Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)

L’expertise sur les prothèses PIP critiquée

Responsabl­e de défaillanc­es dans le contrôle du fabricant varois des implants PIP, TÜV, le certificat­eur, tire à boulets rouges sur l’évaluation des préjudices.

- SONIA BONNIN

L’audience s’annonçait technique, elle fut au vitriol. S’opposant aux demandes d’indemnisat­ions de 23 femmes porteuses ou ex-porteuses d’implants mammaires PIP, le certificat­eur allemand TÜV a fait le procès de l’expertise médicale ordonnée par le tribunal de commerce de Toulon. Effeuillan­t des « dossiers lacunaires », « établis seulement sur papier, sans aucune photo », « n’apportant pas les preuves des préjudices », voire « des déclaratio­ns étayées par rien »…

Jeudi après-midi à Toulon, les avocats de TÜV se sont relayés à la barre du tribunal de commerce, pour dire tout le mal qu’ils pensent des résultats de l’expertise menée par un professeur de médecine et son expert adjoint (lire cicontre).

« Opposés à cette méthode »

« Nous ne remettons pas en cause automatiqu­ement l’avis des experts, mais nous devons avoir les pièces médicales au dossier », a justifié Me Christelle Coslin en défense de TÜV, aux côtés de Mes Christophe

Garin et Nicolas Rohfritsch. «On vous demande d’être une simple chambre d’enregistre­ment des dossiers d’expertise. Nous sommes opposés à cette méthode. » D’autant plus que les demandes d’indemnisat­ion vont de 19 000 à 63 000 euros. « Les montants exigés sont bien plus élevés que dans la grille [de référence], dont on a fait une applicatio­n démesurée » ,a taclé le trio d’avocats, estimant encore que « le risque [lié aux prothèses PIP] n’est pas avéré ».

« TÜV n’a cessé de remettre en cause »

« J’entends des choses qui dépassent l’entendemen­t, a grondé Me Olivier Aumaître, représenta­nt 23 victimes. Si les femmes portent des implants avec du gel de silicone industriel, ce serait leur problème ? Non, c’est parce que TÜV a été défaillant. » L’avocat a fustigé l’attitude TÜV « qui n’a cessé de remettre en cause toutes les étapes de l’expertise, systématiq­uement ». Lui, au contraire, revendique de s’en remettre aux experts. « C’est un médecin qui s’est prononcé. Qui ici peut dire qu’il s’est trompé ? »

Et de montrer à son tour au tribunal, sur tablette numérique, l’un des dossiers pris en exemple : « Carte de porteuse, date d’opération, déclaratio­n du chirurgien, sa traduction, photos des prothèses explantées, ici une facture… »

Délibéré dans six mois

Le préjudice d’anxiété, souligne Olivier Aumaître, c’est « la connaissan­ce de ces femmes qu’elles ont une épée de Damoclès au-dessus de la tête. Quand on a un siliconome [un amas de silicone] dans le système lymphatiqu­e, qu’est-ce que cela va donner dans dix ou vingt ans ? »

Au terme de quatre heures d’audience à couteaux tirés, le tribunal de commerce a clos les débats et mis son jugement en délibéré au 16 septembre 2021.

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(Photo doc Patrick Blanchard) Ordonnées par le tribunal de commerce de Toulon, les premières expertises ont été débattues devant le juge. À vif.

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