Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)
Niémans reprend du service
L’un des maîtres du thriller français souffle un vent glacial sur vos lectures d’été. Dans Le Jour des cendres, il rappelle Niémans, héros des Rivières pourpres, pour une enquête bien noire au coeur d’une secte.
Alors que le tournage de la saison 3 des
Rivières pourpres, avec Olivier Marchal et Erika Sainte, vient de démarrer pour France 2, l’auteur du célèbre livre dont s’inspire la série policière continue d’étoffer son héros : le capitaine Niémans. Jean-Christophe Grangé avait déjà ressuscité son flic favori l’an dernier, dans La Dernière Chasse, développant en roman une idée de scénario écrit pour la série. Il poursuit ses aventures cet été avec
Le Jour des cendres, qui évoquera cette fois, aux téléspectateurs, la trame des épisodes 3 et 4 de la première saison. « J’aimais bien ces deux histoires et j’étais sûr de pouvoir en faire des bons bouquins. J’avais des idées de développement… C’est un peu frustrant les scénarios, quand vous êtes écrivain ! », explique le romancier parisien. Dans cette nouvelle enquête, Jean-Christophe Grangé emmène son capitaine revêche et son adjointe rebelle en Alsace, au sein d’une communauté religieuse retirée dans un vignoble. Look Amish, dieu pour tous et tous pour un, c’est la fin de l’automne et ils s’affairent aux vendanges tardives.
Religion, rites et mystère
Sauf qu’un homme est mort, que d’autres vont suivre et que le vernis pacifique qui lustre les jours paisibles du phalanstère va sévèrement craquer. Religion, rites et symboles mystérieux, on retrouve la patte Grangé.
« Je suis d’un naturel mystique, reconnaît l’auteur traduit dans une trentaine de langues.
Dans tous mes livres, je parle du mal. Mais d’un mal qui veut revêtir une certaine “pureté”. Je n’ai jamais écrit sur des braqueurs, des trafiquants, ça ne m’intéresse pas. Ce qui m’intéresse, ce sont ceux qui font le mal pour le mal, ou le mal avec une idée du bien tellement tordue qu’ils en arrivent au pire qui puisse exister, un peu comme les nazis. »
Comment certains essaient de légitimer leurs crimes, voilà ce qui passionne le romancier. « Se trouver une excuse pour tout ce qu’on fait, c’est la tendance générale de l’homme. Ça m’énerve, ça me choque. Et ça part de celui qui dénonce son voisin en se persuadant qu’il a raison, jusqu’à des choses extrêmes comme pour cette secte que j’imagine. J’aime opposer le “bien” chrétien à sa distorsion. Partant de là, j’en arrive vite à des personnages maléfiques, qui ont quelque chose à voir avec le diable. »
C’est sombre, cruel, carrément noir. Et on se demande où l’écrivain – qui vit comme «un
ermite à Paris », sans télé ni journaux, dit-il – va chercher tout ça. « Il y a de temps en temps un malentendu, on me dit parfois que c’est ce que j’aime ou qu’il y a de la complaisance, mais au contraire, vous écrivez sur ce qui vous bouleverse. J’ai découvert, enfant, la violence humaine et c’est un truc que je n’ai jamais pu digérer, ça a nourri mes cauchemars. Tout naturellement, quand je me suis mis à écrire, j’ai écrit là-dessus. C’est un des meilleurs sujets que l’on puisse trouver, c’est le drame de la nature humaine. »
Un côté obscur de l’humain que l’auteur et son personnage mettent aussi à distance grâce à un humour assez nouveau et franchement bienvenu. « C’est une évolution littéraire et humaine. Dans la vie, je suis plutôt un rigolo mais, dans mes livres, je me suis longtemps interdit, par pudeur, d’écrire des blagues. Avec l’expérience et le succès, j’ai pris un peu de confiance et je me suis autorisé à laisser celles qui me sont venues spontanément », confirme le romancier de cinquante-neuf ans. « J’aime bien, en tant que lecteur aussi, quand le noir est désamorcé par le décalage. L’humour, c’est un fil que je vais dérouler davantage ! »
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Une idée du bien tellement tordue qu’on en arrive au pire”