Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)
Stations : après le coup
La crise du coronavirus a écourté leur saison hivernale, mais elle dope leur fréquentation estivale. Les stations azuréennes veulent en sortir par le haut
O
n n’ira pas jusqu’à s’écrier « c’est déjà Noël », mais c’est un joli lot de consolation. Après une saison hivernale brutalement interrompue par le confinement, à la mi-mars, les stations de montagne des Alpes-Maritimes reprennent des couleurs cet été. Et préparent déjà le coup d’après. + % de fréquentation à La Colmiane, un bon + % à Valberg, des VTTistes deux fois plus nombreux à Isola ... Les tendances estivales sont ensoleillées, après la douche froide de l’hiver. Des chiffres à relativiser, toutefois : l’affluence est bien moindre en été. « Cela ne peut pas compenser les pertes.
Eté : un grand cru
Les tendances de fréquentation sont éloquentes. À La Colmiane, le cocktail tyrolienne-luge-accrocbranche, combiné à d’autres plaisirs estivaux, a fait bondir la fréquentation d’un tiers [lire en page suivante]. Au Boréon, le parc Alpha et ses loups blancs peuvent se targuer d’un joli +18 % en juillet. Valberg aussi enregistre des résultats spectaculaires. Remontées mécaniques, accrobranche, pêche à la truite oscillent entre + 60 et + 70 % de fréquentation. Gros succès pour le golf (+ 44 %), le parc de loisirs (+ 42 %), l’espace Valberg aventures (+ 30 %). Le mini-club rafle le pompon : +215%. A contrario, la piscine valbergane perd un quart de sa fréquentation. Même tendance au Vesubia Mountain Park à St-Martin-Vésubie (30 %). Leur point commun : leurs installations sont, pour tout ou partie, « indoor ». « Très clairement, cela traduit la volonté du public d’être en extérieur, à la fraîche, avec plus de distances que sur le littoral », analyse Antoine
En revanche, la montagne y gagne en notoriété », remarque Lionel Fernandez, directeur de l’office de tourisme d’Isola . En l’absence des touristes, nos stations (re) conquièrent les coeurs d’une clientèle française, voire locale. En espérant séduire cet hiver aussi. « On est en train de boucler les gros événements de l’hiver », explique Pascal Lequenne, patron de l’office de tourisme d’Auron. Planifier, anticiper, avec au-dessus de la tête une épée de Damoclès nommée Covid-. « On fait comme si, et on s’adaptera. On bloque les dates, les prestataires, et on espère maintenir l’activité la plus normale possible. »
Delahaye, directeur du syndicat mixte Pure Montagne. Même constat dans la Tinée. À Isola 2000, pourtant plus taillée pour l’hiver, « l’engouement se traduit de manière très nette. Ça va crescendo, constate Lionel Fernandez à l’office de tourisme. Sur un été bien fréquenté, on est à 35 % d’occupation des lits. Là, on est à 50-55 % ! » Star de l’été isolien : le VTT. «Lafréquentation, déjà record l’été dernier, a explosé. 1 500 passages par jour certains week-ends, 700-800 en semaine : ça a doublé », salue JeanChristophe Desens, directeur du domaine skiable. Les amateurs de petite reine ont même vu s’entraîner les équipes Ineos, Cofidis et Arkea. Remontées mécaniques gratuites à Isola et Auron, offres promotionnelles... Cette « stratégie du rebond » surfe sur une tendance générale. «Le mot “refuge”, très propre à la montagne, prend encore plus de sens sur cet été », estime Lionel Fernandez. À Auron, les hôtels ont vu s’allonger la durée moyenne des séjours. « Ils durent souvent une semaine, contre une ou deux nuits d’habitude », observe Pascal Lequenne. Auron accueille de nouveaux clients franciliens, alsaciens, normands, aux côtés d’Azuréens toujours majoritaires.
Un hiver raboté...
Malgré tout, la crise du coronavirus a laissé des traces. «Onafermé cinq semaines plus tôt que prévu, vacances de Pâques comprises. On était parti sur les bases d’une très bonne saison... Ça laisse un goût d’inachevé », soupire Lionel Fernandez. Jean-Christophe Desens confirme : « On ne pourra pas rattraper ce manque à gagner, environ 10 % du chiffre d’affaires. » Le 15 mars, Auron avait déjà égalé les résultats de l’hiver précédent. Elle visait le record absolu. L’affluence estivale ne change rien à l’affaire pour les moniteurs de ski et loueurs de matériel. Pour les hôtels, en revanche, « ça aidera un peu la fin de saison ». À La Colmiane, « les chiffres de l’été vont compenser les pertes de l’hiver », estime Antoine Delahaye. Le Boréon, qui avait « perdu gros », pourrait rattraper « les deux tiers des pertes », si août confirme la belle dynamique de juillet.
... et le suivant pour se relancer
Dans les stations, même en août, l’hiver arrive tout schuss. « L’été, l’enjeu est de promouvoir l’hiver, explique Jean-Christophe Desens. On prépare la saison hivernale, très importante. La tendance commerciale est bonne. Je pense qu’il y aura un engouement pour la neige. » Isola a, d’ores et déjà, prévu d’ouvrir son domaine skiable le 5 décembre.
Voire fin novembre « si les conditions d’enneigement le permettent ». Et les conditions sanitaires ? «On ne maîtrise pas ces aspects-là, admet Jean-Christophe Desens. Mais on se met en ordre de marche. On va organiser les recrutements et préparer nos installations. » Même écho côté Colmiane. « Si tout se présente bien et que vous n’êtes pas prêt, vous vous en mordez les doigts ! justifie Antoine Delahaye. On se projette déjà dans l’hiver. Dans une station, une part importante de l’activité est liée à la maintenance : c’est programmé. On a déjà les deux pieds dedans. » D’ici là, les stations aimeraient bien étirer quelque peu leur saison estivale. Valberg a « réorienté pas mal de forces sur septembre-octobre, dans la logique de préparation de l’hiver », explique Audrey Roatta, à l’office de tourisme. La Covid-19 nous a appris qu’il fallait savoir jongler et être hyperréactif. »