Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)
ans après Fukushima, quelles leçons ?
La Marine nationale a tiré les leçons de la catastrophe de Fukushima. Dix ans après la catastrophe, elle continue d’adapter ses installations exposées aux risques nucléaires
Même s’il n’est question ni de battement d’ailes, ni de tornade, parler « d’effet papillon » n’est pas exagéré : la catastrophe de Fukushima a eu des répercussions jusque sur les bords de la rade de Toulon, pourtant située à quelque 10 000 km du Japon.
Avec jusqu’à huit réacteurs nucléaires en plein coeur de ville, le contraire eut été surprenant. Voire inquiétant.
« Il n’y a pas eu de déni de ce qui s’était passé à Fukushima. Comme tout exploitant nucléaire, la Marine nationale, en discussion avec l’autorité de sûreté nucléaire de défense et l’institut de radioprotection et de sûreté nucléaire, a entièrement revu ses référentiels de sûreté et ses plans d’urgence », assure le capitaine de vaisseau Pierre (1), chef de la division prévention et maîtrise des risques environnement du port militaire de Toulon. Peu importe que les réacteurs nucléaires à bord des navires de guerre français soient beaucoup plus petits que ceux exploités dans les centrales d’EDF, ou qu’ils soient à l’arrêt lorsque les bâtiments sont à quai. La Marine a tout remis à plat.
« Le nucléariste est programmé pour le pire », fait remarquer le capitaine de vaisseau Christine Ribbe, porte-parole de la préfecture maritime de la Méditerranée.
Avant toute chose, la Marine nationale a donc procédé à l’évaluation des
« agressions environnementales exceptionnelles » auxquelles le port de Toulon pourrait être exposé. Rien de comparable avec le tsunami qui, le 11 mars 2011, a submergé le littoral proche de Fukushima. « En s’appuyant sur les connaissances scientifiques, on a calculé par simulation que la vague générée par un séisme n’atteindrait pas le mètre en arrivant dans le port militaire », affirme le commandant Pierre.
À Toulon, c’est ceinture et bretelles
Après avoir évalué le vraisemblable, les marins, avec la culture de redondance qu’on leur connaît, ont déterminé un «SMS» ou séisme maximum de sécurité. «Etonaencoreprisdes marges », ajoute notre interlocuteur. En matière de sécurité, dans la base navale de Toulon, c’est ceinture et bretelles !
Si les installations existantes – quai, grues, installations électriques, systèmes de pompage présents dans les zones d’accueil des bâtiments nucléaires – ont démontré leur résistance, les marins n’ont pas oublié qu’à Fukushima, «ce n’est pas tant la vague qui est responsable de l’accident nucléaire, mais le temps pendant lequel les réacteurs sont restés coupés du monde, sans les auxiliaires pour pouvoir les refroidir ».
Aussi, pour parer à une situation comparable, la base navale de Toulon a procédé à quelques aménagements. Plutôt discrets. Notamment dans la zone de Missiessy qui abrite les sous-marins nucléaires d’attaque de type Rubis et Suffren. Si aucune digue de protection n’a été érigée comme au Japon, les trois bassins où les submersibles sont entretenus ont ou vont être renforcés. « À titre d’exemple, les tins, ces gros blocs sur lesquels vient reposer la coque en cale sèche, sont désormais parasismiques », glisse le commandant Pierre. Avant d’ajouter : « Des moyens de secours ultimes, tels que des gros shelters pour l’alimentation électrique, des systèmes pour assécher les bassins ou arroser la coque, ont également été achetés et positionnés dans la base navale ».
Toutes ces améliorations, auxquelles on pourrait inclure les valises de transmissions par satellite ou les balises mobiles de surveillance radiologique dont s’est également dotée la base navale de Toulon, ont bien entendu été intégrées aux plans d’urgence. Dernier point, non des moindres : l’entraînement. « Chaque
année, on effectue au moins quatre exercices majeurs, explique le Cdt. Ribbe. Quant au plan particulier d’intervention, très exigeant, il a lieu tous les trois ans ». 1. Pour des raisons de sécurité, seul le prénom est indiqué.