L’acide de la primaire
Oh ! la belle machine à perdre ! Un petit bijou de technologie. Une mécanique de haute précision. Les satisfecit que se sont généreusement décernés les dirigeants socialistes ne peuvent masquer cette cruelle vérité : le Parti socialiste sort de cette primaire plus faible et plus divisé qu’il n’y est entré. Et ses chances pour , encore amoindries. Peut-être était-ce inéluctable, vu la démoralisation à la base et les divisions au sommet. Mais tous ceux – dont votre serviteur – qui pensaient que l’affaire allait causer des d égâts dans la famille socialiste doivent reconnaître qu’ils avaient tort : elle va causer de gros dégâts. Soit, à l’heure du bilan d’étape : – Une participation médiocre, que les misérables tripatouillages autour du nombre de votants ne font que souligner ; – Une orientation à gauche toute qui signe la revanche des frondeurs sur la gauche de gouvernement. Cela aussi était prévisible, étant donné les déceptions qu’a créées le quinquennat qui s’achève. François Hollande a décidément eu raison de préférer le désert d’Atacama. A %, les électeurs de la primaire ont en somme censuré son bilan. Cela place Valls en fâcheuse posture, au second tour, face à la coalition Hamon-Montebourg-Aubry. Et cela en dit long sur l’échec politique de Hollande : il a tenté de changer le logiciel du socialisme français. C’est raté. Une fracture ouverte. L’acide de la primaire a agi comme un révélateur, mettant en évidence – à travers les figures caricaturalement opposées de deux personnalités, Valls et Hamon, qui ne représentent pas du tout le coeur du PS mais ses ailes – les forces centrifuges à l’oeuvre dans ce parti. Social-libéralisme assumé d’un côté, idéalisme écolo-libertaire de l’autre. Et entre les deux, un vide que n’a pas réussi à combler Peillon, qui se voulait candidat du juste milieu. Qu’est-ce donc que le PS de Cambadélis, cet as de la manoeuvre ? Guère plus qu’un logo, un toit abritant des fractions qui n’ont plus en commun ni leader, ni projet, ni stratégie. Certes, entre la gauche Valls et la gauche Hamon, qui ne sont d’ailleurs que deux des composantes de la galaxie des gauches, le scrutin du janvier tranchera. Mais après ? Comment réunir ce que la primaire à séparé. « Rassembler », les protagonistes n’ont que ce mot à la bouche. Mais un mantra ne fait pas une politique. En l’occurrence, cela relève plutôt du voeu pieux. Ou de la pensée magique. Rassembler qui et quoi, d’ailleurs ? L’ensemble de la gauche ? Pour l’heure, imaginer que Mélenchon et Macron se désistent au profit du vainqueur de la Belle Alliance populaire relève de la galéjade. Rassembler les électeurs de la primaire ? Même ça, ce n’est pas gagné d’avance. La règle du jeu, c’est vrai, c’est que tout le monde se rallie au vainqueur. Et déjà, cela promet d’être pittoresque. On voit ça d’ici… Valls appelant la gauche à se rassembler derrière le candidat de « la défaite assurée » aux « promesses irréalisables ». Ou à l’inverse, Hamon entonnant « tous derrière Valls », alors qu’avec Montebourg, il n’a cessé de le combattre depuis la rupture de . Ce serait vraiment prendre les citoyens pour des poissons rouges. Mais le pacte, en toute hypothèse, ne lie que les protagonistes. Pas les électeurs, qui n’en font qu’à leur tête et ont une fâcheuse tendance… à voter pour le candidat de leur choix. Or il y a fort à parier que si Valls est battu, nombre de se s partisans, déçus, préfèreront aller vers Macron plutôt que vers Hamon. Tandis que si Valls l’emporte, une bonne partie des électeurs de Hamon et Montebourg pencheront pour Mélenchon, et non pour Valls qu’ils exècrent. De sorte que les vrais vainqueurs de la primaire pourraient bien être… ceux qui n’y participaient pas.
« Imaginer que Mélenchon et Macron se désistent au profit du vainqueur de la Belle Alliance populaire relève de la galéjade. »