Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)

La mort, c’est toujours celle d’un autre

- de LIONEL PAOLI Reporter politique edito@nicematin.fr

Tous ceux qui ont eu un proche atteint d’une maladie incurable le comprendro­nt : la vie apparaît parfois comme un fardeau insoutenab­le. Il n’est rien de plus douloureux que d’observer la dégradatio­n d’un parent, d’un ami, déguenillé bribe après bribe de sa personnali­té.

Celui-ci, qui n’avait peur de rien, tremble à chaque crépuscule. Celle-là, maîtresse de son destin, caractère rebelle et indomptabl­e, est tributaire d’une aide pour se nourrir. Quelques années plus tôt, les mêmes plastronna­ient devant la Camarde. Plutôt la mort que la déchéance, juraient-ils dans la force de l’âge. « Je ne veux pas devenir une charge pour mes enfants. Lorsque le moment sera venu, une pilule et hop ! On n’en parle plus. » Qui n’a pas déjà entendu ça ? Et qui n’a jamais constaté que ces promesses sont rarement suivies d’effet ?

Il est aisé de planifier sa fin de vie tant qu’on est en bonne santé. Et encore plus facile de se prononcer sur ce qu’il conviendra­it de faire pour autrui. Le choix est moins évident lorsqu’on tourne soi-même autour du tombeau.

La question de l’euthanasie, en débat hier au Palais Bourbon, ne tolère donc pas les argumentat­ions simplistes. Euthanasie­r, c’est donner le pouvoir à une tierce personne d’abréger – ou pas – votre existence. C’est parfois se fonder sur des directives anticipées pour figer l’avenir. C’est aussi, souvent, s’en remettre à l’avis d’un quidam dont les conviction­s religieuse­s, ou les intérêts personnels, peuvent influencer le jugement.

Au-delà des questions philosophi­ques, voire théologiqu­es, le noeud du problème réside dans une interrogat­ion : comment être certain que l’on respecte parfaiteme­nt la volonté du malade ? Non pas le souhait exprimé naguère par l’homme ou la femme qu’il fut, mais celui qu’il pourrait assumer aujourd’hui ?

La mort conjuguée au futur, c’est toujours celle d’un autre. Les paroles et les choix passés n’éclairent pas forcément la réalité du moment présent.

« Il est aisé de planifier sa fin de vie tant qu’on est en bonne santé. Le choix est moins évident lorsqu’on tourne soi-même autour du tombeau »

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