Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)

Rouler à  km/h en centre-ville rallonge-t-il le temps de parcours ?

Mouans-Sartoux, dans les Alpes-Maritimes, a été la première à prendre cette initiative dans la région, suivie d’Hyères dans le Var. Nice y passera en 2026. Quels sont les principaux bénéfices de cette mesure ?

- SOPHIE CASALS scasals@nicematin.fr

Àquelle vitesse roulezvous en centre-ville ? 50 km/h, plus de 50, 30 km/h, moins ? Demain, au coeur des villes, le « 30 km/h » devrait se généralise­r. Les pays d’Europe du Nord ont ouvert la voie de villes apaisées, moins polluées et plus sûres.

En France, plus d’une centaine de communes ont fait ce choix pour améliorer la qualité de vie des habitants. C’est le cas de Mouans-Sartoux qui a rejoint le club des « villes 30 » il y a près de dix ans, et plus récemment d’Hyères où une zone 30 km/h a vu le jour.

De son côté, Nice vient d’annoncer sa décision d’instaurer d’ici 2026 une zone 30 km/h dans le centre-ville et de supprimer les feux tricolores.

■ Sur quel périmètre ?

« De la gare Thiers à la mer, à l’exception de la Promenade des Anglais et entre les boulevards François-Grosso et Carabacel, ce qui représente environ 10 % de la superficie, explique Gaël Nofri, adjoint au maire en charge de la circulatio­n. C’est là où se concentren­t de nombreuses nuisances : bruit, pollution... » Les feux seront aussi supprimés à l’exception de ceux aux carrefours du tram et des bus.

■ Pourquoi attendre cinq ans ?

« C’est le temps de faire des aménagemen­ts de voirie importants pour qu’elle soit sûre. » Mais c’est aussi le temps de convaincre et de faire évoluer les mentalités. «On ne veut pas que le 30 km/h soit vu comme une contrainte », poursuit l’élu, bien conscient des opposition­s que la mesure ne manquera pas de soulever.

■ Pourquoi est-ce difficile à accepter ?

« La limitation de vitesse est mal perçue parce qu’elle est vécue comme une restrictio­n de liberté », analyse Antoine Nicault, animateur du GrecSud (Groupe régional d’étude sur le climat).

Le 30 km/h bride-t-il réellement notre vitesse de déplacemen­t ? Il restreint certes la possibilit­é de faire des pointes à 50 km/h et il donne ainsi aux automobili­stes l’impression de se traîner. Mais si on s’intéresse à la vitesse moyenne d’un véhicule en centre-ville, la réalité est tout autre. En effet, on roule en moyenne à 14 km/h (source Ademe). Les bouchons, la multitude de feux, de stops… expliquent cette faible moyenne.

« En abaissant la vitesse, on améliore la fluidité et ce d’autant plus si on supprime des feux de signalisat­ion. » Passer de 50 km/h à 30 km/h n’a en réalité que très peu d’effet sur les temps de parcours. Sur une distance d’un kilomètre l’impact est d’environ dix-huit secondes supplément­aires.

« En abaissant la vitesse, on améliore la fluidité et ce d’autant plus si on supprime des feux de signalisat­ion », poursuit Antoine Nicault. On se déplacera même plus vite si la limitation de vitesse à 30 km/h est assortie d’une suppressio­n des feux rouges. Un test local effectué à Fontainebl­eau révèle une augmentati­on de la vitesse moyenne de l’ordre de 5 % avec une limitation à 30 km/h par rapport à une restrictio­n à50km/h.

■ Quels bénéfices ?

« On n’est pas là pour faire de l’écologie punitive, notre objectif est de permettre aux habitants de se réappropri­er l’espace public », martèle Gaël Nofri. Mais les citoyens ne l’entendent pas nécessaire­ment de cette oreille. Alors comment faire accepter cette nouvelle limitation ?

« C’est important pour les villes de communique­r sur l’ensemble des bénéfices et pas seulement sur l’impact sur la qualité de l’air, sujet à controvers­e, » note Antoine Nicault. En effet, des études indiquent qu’on pollue davantage à 30 km/h qu’à 50 km/h. Mais si l’on prend en compte l’améliorati­on de la fluidité et l’impact de la suppressio­n des feux rouges, l’effet est bénéfique. « Enlever un feu c’est réduire la pollution aux NOx (oxyde d’azote) de 20 % et celles aux particules fines de 37%» , souligne Gaël Nofri. Il avance aussi les gains en termes de réduction du bruit en ville.

Autre bénéfice : celui de la sécurité des piétons. Un argument d’ailleurs avancé par les habitants du centrevill­e d’Hyères lorsqu’ils ont demandé le passage en zone 30. En effet, dans les villes ayant déjà opté pour la limitation à 30 km/h, la baisse du nombre d’accidents a été très sensible. Et lorsqu’ils se produisent, ils sont moins graves. On estime à 90 % le risque de mort pour un piéton percuté à 50 km/h, contre 50 % lorsque le véhicule roule à 30 km/h. «Lazone30km/h est un levier de changement dans les modes de déplacemen­ts. Demain les villes seront plus actives, sur des trajets courts les gens prendront moins la voiture. »

Mais ça ne veut pas dire que les « villes seront plus lentes », analyse Antoine Nicault. « Au contraire, on se déplacera plus vite. Pour les trajets de moins de trois kilomètres, le vélo est plus rapide que la voiture. Et les citadins auront davantage de liberté de marcher, pédaler, la circulatio­n sera plus fluide. »

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(Photo Éric Ottino Les zones  km/h se développen­t dans les centres-villes.

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