Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)

Cultiver la « mutation » pour faire face aux crises

Les inondation­s et la Covid ont affaibli l’activité de Philippe Auda, qui s’est tourné vers une autre forme d’agricultur­e et diversifie sa production. Il se lance dans le champignon.

- THOMAS HUET thuet@nicematin.fr

Son exploitati­on – 15 ha de culture de plein champ et 3 ha de serres – est connue depuis 2003 pour abriter des jeunes pousses de salade et des herbes aromatique­s. « Ça, c’était avant ». Philippe Auda, le maraîcher du chemin de l’Iscle (Société civile d’exploitati­on agricole des Garrigues) a dû opérer plusieurs virages. Dans sa « mutation » ,ilappuie désormais sur le champignon (lire l’encadré ci-dessous).

« J’étais dans un système intensif de production, avec la nécessité d’avoir des jeunes pousses toute l’année. En fait, je traitais plus et je cultivais moins. J’ai commencé à changer d’état d’esprit, et les inondation­s ont fini de me convaincre… »

Une agricultur­e régénératr­ice

En 2010, d’abord, puis en 2019. Deux mètres d’eau à chaque fois. La catastroph­e. « J’ai tout perdu, alors j’ai cherché, dès 2010, à avoir une production moins vulnérable, j’ai commencé à faire moins de travail de sol, car moins on le sollicite, plus il nous le rend », atteste cet ancien Azuréen, passionné par l’agricultur­e depuis son plus jeune âge. Atavisme, quand tu nous tiens. Progressiv­ement, Philippe Auda produit des petits légumes qu’il destine aux restaurate­urs et aux particulie­rs.

« J’ai inversé la tendance : avant je faisais 80 % de mon chiffre d’affaires sur les jeunes pousses et 20 % sur les petits légumes. Ça s’est inversé au fur et à mesure. Et je me suis véritablem­ent lancé dans une agricultur­e régénératr­ice des sols

(technique influencée par la permacultu­re) ».

Les pluies diluvienne­s de 2019 remettent le couvert et la nouvelle philosophi­e du maraîcher a porté quelques fruits. « Les parcelles qui ont le mieux résisté sont celles qui ont bénéficié de cette agricultur­e régénératr­ice ».

Philippe Auda s’escrime à sortir la tête de l’eau mais une nouvelle calamité vient plomber son allant.

« Avec la Covid, j’ai perdu mon chiffre d’affaires sur la production destinée aux restaurant­s. J’ai dû licencier (économique­ment) l’ensemble du personnel donc je ne fonctionne plus qu’avec des saisonnier­s. Les inondation­s et la pandémie m’ont sacrément affaibli ». Qu’à cela ne tienne, le maraîcher ne baisse pas les bras et, en « perpétuell­e mutation », diversifie sa production.

« Aujourd’hui, j’ai arrêté la jeune pousse et je produis plusieurs articles par saison que je revends via des marchés paysans, en attendant la réouvertur­e des restaurant­s. Je fais un recentrage complet sur la vente aux particulie­rs. On a fait du poireau, commencé le fenouil, les artichauts, les asperges, les pommes de terre nouvelles, puis on va faire les tomates, les courgettes et la pastèque avant de basculer sur la patate douce et la butternut cet hiver. Je me lance aussi dans la vente directe de plants maraîchers biologique­s en barquette, ici dans mon exploitati­on (1) ».

Bref, par philosophi­e ou nécessité, Philippe Auda a su se réinventer. La définition réactualis­ée du métier d’agriculteu­r. 1. https://www.plant-potager-biovar.fr/ (Photos Philippe Arnassan)

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J’ai dû licencier l’ensemble du personnel”

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Le maraîcher Philippe Auda dans la salle spécialeme­nt aménagée pour la culture du pleurote.
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