Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)

Au procès des attentats, l’incroyable réflexe d’un employé municipal

-

«Jemesuisdi­t: “Si je veux survivre, il faut que je lui saute dessus.” » Un employé municipal a raconté hier aux assises de Paris comment il avait eu l’incroyable réflexe de saisir l’arme d’Amédy Coulibaly après l’attentat contre une policière à Montrouge. Le 8 janvier 2015, au lendemain de l’attaque contre Charlie Hebdo, Laurent, alors chef d’équipe du service propreté de la ville de Montrouge (Hauts-de-Seine), est appelé au petit matin sur un banal accident de circulatio­n, quand il remarque un homme vêtu d’une doudoune identique à la sienne se « coller » à lui. Cet homme, il ne le sait pas encore, est Amédy Coulibaly. « Il a sorti son arme de guerre et il a tiré immédiatem­ent », se remémore Laurent d’un ton assuré. Il est 8 h 04. Clarissa Jean-Philippe, policière municipale de 26 ans, s’effondre après qu’une balle lui a traversé la gorge. Un collègue de Laurent est grièvement blessé au visage.

« Tu veux jouer, tu vas crever »

Laurent est à ce moment-là « focalisé sur le bout du canon, il y avait des étincelles. Ça faisait factice. J’ai tapé sur le canon de l’arme en lui disant : “Mais t’es con ou quoi, avec ce qu’il s’est passé hier, de faire des blagues comme ça” », témoigne le quadragéna­ire.

Mimant la scène à la barre, il explique que « devenu fou » après avoir vu la « tête explosée » de son collègue, il a « agrippé » le fusil d’assaut de Coulibaly. « Ma dernière pensée aété: “Si je lui tourne le dos et que je pars, il a la distance suffisante pour m’abattre. Donc ma seule chance, c’est de lui rentrer dedans.” » L’altercatio­n est « violente ». « Il m’a fait tomber sur un pare-chocs de voiture, je l’ai poussé contre une grille. On a fait quelques mètres ensemble », raconte Laurent. Dans la bagarre, il arrachera même la cagoule du tueur, retrouvée sur les lieux par les enquêteurs qui identifier­ont formelleme­nt Coulibaly grâce à son ADN. À genoux devant le jihadiste « surarmé » et «déterminé », Laurent reste toujours agrippé à l’arme. «Ilm’adit: “Tu veux jouer, tu vas crever.” En tenant une main sur la kalachniko­v, il a plongé l’autre main dans la doudoune et sorti un pistolet automatiqu­e. Il n’arrivait pas à se débarrasse­r de moi, ça l’énervait », poursuit-il. Mais Coulibaly ne le « finit pas ». Au contraire, il fait demi-tour et repart « en courant ». « L’une des hypothèses », rappelle l’avocat général, « c’est que l’arme s’est enrayée et qu’il n’a pas pu tirer ». « Oui, je doute qu’il a eu de la compassion », lui répond Laurent.

Newspapers in French

Newspapers from France