Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)

Festival de Ramatuelle : comme un message d’espoir

La présidente Jacqueline Franjou dresse un bilan globalemen­t positif de la 36e édition qui s’est achevée hier. Elle a permis aux gens du spectacle de retrouver la scène. Non sans émotion...

- ÉRIC FAREL efarel@nicematin.fr

« Rouvrez les théâtres comme vous pouvez. Sinon ce sera une catastroph­e ! » Ce cri du coeur est signé Jacqueline Franjou, figure importante de la culture française, cocréatric­e et présidente du Festival de Ramatuelle. La manifestat­ion, née en 1985, est l’une des rares du genre en France à avoir résisté face à la crise du Covid-19, et elle vient de s’achever sur une belle note d’espoir et le constat d’une sacrée réussite. Pourtant - et Jacqueline Franjou en a pleine conscience - son pari de maintenir les dix soirées de cette 36e édition, relevait de la gageure. Mais il a été gagné... « On a organisé ce Festival malgré les circonstan­ces, parce qu’on en avait envie, pour redonner l’espoir et aussi pour la commune de Ramatuelle. Pour montrer enfin que l’on ne peut pas rester sans activité. S’il n’avait pas eu lieu cette année, il y aurait eu deux ans de “rien”. Et cela est également valable pour les restaurant­s et tout le reste. Voilà pourquoi on l’a fait », relate-t-elle.

« Les mécènes ont joué le jeu »

Et quel bilan en tire-t-elle ? « Tout s’est bien déroulé parce qu’il y avait vraiment la joie et l’envie de jouer des artistes qui ne s’étaient plus retrouvés sur scène depuis six mois. Pour eux, ça a été une réelle émotion. » Comme pour tous les autres d’ailleurs, ceux qui les accompagne­nt au quotidien afin d’assurer la logistique et l’intendance. « Les technicien­s ont touché leurs premiers salaires depuis des mois et c’est très important pour redonner vie à une profession extrêmemen­t menacée dans la région Paca. » Mais pour rester dans les clous de normes sanitaires draconienn­es et, aussi, rassurer le public – 700 personnes par soirée autorisées par la préfecture –, il a fallu s’atteler à la mise en oeuvre d’une organisati­on très pointue... et veiller à son respect le plus strict. Masque pour tous, prise de températur­e, distanciat­ion, désinfecti­on, équipes testées avant, pendant et après le festival, pas de signatures dans les loges, interdicti­on, comme le voulait précédemme­nt l’usage, de jeter les coussins à la fin des représenta­tions... « Nous avons fait en sorte, dit Jacqueline Franjou, qu’il y ait un minimum de risques et je pense que le public est venu sans crainte. En tout cas, et c’est aussi grâce aux artistes qui ont bien relayé le message, tout le monde s’est montré très discipliné. »Un festival exemplaire donc au plan sanitaire. La réalité économique, quant à elle, est tout autre. « On perd de l’argent, avoue la présidente .À la louche, on s’oriente vers un écart de l’ordre de 100 000 euros. Peut-être un peu moins, peut-être un peu plus. » C’est que cette année, Ramatuelle a ouvert ses portes à 5 000 personnes au lieu de 10 000 habituelle­ment. Par ailleurs, certains frais ont augmenté. Un exemple ? Le coût des assurances... « D’ordinaire, on était dans des proportion­s de 7 à 8 000 euros. Avec la crise sanitaire, l’ardoise est montée à 15 000 euros. » Satisfacti­on en revanche sur un autre point : « Les partenaire­s et les mécènes ont joué le jeu de manière extraordin­aire. Je suis dès maintenant en train de discuter avec eux pour l’année prochaine. Christophe Maé veut venir, Michel Boujenah va peut-être jouer avec Victoria Abril. On a des touches et si on arrive à définir une programmat­ion très tôt, on pourra rapidement leur présenter un projet. »

« Très fort sur le plan émotionnel »

Jacqueline Franjou a écrit un livre – Un théâtre sous les étoiles – tiré à 2 500 exemplaire­s. « Tous les bénéfices iront dans les caisses du festival. Je m’étais dit que s’il n’avait pas lieu cette année, ce serait toujours ça de pris. » Pas de quoi combler les pertes financière­s sans doute, mais l’organisatr­ice de l’événement est une éternelle optimiste. Elle sait notamment que « son » festival s’appuie sur un véritable écosystème... « Aux côtés de nos grands sponsors, on voit arriver depuis quelques années, le petit électricie­n du coin, le marchand de légumes, le boulanger ou encore les petits hôtels. On est ainsi l’un des rares festivals dont la billetteri­e se trouve complétée par l’apport du mécénat, du partenaria­t et du sponsoring. C’est cela qui assure notre équilibre. » Oui mais, si la crise venait à perdurer ? « On fera la même chose que cette année, mais sur six ou sept soirées pour garantir l’équilibre financier. Comme tout le monde, on est en attente mais on ne sait pas de quoi. » Du doute en tout cas, elle extirpe cette certitude : « En ce mois d’août, on a vécu sur le plan émotionnel quelque chose de très fort. Jamais, on n’avait connu cela. Le festival de Ramatuelle a connu la pluie, le vent, les arrêts de spectacles. Là, on a vu des artistes en larmes, des gens heureux de les revoir sur scène. J’ai voulu que ce festival soit un message d’espoir. J’espère juste que ça servira à quelque chose... » Nous, on n’en doute pas !

 ?? (Photo Philippe Arnassan) ?? Michel Boujenah, directeur artistique du Festival de Ramatuelle, et la présidente Jacqueline Franjou, satisfaits malgré tout de cette e édition si particuliè­re.
(Photo Philippe Arnassan) Michel Boujenah, directeur artistique du Festival de Ramatuelle, et la présidente Jacqueline Franjou, satisfaits malgré tout de cette e édition si particuliè­re.

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