Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)
Châteauvert : le public invité à mettre la main à la poche
Treize hectares, 32 panneaux photovoltaïques fixes, une puissance totale de 11 MWc, pour une couverture énergétique de plus de 8 000 habitants et une production équivalente à la moitié de la consommation électrique annuelle de la commune de Brignoles. Le projet que porte l’entreprise Valeco à Châteauvert, de taille moyenne, est assez classique. En apparence seulement.
Car il possède une particularité, qui n’est pas nouvelle, mais suffisamment rare pour être signalée : il peut être financé par tout le monde. Enfin presque.
N’importe quel citoyen, Varois ou habitant des régions limitrophes, peut sortir son carnet de chèques pour participer au financement de la centrale. Via une plateforme en ligne dédiée, Enerfip, il est possible d’investir une somme allant de 10 euros à 307 000 euros. « C’est un moyen pour le public de donner corps à l’idée d’épargne responsable », note Sébastien Appy, directeur opérationnel de Valeco. Une démarche écolo ? Pas seulement.
Car qui dit “investissement”, dit forcément… “retour sur investissement”. Et là, pour le quidam avide de profit, il y a quelque chose à faire… « C’est un système d’obligations, donc la société est tenue de rembourser la somme investie, avec un intérêt. » Petit tour sur le site Internet : 5 % par an avec remboursement au bout de 3,5 ans. Pas mal !
Attention tout de même : le risque zéro n’existe pas. « Si la société venait à faire faillite, concède Sébastien Appy. Mais ce serait vraiment extraordinaire. Notre activité est stable et reconnue, le projet a été très prudemment étudié par la banque. » À chacun de se faire une opinion.
Pour le particulier, l’intérêt du financement participatif est clair : démarche responsable, engageante sur un projet local et concret, tout en représentant une possible épargne bonifiée. Mais pour l’entreprise ? « Quand on monte un tel projet, c’est en réponse à un appel d’offres lancé par l’État. On présente un permis de construire avec étude d’impact, localisation, type des structures… Et un tarif de vente de l’énergie produite. Sur ce tarif, l’État applique un bonus si une démarche participative est ajoutée au projet. » Une incitation qui séduit Valeco. D’où ce crowdfunding de l’énergie solaire, dont l’objectif est d’atteindre les 615 000 euros de financement par les particuliers. « Je suis très confiant sur le projet. Comme souvent, il devrait être surdoté. » Une bonne chose pour cette centrale dans les tuyaux depuis 2011, qui pourrait se concrétiser, si le calendrier est respecté, dès cet été.
En zone forestière, malgré les nouvelles orientations
Pour Valeco, c’est donc l’opportunité de créer une nouvelle centrale dans le secteur, après celle du Val notamment, inauguré fin 2015. Là, c’est sur une ancienne usine, devenue au fil des ans une décharge sauvage. « Nous avons tout nettoyé, et aujourd’hui, le site paraît naturel. » Et pour le directeur opérationnel, implanter des panneaux solaires sur ce genre d’endroit anthropisé, c’est-à-dire transformé par l’action humaine, «c’estcequialeplusdesens».
Ça tombe bien, c’est bien sur ces sites qu’est désormais encouragée la mise en place des centrales solaires par l’État. Reste que selon le professionnel, il ne faudrait pas avoir une position dogmatique sur la question. « Quand je vois que les objectifs parlent d’un triplement, voire un quadruplement de la production d’énergie solaire d’ici 2028, il faut bien comprendre que ça ne pourra pas se faire sur les seuls terrains anthropisés. »
D’autant qu’à ses yeux, la pose de panneaux photovoltaïques en zone forestière peut tout à fait être compatible avec la défense de l’environnement. « On est parfois surpris de la biodiversité qui apparaît alors que l’exploitation a débuté. Des lièvres, des renards, des belettes… »
Amoureux des animaux, pour peu que l’on décide de croire Sébastien Appy sur parole, voilà une raison de plus de sortir son portefeuille !