujourd’hui, on a toute la lourdeur à gérer, et notamment des patients qui viennent nous voir avec des pathologie­s évoluées, notamment des pathologie­s cancéreuse­s qui n’ont pas été prises en charge. Il y aura une surmortali­té liée à la mauvaise prise en charge du Covid. C’est inacceptab­le.

Tout a été compliqué…

L’État n’a pas été fichu de nous fournir des masques. Il a préempté toutes les commandes. Nous, libéraux, on s’est retrouvés démunis. Il a fallu que le conseil régional se débrouille pour nous approvisio­nner…

Doit-on craindre une deuxième vague ?

On n’en sait rien. On voit ça et là des clusters. On sait que le virus est toujours là et notamment en Paca.

Le concert de The Avener à Nice, potentiel cluster (  personnes à touche touche qui ont fait

polémique) ?

Potentiell­ement, c’est un bouillon de culture mais on ne peut pas en tirer de conclusion­s. Une personne contaminée dans une pièce risque de contaminer davantage que des personnes qui sont à cinq mètres de distance en plein air.

La région Paca est repassée en zone sensible. La faute aux touristes ?

On peut supposer que le brassage et la présence de deux aéroports dans la région soient des sources de contaminat­ions. Un village de mille habitants qui reste stable a moins de risques qu’une ville qui voit sa population quintupler en été. Après le comporteme­nt reste essentiel.

Le masque ?

Plus que jamais, il est essentiel de porter le masque même si c’est désagréabl­e. Et, plus que jamais, il faut respecter les gestes barrières.

La chloroquin­e nous a été vendue comme un médicament miracle...

Nous n’avons aucune preuve de son efficacité. Le professeur Raoult nous a causé beaucoup de tort. Les patients venaient nous voir en nous disant : « J’ai entendu sur les ondes que la chloroquin­e marche et vous ne me la donnez pas ; vous êtes un mauvais médecin… » On a, aujourd’hui, aucune étude qui démontre que c’est efficace.

Comment construire l’après ?

Nous plaidons pour qu’avec tous les acteurs de la santé soit mis en place un véritable comité de pilotage. Avec l’Agence régionale de santé, l’Assurance maladie, des élus, des représenta­nts de toutes les profession­s de santé, libéraux et hospitalie­rs. Pour être plus réactifs et efficaces. On ne ne peut y arriver qu’ensemble.

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(Photo François Vignola)

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