Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)

Daniel Blancou, l’auteur de BD poursuivi par son dessin

Son dernier ouvrage, Un Auteur de BD en trop, concourt au Prix des lecteurs du Var 2020, dans la catégorie adultes. Une satire couleur pop d’un monde de l’édition dépeint comme le Far-West

- T. G.

Dans Un Auteur de BD en trop, vous vous amusez avec un monde de la bande dessinée cruel, bouché et solitaire. Après toutes ces années comme dessinateu­r, c’est votre coup de gueule ?

Il y a des choses très dures dans le monde de l’édition, mais finalement comme partout. Quelqu’un qui lirait la BD sans connaître le milieu verra des choses qu’il connaît : les conditions salariales sont de plus en plus dures ; l’ubérisatio­n, on est en plein dedans... Je suis dans un métier où, mine de rien, il faut plaire pour vendre et ce n’est pas facile. Mais on y est tous confrontés dans notre vie. Pour le parodier, j’ai décidé de parler de ce que je connais le mieux : le monde de la bande dessinée. Ce n’est pas non plus une charge contre ce milieu. Il ne faut jamais commencer une BD en étant aigri, c’est venu au fil de la plume, petit à petit. Mon éditeur a joué le jeu aussi et m’a même encouragé à forcer le trait dans le côté caustique des scènes. Toutes les personnes dans l’histoire existent dans la réalité. Les personnage­s qui sont présents dans l’atelier de mon personnage sont des amis à moi, que j’ai caricaturé­s, même égratignés, les pauvres.

Daniel, votre personnage, est en manque d’inspiratio­n et, face à la pression, décide de voler le travail d’un autre... C’est déjà arrivé selon vous ?

Le manque d’inspiratio­n, ça peut arriver. Mais copier un album entier, à ce point, ça m’étonnerait. Moi face à la page blanche, j’écris tout ce qui me passe par la tête. Ensuite, j’essaie d’écrire pourquoi ça ne me plaît pas et au bout d’un certain temps, les idées émergent.

Ce qui me prend le plus de temps et sur quoi je me concentre le plus, c’est le scénario. Travailler les dialogues, les répliques, les reprendre... Les dessins viennent assez spontanéme­nt après. J’essaie d’imaginer une rencontre avec un lecteur inconnu, quelque part, qui me lirait chez un libraire.

Quand vous décrivez la solitude des auteurs et les queues à rallonge pour d’autres lors des salons, c’est tiré de votre expérience ?

Oui tout est vrai. Caricaturé, tordu, mais vrai. De toute façon, l’humour ne peut fonctionne­r que s’il y a un fond de vérité. Ça m’est déjà arrivé, moi aussi. Si la comédie ne parle pas de la bassesse humaine, à quoi sert-elle ?

Les couleurs de vos dessins sont très vives et les dialogues pleins d’esprit. Ça tranche avec le sérieux du sujet...

J’ai fait de mon personnage un double de moi, venant de la BD pour parler de la BD. Le jeu des couleurs devait montrer ça justement. J’ai donc repris des techniques un peu anciennes, des trames très visibles comme dans les bandes dessinées des années 1960. J’ai repris des onomatopée­s qui évoquaient plusieurs courants de la BD déjà passés. J’ai voulu me réappropri­er des façons de faire de la couleur des anciennes BD, en l’adaptant à des codes plus contempora­ins.

‘‘ L’humour ne peut pas fonctionne­r s’il n’y a pas un fond de vérité”

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(Photos DR)
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