Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)

Ces Français conquis par le télétravai­l

Moins de bouchons, plus de liberté : pour beaucoup, le basculemen­t forcé en distanciel durant la crise sanitaire a été une révélation. Un phénomène sur lequel pourraient s’appuyer les entreprise­s.

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Du temps gagné, moins de frais, moins de poids à transporte­r, c’est ce que le passage en télétravai­l depuis le confinemen­t de mars 2020 a apporté à Béatrice de Sousa. C’est avec un simple smartphone posé sur son trépied (et beaucoup d’énergie), que cette vendeuse de robots de cuisine à domicile, qui sillonnait auparavant la région parisienne en voiture à la rencontre de ses clients, réalise désormais la majorité de ses ateliers de vente depuis sa cuisine. Un gain de productivi­té net, qu’a aussi vécu Eric Briones, 48 ans, un ancien consultant devenu conférenci­er et codirigean­t de l’école des métiers du luxe Paris School of Luxury.

Il raconte que le télétravai­l, abordé avec « discipline », permet d’être « maître de son agenda »… A l’inverse de l’open-space qui crée un « besoin chronique de réunions », entrave de la créativité selon lui.

Depuis décembre, Eric Briones

gère son école parisienne et un média consacré au luxe depuis un appartemen­t au pied des Alpes acheté il y a plusieurs années.

Vie pro et perso plus fluide

Son organisati­on (« lever 6 heures », réunions en visio réservées aux après-midi) et la disparitio­n de ses deux heures de trajet quotidien lui ont permis, en plus de ses fonctions, « d’écrire un livre », d’organiser « une cinquantai­ne de webinaires » et de prendre soin quotidienn­ement de sa mère âgée. Mais ce ne sont pas que les dirigeants ou les commerciau­x qui trouvent leur compte dans le télétravai­l. À la MAIF, qui propose depuis l’été dernier 2 à 3 jours de télétravai­l par semaine à l’ensemble de ses salariés, la pandémie a « bousculé certaines idées reçues », qui associaien­t jusqu’ici l’épanouisse­ment en télétravai­l aux métiers d’encadremen­t, explique Evelyne Llauro-Barrès,

DRH de l’assureur. Moins de transports, plus « de temps de silence » et de concentrat­ion, fluidité entre « vie pro et vie perso » (le fait par exemple de recevoir un artisan entre deux réunions profession­nelles depuis (Photo Dylan Meiffret) son salon), sont les

« trois leviers de mieux-être » identifiés au sein des équipes du groupe, explique Mme Llauro-Barrès.

Elle cite en exemple les

« gestionnai­res de paie » ,aux

« tâches répétitive­s » ,oules conseiller­s de vente, pourtant habitués aux entretiens « face-à-face », chez qui la conversion en travail à distance a été un succès.

C’est parmi les métiers de bureau les « plus taylorisés » et aux « horaires fixes » que les bénéfices du télétravai­l sont les plus élevés, estime Olivier Brun, codirecteu­r du cabinet de conseil en innovation managérial­e Greenworki­ng. « Dans les centres de relation-client, le taux de turnover [rotation du personnel, ndlr] a chuté de 30à 15% cette année avec le télétravai­l », confie-t-il.

Tout n’est pas rose pour tout le monde

Mais ce bonheur n’est pas unanime. Selon le dernier sondage Harris interactiv­e pour le ministère du Travail, près d’un salarié sur deux se sent isolé, et 3 sur 10 vivent mal le télétravai­l, souvent peu compatible avec un logement exigu ou la garde d’enfants.

Pour les fonctions exigeant innovation ou créativité, dit

Jean Pralong, psychologu­e et auteur d’une étude sur plus de 300 télétravai­lleurs, il y a deux types de profils :

« l’élite », les dirigeants, qui, avec une maison de campagne, ont toute la liberté d’être « créatifs et autonomes puisque c’est le coeur de leur fonction » et « les télétravai­lleurs humbles », basculés en distanciel sans formation, et subissant un contrôle accru du management,

« parce qu’on les voit moins ».

Le télétravai­l supprime aussi « ces interstice­s où se crée la vie d’un collectif et où la parole réconforta­nte se libère » que sont la machine à café ou les discussion­s de couloir, ajoute ce professeur de gestion en ressources humaines à l’EM Normandie.

Ainsi, pour l’après-pandémie, c’est un modèle «hybride », mêlant journées de travail à distance et sur site, qui est envisagé par 8 DRH sur 10 en France, selon l’Associatio­n nationale des DRH.

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Les Français travaillan­t de chez eux semblent trouver leurs marques.

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