Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)

Centre et Haut Var : les « locaux » à la découverte de leur région

Les profession­nels, qui ont longtemps craint une saison « gâchée », sont aujourd’hui rassurés. Certes, les étrangers sont discrets, mais une nouvelle clientèle, locale, a largement pris la place

- GUILLAUME JAMET gjamet@varmatin.com

Routes et villages peuvent sembler calmes, en ce milieu d’été. Il faut attendre les débuts de soirée pour constater qu’il y a en fait beaucoup de monde dans l’intérieur des terres, mais que, températur­es caniculair­es obligent, on préfère se « cacher » en journée et profiter du frais pour sortir et s’installer en terrasse. Partout ou presque, c’est le même constat : « On a attaqué juillet doucement, puis, après la première semaine, on n’a plus eu le temps s’asseoir », témoigne un propriétai­re de bar. Dans son village du Haut Var, la terrasse, ombragée, accueille des dizaines de clients dès le matin, pour le petit-déjeuner, jusqu’à minuit, où les derniers verres de Spritz partent rejoindre le lave-vaisselle afin d’être prêts à réattaquer le lendemain. Les serveurs et serveuses, masque collé au visage, peinent à suivre le rythme. Le patron, qui assure parfois l’ouverture et la fermeture, avoue ne dormir que 4 ou 5 heures par nuit, maigre coupure à laquelle vient s’accoler « une petite sieste, quand c’est possible »…« Mais c’est le taf, hein… On ne va pas se plaindre, surtout cette année… »

« On fait une très, très bonne saison »

À l’instar des sites naturels pris d’assaut, particuliè­rement ceux où coulent rivières et ruisseaux (lire en page 4), le lac de Sainte-Croix connaît une saison « exceptionn­elle ». Un restaurate­ur de Bauduen le confirme : « Ça marche super bien, on a un monde de dingues… » Un ballet incessant de crêpes, grillades, salades, glaces et gaufres sort de la cuisine pour aller se faire engloutir sur la terrasse. « Franchemen­t, on a eu peur au début, mais là, on est en train de faire une très, très bonne saison. » Dans la voix, la fatigue dispute la place au soulagemen­t et à l’appréhensi­on de « subir » un mois d’août qui s’annonce tout autant chargé. Pour le meilleur.

« On a perdu les Hollandais »

Presque une mer intérieure, dans laquelle se jette le haut Verdon, qui sort de ses célèbres gorges, le lac de Sainte-Croix et ses eaux turquoise ont toujours attiré des touristes venus de toute l’Europe. Pourtant, cette année, si les profession­nels font « le plein », la clientèle n’est pas du tout la même que d’habitude. Comme partout en centre et Haut Var, les étrangers manquent largement à l’appel. « Normalemen­t, juillet, on dit que c’est “le mois des Hollandais”. Après vient août, durant lequel ce sont majoritair­ement des Français », explique un loueur de matériel nautique installé sur la base des Salles-sur-Verdon. « Là, on a presque perdu les Hollandais et les Anglais. Il y a encore quelques Allemands. Les Belges (dont un bon nombre possède une résidence secondaire et vit en France quelques mois par an, Ndlr), sont, eux, fidèles au poste. » L’activité de location de pédalos, kayaks et voiliers est telle que l’entreprise a dû revoir son système de réservatio­n : dorénavant, pour avoir le droit de barrer, pédaler ou pagayer, il est préférable de passer par un site web pour déposer une demande. « Sinon, sur place, on ne s’en sortait pas. » Du jamais vu.

Les Français sont restés

Que ce soit dans les bars, les restaurant­s, les campings ou les pédalos, on retrouve la même clientèle « nouvelle », venue compenser les absences européenne­s : « Ona énormément de Français. » Tous expliquent cela simplement : « Les gens ont préféré rester plutôt que d’aller au Maghreb ou même en Italie ou Espagne… »

Covid « aidant », les vols ont été plus difficiles à réserver. Le risque sanitaire a, bien évidemment, été dissuasif. Pourtant, il faut aussi envisager que, pour préserver les finances familiales, souvent mises à mal par une période d’inactivité durant le confinemen­t, beaucoup ont préféré des vacances « raisonnabl­es », parfois même organisées en petites sorties autour du domicile. Exit, donc, les vols low cost, place aux vacances en France.

Certains découvrent leur départemen­t

« On accueille pas mal de gens qui vivent tout à côté d’ici. Nice, Toulon, Marseille… Certains n’avaient jamais mis les pieds dans le centre ou le Haut Var ! J’ai même rencontré des Dracénois qui ne connaissai­ent pas les gorges du Verdon ! », s’amuse un restaurate­ur. Avantage supplément­aire pour nombre de profession­nels : cette clientèle, qui découvre son environnem­ent immédiat, en est le plus souvent étonnée et… charmée. « Ce sont très probableme­nt des gens qui vont revenir plusieurs fois dans la saison, voire après. Qui vont sûrement avoir envie de faire découvrir leur trouvaille à des amis… Pour nous, c’est la garantie de réussir une arrière-saison convenable », espère le restaurate­ur.

Du calme, loin des villes

Avantage de taille, pour les villages du centre et Haut Var : si on y fait respecter les distances et les gestes sanitaires comme partout ailleurs, l’ambiance est, de l’avis des visiteurs, beaucoup plus détendue que dans les villes de la côte. « Je viens de quitter Nice. Je suis dans un petit village, à la table d’un joli restau, sur une place, sous les arbres… Franchemen­t, je crois que je vais rester là », affirme une jeune femme à son téléphone. Autour d’elle, Cotignac et son cours Gambetta sont animés des jeux des enfants et des conversati­ons des convives, installés sur les nombreuses terrasses. « Je pense qu’il y a moins de monde que d’habitude », tempère un habitant du cru. Il faut pourtant être vif si l’on veut réussir à attirer l’attention de la serveuse, qui file de table en table pour assurer les nombreuses commandes.

‘‘ On accueille pas mal de gens qui vivent à Nice, Toulon, Marseille… Certains n’avaient jamais mis les pieds dans le centre ou le Haut Var !”

Effectivem­ent, le centre et Haut Var ne connaîtron­t malheureus­ement pas les moments festifs et les réunions qui rythment habituelle­ment leur été. Fêtes provençale­s, festivals et Médiévales sont, pour la plupart, annulés. Et leurs publics ne se montreront pas de la même manière. Mais l’arrière-pays conserve une particular­ité unique, qui, manifestem­ent, semble tout autant attirer les visiteurs : on y vient pour le plaisir d’y laisser passer la chaleur du jour, sous un arbre, près d’une rivière, ou sur une terrasse. Au calme. En vacances, quoi.

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(Photos Gilbert Rinaudo) Vacances sportives ou culturelle­s, contemplat­ives ou gastronomi­ques, une majorité de Français a choisi de partir à la découverte des sites et villages qui, pour certains, se trouvent dans les environs immédiats de leur domicile.
 ?? (Photo F. B.) ?? Le lac de Sainte-Croix et les gorges du Verdon, qui marquent la frontière entre Var et Alpes-deHaute-Provence, attirent, chaque année, des dizaines de milliers de visiteurs.
(Photo F. B.) Le lac de Sainte-Croix et les gorges du Verdon, qui marquent la frontière entre Var et Alpes-deHaute-Provence, attirent, chaque année, des dizaines de milliers de visiteurs.
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