Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)
Justice pour « Charlie »
Que plaçons-nous au-dessus de tout ? La paix dans le monde ? La liberté de circuler, de penser, de critiquer, de blasphémer ? C’est un idéal bien français, partagé, reconnaissons-le, par un grand nombre de nations à travers le monde. Mais pas par toutes, loin de là. Certaines combattent activement ces valeurs faussement universelles, parfois avec l’assentiment de leurs peuples, ivres de ressentiment, de nationalisme, de foi instrumentalisés. En nous frappant, le janvier , puis le novembre de la même année, dans des lieux aussi symboliques que la rédaction d’un journal satirique, dans un supermarché casher, une salle de spectacle, aux terrasses des cafés, les terroristes ont mêlé le sang et les symboles. Ils se pensaient forts, plus forts que nous, soldats d’un califat placé sous le drapeau noir de Daesh. Cinq ans plus tard, alors que la plupart d’entre eux sont morts, défaite après défaite, que leurs fantômes dépassent en nombre celui des survivants, le pays est prêt à répondre. Par la justice. Dans une tribune publiée dans Le
Monde daté d’aujourd’hui, le magistrat Denis Salas estime fort justement que «la première signification de ce procès historique » est de « remettre la parole au milieu des hommes afin de sortir du cercle de l’hostilité guerrière ».
Une étude des faits, volontairement froide et méthodique, la patiente audition des accusés, des victimes, des parties civiles. Pas impossible que l’on s’y ennuie, certains jours, quand la procédure prendra le dessus, que l’on réduise autant que possible la part de l’émotion. Parce que ce procès n’est ni une guerre, ni un spectacle, ni un exutoire. Et que son enjeu est immense : au-delà de la sévérité des peines, il n’aura de valeur historique que s‘il décortique finement la chaîne des responsabilités, des auteurs jusqu’aux commanditaires et à leurs financeurs. Alors que l’hydre islamiste se refait une santé au Sahel, il doit démontrer à l’issue de ce face-à-face avec la barbarie, que la réponse au mal peut être pacifique. Un procès d’autant plus observé par le reste de la planète que l’an prochain, débutera, aux USA, un autre procès : celui des accusés des attentats du septembre .
« Remettre la parole au milieu des hommes afin de sortir du cercle de l’hostilité guerrière »