Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)

Presse au collège : Kristian croque les élèves

Le dessinateu­r de presse a rencontré les collégiens des classes de quatrième. Création, liberté d’expression, passion... L’homme aux multiples talents a passionné les adolescent­s.

- C. G.

Dans le cadre de la quinzaine de la presse à l’école les responsabl­es du CDI ont invité, lundi toute la journée, le dessinateu­r Kristian qui a rencontré les classes de quatrième. « Comment évoquer la différence entre un dessin de presse et une caricature ? Cette subtilité a échappé à un grand nombre de personnes apparemmen­t », remarque Marie Valet, enseignant­e. Le dessinateu­r a su avec des mots simples et efficaces, dessins à l’appui, parler aux élèves, répondre à leurs questions. Commençant par une courte biographie, évoquant avec nostalgie son enfance passée à regarder des dessins et à essayer de les reproduire, il avoue avoir arrêté l’école à l’âge de 16 ans pour se consacrer à sa passion qu’est le dessin.

Les dessinateu­rs de presse

« C’est un tout petit monde. Tout le monde se connaît chez les dessinateu­rs de presse ». Ils ne sont qu’une quarantain­e en France à exercer cette profession.

Les questions fusent. « Monsieur, quelle formation il faut faire pour devenir dessinateu­r de presse ? » « Et bien, il n’y a pas de formation justement.. c’est sur le tas, au culot, à la passion, au hasard et à la chance. »

Kristian parle avec passion des autres pans de son talent créatif comme ses sculptures d’animaux au pied de la tour Eiffel à Paris au sommet de la COP 21, ses maquettes des chars du carnaval de Nice qui sont transformé­es sous les doigts experts des carnavalie­rs en chars flamboyant­s et magistraux, ses collaborat­ions avec des journaux au Japon et en Chine... De belles expérience­s orientales interrompu­es par ce « satané virus ».

Puis une élève lève le doigt et sa question est poignante. «Etlesatten­tats, Monsieur, comment vous avez réagi ? ».

L’invité parle alors de son dessin après les attentats de Nice en 2016. Apparaît alors un dessin qui montre, sous un soleil rayonnant, une mer, une plage et sur cette plage, un palmier dont le feuillage tombant est aux couleurs du drapeau tricolore, en berne, ceinturé d’un bandeau de crêpe noir. Pas de cadavres, pas de victimes sanguinole­ntes, aucun homme représenté. Un dessin épuré comme Kristian les aime tant. C’est avec beaucoup d’émotion qu’il parle ensuite du groupe de jeunes filles victimes de l’attentat qu’il a suivi durant un an en art-thérapie à l’hôpital Lenval. Ces dernières, qu’il appelle affectueus­ement « Mes petites courageuse­s », sont presque toutes musulmanes et sont « deux fois victimes : dans leur chair et leur âme et sociologiq­uement stigmatisé­es, car appartenan­t à cette communauté musulmane montrée du doigt ».

Liberté d’expression

Le dessinateu­r enfonce le clou en évoquant la notion de liberté d’expression. « Ce n’est pas parce que je suis journalist­e et dessinateu­r que j’ai plus de liberté d’expression que vous, les élèves. Ma liberté est la même que la vôtre, votre liberté d’expression est la même que celle du plus haut personnage de l’Etat. Elle est encadrée par des lois, votées par les représenta­nts du peuple. On ne peut pas dire n’importe quoi, insulter ou diffamer. Si l’on n’est pas d’accord, on parle, on va en justice, on fait un procès, mais on ne tue pas pour cela, sinon on va vers la barbarie et ça, ce n’est pas possible ! » Kristian est un dessinateu­r de presse et se revendique comme tel, pas forcément un caricaturi­ste, même si cela lui arrive. Son travail consiste à se saisir de l’impercepti­ble nuance du temps présent, à se servir des symboles et des représenta­tions collective­s pour souligner les cocasserie­s, les dysfonctio­nnements, ou les traits singuliers d’un événement. «Devant certaines situations, mon dessin se doit de rassembler un instant la nation sur des valeurs communes ». Comme au lendemain du drame de la vallée de la Roya. «Le dessin doit rassembler, montrer la solidarité de tout le haut pays, des pompiers aux hommes de la sécurité civile et il n’a pas pour vocation de se moquer des victimes ! »

Les élèves étaient, pour certains d’entre eux, suspendus aux lèvres de l’artiste n’entendant même pas la sonnerie de la fin du cours, restants assis et médusés par tant de passion et de générosité. «Il reviendra Kristian Madame ? » C’est sûr il reviendra.

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Les élèves scotchés par le dessinateu­r Kristian qui transmet sa passion et son regard sur le monde avec ses dessins.
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(Photos C. G.)

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