Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)
UN RADAR TROP ZÉLÉ ?
Une cinquantaine d’automobilistes dénoncent le fonctionnement erratique de l’appareil situé sur la RD560. Une Plandalenne dit avoir reçu 55 contraventions, sur les 259 recensés à ce jour
Appareil défectueux entre Seillons et Saint-Maximin ? Une conductrice dit avoir été verbalisée 55 fois
Que se passe-t-il depuis quelque temps sur cette RD 560, limitée à 70 km/h ? L’outil dissuasif des services de l’État, placé non loin de l’ancienne distillerie, semble en effet fonctionner en roue libre depuis, selon les témoignages, le début de la période de confinement. Au 18 septembre, une cinquantaine de personnes, abasourdies, se sont manifestées pour tenter de comprendre ce qu’il leur est arrivé. Au compteur, le cumul des contraventions s’élève à 259. « Ce n’est absolument pas normal, s’indigne Audrey Sanner, 38 ans. Au moment où je vous parle, nous avons reçu 55 contraventions pour des infractions étalées sur trois mois à partir du mois de mars. »
« Un problème de calibrage » ?
Un constat d’autant plus amer que la trentenaire dit n’avoir « jamais » eu de procès-verbal pour excès de vitesse depuis l’obtention de son permis de conduire à l’âge de 18 ans. Par ailleurs, si, sur certains de ses PV, la vitesse retenue dépasse de 1 ou 2 km/h la limite fixée, sur d’autres les autres sont plus élevés mais « pourtant je fais très attention. J’ai une Fiat avec un tout petit moteur et en plus on est, sur cette portion, dans une montée. Il y a forcément un problème de calibrage. Aujourd’hui, j’ai peur de me faire arrêter par les gendarmes », assure cette mère de famille. Les récits plus ou moins similaires mais tous accusateurs s’accumulent sur les réseaux sociaux. Sabrina a fait le point : vingt amendes entre mars et mai. « Cinq payées. Je remets aussi en cause la fiabilité de ce radar », précise-telle. Avec 26 PV, la Tavernaise Marion se retrouve avec une belle épaisseur de courriers à traiter. « Perdre son permis pour cela, c’est inadmissible. Cela fait dix ans que je prends cette route deux fois par jour », s’insurge-t-elle. Coralie dit avoir reçu dix contraventions ; Christophe, treize ; Méré vingt et un, Corinne, neuf ; quatre pour Pascal ; huit pour l’époux de Virginie – « tous en mai »–, dix pour Laurence « depuis le mois d’août ». Les six amendes pour excès de vitesse ont une conséquence financière non négligeable pour Dorothée, « pincée » jusqu’à 101 km/h (vitesse retenue 95). « Ça me semble excessif. Je ne me l’explique pas et hormis le problème des points, le côté financier pèse aussi énormément. Je ne sais pas comment je vais faire mis à part leur demander un échéancier ». Delphine paraît désemparée. Son grand-père a été sanctionné pour quatre excès de vitesse « mais il ne roule pas à plus de 70 km/h. Que doit-il faire, svp ? », interroget-elle. Dominique, lui, a demandé à recevoir les photos prises par le radar : « J’ai reçu les clichés de mes six premiers PV. (...) Ils sont tous pris pile devant l’entrée du sentier provençal. Et à part reconnaître la voiture, on ne voit pas grand-chose (même ma tignasse frisée n’est pas toujours identifiable). J’espère pour eux qu’ils en prennent d’autres que ce qu’ils nous envoient ou filment… » Il a tenté une procédure auprès des services ad hoc : « J’ai reçu les premières réponses à mes contestations : rejetées, bien sûr. Et ils précisent qu’on a le droit de faire appel mais que c’est à nos risques et périls car ça peut nous coûter jusqu’à 400 euros ! »
Réunis en collectif
Une Seillonnaise, Audrey Pouliquen, a monté un groupe sur Facebook nommé « Collectif radar Sentier Provencal » réunissant 80 membres, intéressés de près ou de loin par le sujet. « Mon fils, Théo, s’est pris un PV. Une fois, ça arrive mais cinq... Cela commence à faire beaucoup », s’interroge la fondatrice du groupe, expliquant vivre dans l’ « angoisse et le stress » à l’idée d’ouvrir la boîte aux lettres. « Les courriers arrivent dans le désordre. Certains ont mis six mois pour arriver. On ne sait pas si ça va s’arrêter un jour ou non. » L’inquiétude monte d’un cran lorsque la question de l’annulation du permis du fiston, délivré avec les six points réglementaires pour les nouveaux reçus, est évoquée. « Je lui ai fait faire un stage pour qu’il retrouve quatre points. »Une démarche « qui nous a coûté un bras déjà. »
La mairie alerte
Un premier courrier de contestation réunissant une dizaine d’automobilistes a été envoyé au Centre automatisé de Constatation des Infractions Routières à Rennes, comprenant le numéro des PV, les vitesses retenues et les dates des « infractions ». Une missive, pour l’heure, restée sans réponse. « La simple amende est de 45 euros. Par contre, pour contester, il faut débourser une somme forfaitaire de 68 euros », précise Audrey. Alertée, la mairie de Seillons Source d’Argens a mis en garde ses administrés. Non sans humour. « Il semble que le virus covid19 soit aussi dangereux pour les radars !, peut-on lire sur le site Internet de la commune. (...) De nombreux automobilistes empruntant la route entre Saint-Maximin et Brue-Auriac ont eu la surprise de recevoir des contraventions en cascade. » Et de poursuivre : « Certains ont même reçu une quarantaine de contraventions arrivant avec des mois de retard par rapport à la date de l’infraction. » Contactée dès le 11 septembre, la préfecture disait hier travailler sur la question et être en train de « réunir tous les élements ». Le collectif, lui, n’exclut pas la possibilité de recourir aux services d’un avocat spécialisé en droit routier pour défendre sa cause.