Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)
Le Varois qui approcha la star Youri Gagarine
Une paire de lunettes fines sur le nez, de longs cheveux blancs coiffés en arrière… En forçant un peu le trait, le Seynois Georges Klimoff ressemblerait presque à Hippolyte Calys. La comparaison ne déplairait pas forcément à l’intéressé qui reconnaît « avoir été bercé par les aventures de Tintin » dans son enfance et dont le grand-père paternel, fondeur de verre de son métier, « avait fabriqué le miroir du télescope de l’observatoire de Poulkovo, en Russie ». Mais contrairement à l’astronome imaginé par Hergé pour l’album L’étoile mystérieuse, Georges Klimoff n’a pas prédit de collision entre une météorite et la terre. En revanche, il a rencontré le cosmonaute Youri Gagarine, le premier homme envoyé dans l’espace ! Une légende de la conquête spatiale.
Russe blanc et héros soviétique
Quatre ans après avoir effectué son vol en orbite autour de notre planète, le cosmonaute soviétique est en effet invité en juin 1965 à séjourner sur les îles de Bendor et des Embiez, propriétés de Paul Ricard. Georges Klimoff, dont le patronyme trahit ses origines russes, est alors sollicité pour servir d’interprète. Ce qu’il fait déjà pour le compte des chantiers navals de La Seyne qui construisent plusieurs navires pour l’URSS. Passionné d’astronomie – il était alors président du club Antarès à La Seyne – Georges Klimoff accepte immédiatement. En dépit de l’histoire familiale. « On fait bien sûr partie des Russes blancs » confie-t-il, avant de justifier son choix : « Quand vous avez 20 ans et qu’on vous propose d’accompagner le premier homme à avoir été dans l’espace, vous n’hésitez pas une seconde ! »
De l’espace au ski nautique
Plus d’un demi-siècle plus tard, le Seynois se souvient de ces deux jours et demi passés sur les îles Paul Ricard. « Gagarine était quelqu’un de très réservé, voire timide. À l’inverse, je lui posais beaucoup de questions. Notamment sur les programmes spatiaux à venir. De façon très évasive, il évoqua la future station Mir. Pour moi, ça reste des moments fabuleux ».
Parmi les anecdotes, Georges Klimoff raconte comment Gagarine s’est pris de passion pour le ski nautique qu’il découvre entre Bendor et les Embiez. «À tel point que, de retour au pays, il lancera ce sport sur la mer Noire ». Ou encore son intérêt pour les plantes grasses. « J’ai appris plus tard que c’était un collectionneur passionné de cactus ».
Depuis cette rencontre improbable, lui « collectionne » les cosmonautes, astronautes et autres spationautes. « Depuis Gagarine, j’en ai approchés pas mal. Les Américains Scott Carpenter, Anna Fisher, William Readdy, le Russe Oleg Kotov, le Français Jean-Pierre Haigneré ».
Mais dans son esprit, Youri Gagarine reste le premier. Un peu comme un premier amour. À ce titre, Georges Klimoff, 77 ans, regrette, pandémie oblige, de ne pas pouvoir se rendre en Russie pour assister aux commémorations du 60e anniversaire du premier vol habité dans l’espace.