Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)
Des routiers aux mains de la mafia des stups
Les réseaux criminels ciblent ces petits patrons fragilisés par la crise sanitaire. Les saisies de stupéfiants par les Douanes ont augmenté de 334 % l’an dernier dans les Alpes-Maritimes.
L «a crise sanitaire a conduit bon nombre de chauffeurs, petits patrons de leur société, à accepter le transport pour se sortir d’une situation commerciale et financière difficile. » Les réseaux criminels ont, plus que jamais, jeté leur dévolu sur les chauffeurs routiers, notamment espagnols. Des proies faciles, surendettées.
« Du jamais vu »
C’est le triste constat que tire Marie Catherine Kuntz-Pinguet, cheffe du Pôle orientation des contrôles aux Douanes des Alpes-Maritimes. Bilan : la Covid-19 a fait exploser les saisies de stups. En 2020, ce sont 3,3 tonnes qui ont été saisies dans les Alpes-Maritimes contre 760 kg en 2019… Soit une augmentation de 334 %. « Du jamais vu depuis mon arrivée en juin 2018 », note Roger Combe, directeur régional des services douaniers du département. Le tribunal correctionnel de Nice voit régulièrement passer ces entrepreneurs surendettés.
Le 2 mars dernier, Antonio Garcia, 56 ans, né à Montpellier mais de nationalité espagnole, l’air abattu et se défendant maladroitement, a ainsi été condamné à 30 mois de prison. Il avait accepté de faire la « mule » et de convoyer 253 kg d’herbe et de résine de cannabis, bien cachés derrière une cargaison de matelas. « Les saisies opérées montrent que les réseaux criminels organisés ont approché en Espagne des chauffeurs routiers pour effectuer des transports de stupéfiants, contre promesse de rémunération », déplore Marie Catherine Kuntz-Pinguet. Ces routiers prennent des risques colossaux pour des clopinettes.
En septembre 2020, ce sont 424 kg de résine de cannabis (valeur 849 000 euros) qui ont été débusqués par les agents de Menton. La drogue était dissimulée derrière deux voitures dans la remorque d’un poids lourd. Le chauffeur roumain en difficulté financière, gérant de sa propre société, a reconnu avoir accepté l’opération contre la promesse de récompense
de… 3 000 euros.
Il a écopé de quatre ans d’emprisonnement, la confiscation des stupéfiants ainsi que de son camion et des voitures transportées. Par peur, ces chauffeurs routiers embastillés en France, livrent rarement les têtes de réseau de ces organisations criminelles. Ce qui rend les enquêtes, pour faire tomber les caïds de la drogue, extrêmement complexes.
Pour tenter de juguler ce trafic transfrontières, les Douanes multiplient donc les contrôles. « Pendant l’année 2020, les douaniers ne sont pas restés confinés. Tout au contraire, ils ont beaucoup travaillé et très bien travaillé », conclut Roger Combe, directeur régional des douanes de Nice.