Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)
La nuit, il chasse la comète Neowise et les ciels étoilés
Passionné d’astronomie, le photographe Anthony Turpaud arpente l’arrière-pays azuréen, pour prendre des clichés nocturnes. Focus sur une discipline de plus en plus prisée
Si vous croisez Anthony Turpaud dans les montagnes du Mercantour, dans les Alpes-Maritimes, avec 20 kg de matos sur le dos alors que la nuit tombe, c’est qu’il est parti chasser. Pas au fusil, non. Pas des animaux, non plus. Ce que traque ce photographe, également responsable adjoint du secteur Tinée pour le parc national, ce sont les paysages nocturnes, les ciels étoilés et la Lune. Alors, en ce moment, c’est un peu «le rush », selon l’aveu du pisteur, avec le passage d’une espèce rare : la comète Neowise. « Des comètes, il y en a tous les ans, mais elles sont très éloignées, décrypte-t-il. Là, c’est un peu la surprise du mois de juin, c’est la plus belle depuis une vingtaine d’années. » Rares sont celles que l’on peut voir à l’oeil nu. Anthony Turpaud évoque la comète Swan, passée en mai, qui s’était désintégrée à l’approche du Soleil. Neowise, elle, lui a résisté : « Elle est en phase d’éloignement. Elle fait une ellipse autour du Soleil. »
Deux heures après le coucher de soleil
En attendant le prochain passage de Neowise, dans 6 800 ans, elle est encore visible jusqu’à la fin du mois, même si son intensité diminue. Le photographe multiplie les sorties. « Elle est visible en direction Nord, Nord-Ouest, vers la Grande ourse. Vous voyez la grande casserole ? Elle est en dessous. » Alors qu’il était possible de l’observer le matin, au début du mois, c’est désormais le soir ou la nuit, qu’il faut privilégier. Anthony Turpaud fait comme d’habitude, il part avec son matériel. « J’attends que la nuit tombe ,raconte celui qui fait partie de l’association Astronomie Tinée Mercantour . Les meilleures conditions pour prendre des photos de ciels nocturnes arrivent deux heures après le coucher du Soleil, quand il fait nuit noire, avec le minimum de Lune. Je n’utilise pas de lampe, ou alors une lumière rouge. Le seul véritable éclairage, ce sont les étoiles. L’oeil humain n’est pas habitué à l’obscurité, il lui faut vingt à trente minutes pour bien distinguer la voie lactée, par exemple.
Si on allume une lampe, tout le processus est à recommencer. »
Une machine à remonter le temps
Quels sont les meilleurs spots d’observation, dans l’arrière-pays ? « L’idéal, c’est de monter en altitude, où l’atmosphère est moins dense. Il n’y a pas besoin d’aller loin : vous pouvez aller dans les pré-Alpes de Grasse, genre les plateaux de Caussols ou Calern. Mais si on veut voir loin, genre pour apercevoir le bulbe de la voie lactée, le centre de notre galaxie, il faut faire une cinquantaine de kilomètres au nord. Il faut s’éloigner de toute pollution lumineuse des villages et des villes. » Le Mercantour et le parc régional des Alpes d’Azur ont été labellisés Réserve de ciel étoilé, l’an dernier. Ce qui en fait un terrain propice à l’astronomie et des sorties sont régulièrement organisées. Une discipline qui fait office de machine à remonter le temps. «On peut observer des célestes comme des nébuleuses, des galaxies, des amas d’étoiles. Et au-delà de l’émerveillement, on remonte le temps. Ce qu’on observe, ce sont des lumières émises il y a plusieurs milliers ou millions d’années : c’est le temps que la lumière a mis à arriver. C’est tout une histoire, celle de notre univers ».
Le parc national du Mercantour et les associations d’astronomie, organisent régulièrement des soirées thématiques. Lueurs nocturnes, exposition d’Anthony Turpaud à voir au parc Phoenix de Nice, jusqu’au 30 août.