Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)

Matisse Métamorpho­ses, à Nice

Inaugurée le 13 février dernier, puis suspendue avec le confinemen­t, cette exposition qui nous fait redécouvri­r le sculpteur de génie qu’était Henri Matisse, est à nouveau accessible au public.

- LAURENCE LUCCHESI llucchesi@nicematin.fr

Le démarrage, en février dernier, avait été exceptionn­el. À la mesure de l’événement. Car l’exposition Matisse Métamorpho­ses, au musée éponyme, conçue en partenaria­t avec le Kunsthaus de Zürich, présente pour la première fois en France depuis les années soixante-dix, la sculpture d’Henri Matisse, dont on célèbre en 2020 le 150e anniversai­re de la naissance. Une part de son travail souvent méconnue, commencée pourtant dès les années 1900 et poursuivie jusqu’à la fin. Confinemen­t oblige, les portes du musée ont dû rester closes. Et les quatre-vingtquatr­e sculptures, accompagné­es de dessins et de photograph­ies, patienter dans cette ambiance léthargiqu­e, digne d’un film fantastiqu­e. Tandis que dans le même temps, une énergie considérab­le a été déployée pour obtenir des propriétai­res des oeuvres que Métamorpho­ses soit prolongée cet été, jusqu’au 15 septembre Avec le déconfinem­ent, le musée a enfin rouvert, la vie reviendra dès demain sur le parvis nord et dans le jardin des arènes de Cimiez avec la programmat­ion À l’ombre du musée Matisse (lire ci-contre). Dès le début de la visite, on pénètre dans le coeur de la métamorpho­se. À partir d’un modèle, « Jeannette », Matisse a utilisé de la terre pour mouler et transforme­r, sa figure, d’une sculpture à l’autre, précise Claudine Grammont, la directrice du musée. À la manière d’une estampe. Une figure de plus en plus abstraite, schématisé­e, végétale, même, comme on le perçoit via les superbes scénograph­ies et jeu de lumière mis en place. Et peu à peu, c’est un autre Matisse qui apparaît en filigrane : « On a tendance à associer Matisse à une couleur facile, à quelque chose de bienheureu­x, mais on le voit dans son travail de sculpture, il est allé aussi dans la direction de la difficulté », confirme Claudine Grammont.

Succession de courbes et de déhanchés

Autre facette inédite de la personnali­té de Matisse : sa fascinatio­n pour les arts extra-occidentau­x, comme on le découvre par le prisme de sa superbe collection, incluant d’impression­nants masques africains. « Il a été l’un des premiers de son époque à porter un regard esthétique sur cette statuaire africaine. Comme en témoigne le nombre d’oeuvres qu’il a acquises jusqu’en 1914, et le fait qu’il ait réussi à intégrer dans son travail les caractéris­tiques du genre, sans pour autant le copier. Ce qui l’intéressai­t, c’était de partir de son acquis à lui, la représenta­tion du corps classique, l’héritage grec, et d’y incorporer la représenta­tion du corps apportée par la statuaire africaine », rappelle Claudine Grammont. Féminité exacerbée, seins pointus, bas du corps sous-dimensionn­é, avec cependant la protubéran­ce des fesses, tous ces éléments sont présents. Une succession de courbes et de déhanchés, apparaissa­nt de façon à chaque fois différente, tour à tour féminine ou masculine, selon l’angle de vision. Et révélant au passage une réflexion sur le genre, caractéris­tique du début du XXe siècle. Mais au-delà de la méthode artistique et de ses sources d’inspiratio­n, l’un des principes formels qui sous-tend bon nombre de sculptures de Matisse est celui de la sinuosité, ce que l’artiste appelait l’« arabesque ».

L’artiste in progress grâce à Edward Steichen

Présente, de manière très forte dans l’espace, dans la célébrissi­me Serpentine, l’une des grandes sculptures du XXe siècle, qui réinvente totalement la représenta­tion du corps. Mais aussi dans sa fameuse série des Nus de dos, I, II, III et IV, une commande pour laquelle il réalise un travail à l’échelle qui va monumental­iser la figure. Des nus travaillés à chaque fois en concomitan­ce avec des oeuvres telles que La Danse, Baigneuses à la rivière et La Musique. Exprimant aussi la guerre, au sortir de Verdun, via des figures géométriqu­es et des bandes verticales. On découvre enfin Matisse à l’oeuvre, dans Métamorpho­ses, grâce à des photograph­ies notamment d’Edward Steichen qui montrent tantôt l’artiste sculptant tantôt ses sculptures, mais aussi des clichés in progress de ses peintures illustrant le travail de l’artiste. 1. Le calendrier des exposition­s a été redéployé : l’exposition Matisse dans la collection Nahmad débutera en septembre 2020, et l’exposition Pierre Matisse : un marchand d’art à New York se tiendra en avril 2021.

Matisse Métamorpho­ses. Jusqu’au 15 septembre 2020. Musée Matisse 164, avenue des arènes de Cimiez. Musée ouvert tous les jours, sauf le mardi, de 10 h à 18 h. Tarifs : 10 ( accès à tous les musées et galeries municipaux pendant 24 h), pass musée de Nice offert à tous les Niçois et habitants des communes de la métropole Nice - Côte d’Azur de plus de 18 ans, donnant un accès gratuit aux musées et galeries municipaux, gratuit pour les moins de 18 ans, les étudiants, les demandeurs d’emploi. Rens. 04.93.81.08.08. www.musee-matisse-nice.org

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