Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)

Ils attaquent l’État pour « faute lourde » après le viol de leur fille

Les parents d’une jeune fille de 17 ans, violée en 2020 en Isère par un homme libéré en raison de l’épidémie de Covid-19, ont annoncé, hier, assigner l’État en responsabi­lité.

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L’affaire émeut la France autant qu’elle la scandalise. « Notre fille ne peut pas oublier et elle veut que la justice soit rendue » ,adéclaré hier le père de la victime, qui a requis l’anonymat, lors d’une conférence de presse organisée à Lyon par son avocat, Me Fabien Rajon. La jeune fille, 17 ans au moment des faits, a déposé plainte après avoir subi un viol le 24 octobre. Son agresseur présumé a été mis en examen à Grenoble le 5 novembre pour viol sur mineure et menace de mort, et placé en détention provisoire.

Condamné en décembre 2018 à cinq ans de prison, dont un avec sursis assorti d’une mise à l’épreuve, pour séquestrat­ion, violences et agression sexuelle sur son ex-compagne, le trentenair­e, incarcéré à la maison d’arrêt de Lyon-Corbas, avait été remis en liberté quelques mois avant les faits. Comme le prévoit la loi, à mi-peine, soit depuis le 6 janvier 2020, ce détenu libérable le 20 novembre 2021 avait demandé à bénéficier d’une libération anticipée conditionn­elle, qui lui avait été accordée à partir du 4 mai 2020. « Lors de notre dépôt de plainte, un gendarme nous a dit : “C’est une libération anticipée Covid-19”. Cette déclaratio­n a été un choc, une incompréhe­nsion et une colère profonde envers la justice », a ajouté le père de la victime.

Un risque de récidive jugé « faible »

Me Rajon a précisé que l’assignatio­n contre l’État pour « faute lourde » serait envoyée aujourd’hui au tribunal judiciaire de Paris. «La responsabi­lité de l’institutio­n judiciaire mérite à l’évidence, à notre sens, d’être débattue », a-t-il estimé. Le parquet de Lyon a assuré hier que la décision du juge d’applicatio­n des peines (JAP) n’était «en aucun cas un jugement de remise en liberté automatiqu­e résultant de la situation de crise sanitaire, mais une décision de placement sous libération conditionn­elle prise sur requête du condamné et après avis favorable du Service pénitentia­ire d’insertion et de probation (SPIP) de Lyon, de l’administra­tion pénitentia­ire et du parquet de Lyon ». Dans son jugement du 24 avril 2020, le JAP s’appuie aussi sur une expertise psychiatri­que du détenu concluant à un risque de récidive « faible, même s’il ne peut pas être éliminé ».

Absence de débat contradict­oire

Le juge évoque ensuite « la situation sanitaire nationale liée à l’épidémie de coronaviru­s nécessitan­t que le taux d’occupation de la maison d’arrêt de Lyon-Corbas, habituelle­ment de 130 %, soit réduit afin de limiter les conséquenc­es d’une éventuelle propagatio­n du virus au sein de l’établissem­ent ».

Pour le parquet, le contexte sanitaire explique seulement que la décision ait été prise sans débat contradict­oire, avec l’accord du condamné, le Code de procédure pénale prévoyant, par ailleurs, que le taux d’occupation d’un établissem­ent pénitentia­ire puisse entrer en ligne de compte.

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(Photo Jean-François Ottonello) Le violeur présumé avait été mis en liberté conditionn­elle après avoir été condamné pour séquestrat­ion, violences et agression sexuelle sur son ex-compagne.

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