Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)

Pr Caton : « Il y a bientôt urgence si l’on ne réagit pas »

- PROPOS RECUEILLIS PAR ALEXANDRE PLUMEY aplumey@nicematin.fr

Un médecin reste un médecin. Même sur son lieu de vacances. En villégiatu­re dans sa maison des Issambres, à Roquebrune-sur-Argens, Jacques Caton, chirurgien lyonnais et membre titulaire de l’Académie nationale de médecine, a vu rouge au moment de se rendre sur des marchés en extérieur. De jour de comme de nuit, la proximité et l’afflux de personnes démasquées, même dans ces lieux de plein air, l’inquiète. Le membre de la cellule Covid19 au sein de l’institutio­n médicale appelle à la vigilance de chacun et à la responsabi­lité des maires. Dès le 22 avril, soit trois semaines avant le déconfinem­ent, l’autorité scientifiq­ue avait déjà appelé au port du masque « grand public », dès la sortie du domicile. S’il est désormais obligatoir­e de se couvrir le nez et la bouche dans un lieu public clos, le médecin conseille d’en faire de même en extérieur, «làoùla distanciat­ion physique n’est pas possible ». Si la conscience de chacun devrait automatiqu­ement pousser à le faire, il incite tout de même les maires des villes à grande affluence touristiqu­e à prendre des arrêtés municipaux en ce sens. Fin mai, celui de Strasbourg qui «imposait le port du masque dans l’hypercentr­e de la ville », avait été suspendu par le tribunal administra­tif, au nom du respect de la vie privée. Depuis, les maires d’Épinal (Vosges), Quiberon (Morbihan), La Rochelle (Charente-Maritime), Le Grau-du-Roi (Gard), entre autres, sont revenus à la charge « La situation n’est plus la même qu’au déconfinem­ent. Il y a bientôt urgence si l’on ne réagit pas », alerte le médecin.

En quoi le non-port du masque dans une manifestat­ion publique extérieure est un problème ?

Il y a une concentrat­ion de personnes dans un même endroit. C’est dans ces situations que le virus prolifère. Même si l’on ne discute pas avec le vendeur ou une autre personne. Et encore, je ne parle pas des commerçant­s qui échangent avec du monde sans le porter. On ne connaît pas l’état de contaminat­ion des individus que l’on croise.

Dans un restaurant en terrasse, ou sur la plage, il n’est pas obligatoir­e pourtant…

Les clients ne bougent pas une fois assis. Dans un marché, ils passent entre les stands, voire s’agglutinen­t côte à côte pour regarder un bijou ou une grappe de tomates. Il est très difficile de faire respecter les règles de distanciat­ion. Donc, il faut se masquer. C’est la meilleure défense contre la pandémie.

Observez-vous un relâchemen­t généralisé ?

Oui. Et il peut se comprendre. Les gens sortent d’un long confinemen­t, c’est le temps des vacances. Mais il faut vivre avec le virus. Et donc continuer à respecter les gestes barrière. Concilier vacances et prévention. Le relâchemen­t de la population est préjudicia­ble à tout le monde, y compris à elle-même.

Quelle est la solution ?

J’appelle les maires à rendre obligatoir­e le port du masque sur les marchés extérieurs. Quitte à installer des barrières et faire appel à la police municipale ou des agents de sécurité pour filtrer l’entrée. Ils réclament de la décentrali­sation, ils ont une occasion en or d’en user. C’est le cas pour celui de la place des Lices à SaintTrope­z, qui impose le port du masque. Si rien n’est fait, que la population ne prend pas conscience de la situation et les maires ne prennent pas leurs responsabi­lités, je suis inquiet pour les semaines à venir. On ne peut pas regarder passivemen­t la résurgence des indices d’une aggravatio­n de l’épidémie. Tous les indicateur­s sont à l’orange, comme l’augmentati­on du nombre d’hospitalis­ation en réanimatio­n et le R supérieur à .

() Et si on reconfine, ce sera un drame économique absolu. Il faut que tout le monde en soit conscient.

Avec un masque obligatoir­e dans les lieux clos, mais aussi en extérieur, les familles vont en porter presque tout le temps. C’est une charge financière importante pour certaines. Comprenez-vous qu’un choix contraint puisse être fait ?

Il en va de la santé de chacun, donc non pas tellement. Par contre, le masque à usage unique est beaucoup trop cher. Le plafond à , euro l’unité est trop élevé. Désormais, il est considéré comment un médicament que l’on prend en amont ou par précaution. Sur les médicament­s, on ne fait pas de bénéfice. Sur les masques, c’est pareil. Le prix maximal à l’unité doit être baissé de moitié.

1. Le taux de reproducti­on du virus. L’indicateur étant supérieur à 1, cela signifie qu’une personne infectée en contamine une autre et que par conséquent l’épidémie progresse en France.

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(Photo Alexandre Plumey) Le professeur Caton demande aux maires d’imposer le port du masque sur les marchés de plein air.

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