La tour des moines se fortifie

St-Honorat (Alpes-Maritimes) Affectée par le temps et les éléments, la tour-monastère de l’abbaye de Lérins va s’offrir un lifting monumental

Les amoureux de Saint-Honorat ont forcément ressenti le manque : s’ils peuvent toujours profiter des balades dans le cadre somptueux de l’île et visiter l’abbaye de Lérins, la tour-monastère demeure, elle, inaccessible depuis le déconfinement. Et pour cause, majeure : l’édifice, bâti entre les XIe et XVe siècles et riche d’un foisonnant passé, est actuellement en travaux, en témoignent l’imposante grue et les échafaudages qui l’encerclent. « Il n’y aura aucune reconstruction, prévient frère Vincent, en charge du patrimoine au sein de la communauté monastique. On va conserver le monument, mais il a besoin d’une grosse restauration, car il y a une dégradation naturelle, due au temps, au vent et à la pluie [aucune intervention majeure depuis les années trente] . Ça va aussi permettre de sécuriser les visites. » Toitures, sols, murs, éclairage, huisseries, garde-corps... Un immense lifting en trois tranches, envisagé depuis 2013 et prévu pour durer « entre 24 et 28 mois », pour un budget total de 5,047 M€ D’ailleurs, si les fonds ont été réunis pour la tranche inaugurale – restauration et mise hors d’eau de la partie ouest, le noyau originel, qui a connu un effondrement majeur au XIXe s. – un appel aux dons [lire ci-dessous] est lancé pour les deux dernières. Ancrée dans une volonté de « maintenir les visites gratuites pour le public » à l’issue du chantier, la communauté en profite, également, pour réfléchir à un parcours inédit et offrir plusieurs nouveautés.

Chapelle restaurée et visites en réalité augmentée

D’abord, pour la première fois depuis 1788 et le départ des moines de la tour – ils y vivaient depuis 1390 dans « une configuration unique » – la chapelle Sainte-Croix, qui abritait jadis un retable de Brea, va être réhabilitée. « Les gens pourront s’y arrêter pour prier et, de notre côté, pourquoi ne pas y donner des offices ? On va faire installer des vitraux, un autel aussi. » Des concerts et conférences sont aussi envisagés, une fois la toiture du noyau ouest reconstituée ; tout comme des visites utilisant la technologie de la réalité augmentée. « Nous disposons d’énormément de documents retraçant les différentes époques de la tour ; on pourrait y voir comment vivaient les moines avant 1788. » Retrouver le réfectoire, les dortoirs (même ceux des gardes royaux, imposés après l’invasion espagnole de 1635 à 1637), l’immense bibliothèque, le four à pain au sous-sol et tant d’autres trésors... « On est soucieux de protéger ce patrimoine, dans le même esprit que la chapelle SaintSauveur, restaurée fin 2018 et elle aussi classée monument historique ; mais aussi de le transmettre aux générations futures. Ceci dit, dans la tour-monastère, nous avons connu pas mal de vandalisme, on espère que les gens feront plus attention une fois celle-ci rénovée. » Le genre de choses qui devrait, pourtant, aller sans dire...

1. Le budget de la tranche ferme initiale – travaux prévus jusqu’en avril 2021 – s’élève à 1,734 M€. Celle-ci est subventionnée par l’État (50 %), le Département (20 %), la ville de Cannes (5,6 %), la fondation Total (13,27 %), la Fondation du Patrimoine et les dons des particuliers (6,44 %) et la CCIC abbaye de Lérins (5,05 %).

(Photos Patrice Lapoirie) La tour offre une vue imprenable sur le monastère actuel, l’île et la baie de Cannes.