Ari Vatanen : « J’espère que Sébastien va m’enlever ce fardeau... »
Comme d’habitude, il ne manque pas une miette du spectacle. Au bord des épreuves spéciales, on le remarque de loin. Tel un monument. Aujourd’hui ambassadeur de BMW, Ari Vatanen, 64 ans, alias « le grand blond avec une chaussure de plomb », demeure avant tout aux yeux du public une légende vivante des rallyes. Quelques mots pour engager la conversation et la machine à remonter le temps se met en route. À fond, forcément !
Ari, trente-six ans après, vous restez le dernier pilote Ford couronné champion du monde. Auriez-vous pu imaginer cela à l’époque ?
Ah non, pas du tout ! C’est une statistique incroyable, vous savez. En , si une voyante m’avait annoncé ça, je serais tombé de ma chaise. J’aurais répondu : « Non, impossible. » Et pourtant... Le temps passant, j’ai commencé à imaginer que j’allais mourir avec ce triste record. Aujourd’hui, heureusement, Sébastien a fait un bon choix et je compte sur lui pour prendre le relais. Pourvu qu’il enlève ce lourd fardeau pesant sur mes épaules. Parce que je ne veux surtout pas rester le dernier à jamais !
Sainz, Delecour, McRae, Grönholm ont raté le coche. Pourquoi ?
Difficile à dire. Parfois, ça s’est joué à pas grand-chose. Un petit détail. Le rallye, c’est comme la vie, très aléatoire. Par exemple, Marcus (Grönholm) ,ilperdun titre qui lui tendait les bras à cause de sa sortie de route en Irlande. Lors de cette course, il aurait dû prendre moins de risques. Peut-être qu’il voulait trop m’imiter, en fait ! Si l’équipe M-Sport a réussi à coiffer deux couronnes Constructeurs (,
, ndlr), elle aurait mérité de voir au moins l’un de ses pilotes sacré durant tout ce temps.
Ogier champion du monde cette année, vous y croyez dur comme fer?
Oui, c’est possible ! Parmi les options qui s’offraient à lui, il a choisi la meilleure. Dans l’urgence, Sébastien s’est tourné vers la voiture qui lui donne le plus de chances de prolonger sa série, même si M-Sport dispose d’une puissance financière très inférieure à celles de ses adversaires. À l’instar de Schumacher autrefois chez Ferrari, je pense que son arrivée peut insuffler une dynamique positive. Donner un coup de boost.
Et inciter Ford à revenir officiellement en WRC ?
Pourquoi pas ? Aujourd’hui, la situation ressemble à . À l’époque, le team de David Sutton était une toute petite structure et on se battait notamment contre les premières Audi Quattro officielles. C’est pareil maintenant. Pour l’instant, M-Sport ne lutte pas à armes égales. Mais demain, qui sait ? Justement, le numéro de Ford Performance est venu des États-Unis cette semaine pour assister au MonteCarlo. C’est probablement la première fois qu’il voit un rallye...
Vous connaissez bien l’un et l’autre : Malcolm Wilson et Sébastien Ogier, ils sont faits pour s’entendre ?
Je le crois, oui. Ils ont chacun une trajectoire exceptionnelle. Vous connaissez celle de Sébastien. Malcolm, lui, il a commencé en vendant des gants à l’aéroport de Carlisle. Quel chemin parcouru ! Après avoir raté Loeb, il avait failli convaincre Sébastien (Ogier) de le rejoindre en . Les voilà enfin réunis. Avec un tel équipage de pointe, l’équipe M-Sport ne peut que jeter toutes ses forces de la bataille cette saison...
Pour conclure, dites-nous, ces nouvelles WRC, elles vous plaisent ?
Par essence, le rallye a besoin « d’entertainment ». Il doit être spectaculaire. Le changement va dans ce sens. Voitures plus puissantes, plus larges, appuis aéro accrus... OK, même si je pense qu’une auto peut faire le show sans aller très vite. L’essentiel, c’est que la sécurité progresse aussi...