Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)

Le gros pavé dans la royauté

- de MICHÈLE COTTA Journalist­e et écrivain edito@nicematin.fr

« Aujourd’hui, les Anglais se divisent plus que jamais entre partisans et adversaire­s de la monarchie »

Ils sont beaux, jeunes, ils s’aiment. Un vrai couple de magazine, dont le bonheur de vivre se poursuit dans une villa hollywoodi­enne aux belles dimensions. Cette romance n’en est pas une pour tout le monde. Et notamment pas, après la fracassant­e interview que les deux jeunes gens ont accordée à la star de la télévision américaine Oprah Winfrey, pour la famille royale britanniqu­e. Le coup porté à Buckingham par Harry et Meghan est sévère. Libre à chacun d’apprécier l’attitude des deux ex-membres de ce qu’ils appellent, d’une expression volontaire­ment méprisante, « la firme ». Enfants gâtés qui n’ont pas supporté la stricte discipline des palais et ont choisi de se construire, en Californie, un vaste paradis que leurs confidence­s suffisent à entretenir ? Ou bien un homme et une femme modernes, convaincus que la monarchie est une survivance, où l’hypocrisie règne derrière le protocole, la cruauté derrière les sourires ? Peu importe le jugement porté sur le « Megxit » et les deux jeunes insoumis. La réalité est que la monarchie anglaise risque tout simplement de ne pas résister à l’attaque venue du sixième prétendant au trône et de son épouse. D’abord parce que la reine est une vieille dame : même si elle résiste assez bien aux duretés du temps, elle n’a pas des années de règne devant elle. Son Premier ministre, monté en ligne pour affirmer devant la presse « sa plus grande admiration à la reine » a affirmé à celle-ci son respect pour le « rôle unificateu­r » qu’elle joue dans le pays. C’est bien de cela qu’il est question : aujourd’hui, les Anglais se divisent plus que jamais entre partisans et adversaire­s de la monarchie. Plus grave, l’unité du Commonweal­th est remise en cause par ceux qui, au Canada et en Australie surtout, ont trouvé dans l’interview d’Harry et Meghan de quoi plaider pour leur indépendan­ce visà-vis de la Grande Bretagne. Encore plus grave : en sousentend­ant que c’est par racisme qu’elle a été exclue de Buckingham, Meghan Markle a jeté un gros pavé sur la royauté. D’autant qu’elle a ajouté que cette condamnati­on ne concernait ni la reine ni le prince Philip, désignant ainsi, sans le dire, le prince Charles ou son fils William, éventuels successeur­s d’Elizabeth. Lorsqu’on sait que le Commonweal­th unit des pays comme le Cameroun, l’Inde et le Nigeria, comment une telle accusation ne fragiliser­ait-elle pas la couronne ?

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