Var-Matin (Grand Toulon)

 : l’aristocrat­ie féminine dans le rallye Paris-Saint-Raphaël

- ANDRÉ PEYREGNE

Au milieu du XXe siècle, l’une des grandes manifestat­ions de l’hiver à Saint-Raphaël, dans le Var, était à la fois mondaine et sportive: le Rallye automobile féminin Paris-Saint-Raphaël. Ce fut pendant longtemps la seule compétitio­n motorisée au monde réservée aux femmes. Créé en 1929 par le comte Edme de Rohan-Chabot, le Rallye plaça derrière le volant, lors de sa première année, des femmes de l’aristocrat­ie telles la comtesse de Lesguern et la baronne d’Elern qui, fort connues à Paris, faisaient partie de la noblesse mondaine de l’époque. Le magazine parisien l’Illustrati­on ,envoie sur place un de ses journalist­es et publie un reportage le 16 mars 1935 sur cette compétitio­n. À quoi s’intéresse d’abord le journalist­e? Point à la performanc­e sportive mais plutôt l’élégance de ces dames: «Ce tournoi bien moderne où ce sont les femmes qui s’affrontent sous l’oeil attentif des hommes, revêt un traditionn­el cachet d’élégance, et les «ensembles» de sport, crânement portés par les conductric­es, s’assortisse­nt avec goût aux jolies carrosseri­es des voitures. Un aimable éclectisme dans le choix de la tenue mêle aux tailleurs classiques la culotte de golf et la culotte de cheval, les manteaux de léopard et les «cuirs» les bottes à l’écuyère et les bottes d’aviateur, les passe-montagnes, les casques, les casquettes les bérets et tout le bariolage des chandails aux couleurs vives.» Pourtant, le Rallye n’est pas un simple concours d’élégance le long de la promenade maritime de Saint-Raphaël! Il faut traverser la France depuis Paris en cinq étapes, dont certaines encombrées de neige: Vichy, Chambéry, Digne, Marseille, Saint-Raphaël. Comment cette compétitio­n commence-t-elle? Par un thé aux Champs-Élysées offert dans les salons de l’Automobile­Club, place de la Concorde. Le départ de la première étape Paris-Vichy fut donné le 27 février 1935 à Orly, sur la route nationale 7 partant de la Porte d’Italie. Cette année-là, quarante compétitri­ces se sont engagées dans la course. Deux accidents ont émaillé la course: «Lors de la quatrième étape DigneMarse­ille-Toulon (211 kilomètres), une des concurrent­es, Madame Digne, que cette homonymie prédestina­it à s’illustrer en ce lieu, connut une belle émotion. Vers Peyrolle, elle dérapa à 70 à l’heure et tomba dans un ravin profond de 6 mètres où sa voiture fit plusieurs tours sur elle-même. Mais il n’y eut pas la moindre égratignur­e et, comme son appareil photo était resté intact, Mme Digne put, en guise de consolatio­n, prendre un cliché des résultats de sa culbute.» Dans son histoire, le Rallye automobile féminin Paris-Saint-Raphaël, ne fut endeuillé qu’une seule fois : en 1932 par la mort de la Française Renée Friderich sur une Delage D8.

Saluées à Bandol et Toulon

Les concurrent­es reçoivent partout un accueil triomphal. A Bandol, le club nautique leur offre des fleurs. Elles approchent de la dernière étape, SaintRapha­ël où les attend cependant une épreuve supplément­aire sur courte distance. «On avait réservé pour le dimanche 3 mars la dernière étape, la plus courte puisqu’elle est seulement de 98 kilomètres, de Marseille à Saint-Raphaël par Toulon. C’était la plus facile mais non la moins mouvementé­e en raison de la foule vibrante qui, profitant du beau temps et de la journée dominicale, se pressait sur tout le parcours, acclamant les concurrent­es. À l’arrivée à Saint-Raphaël, où l’Automobile Club de France était représenté par son président, le vicomte de Rohan, et l’Automobile Club des Artistes par sa présidente, Madame Marie Leone, la célèbre Sociétaire de la Comédie Française,

les trentetroi­s voitures non pénalisées durent encore disputer la suprême épreuve pour le classement par catégories».Cette ultime course se déroulait à Saint-Raphaël. Les concurrent­es devaient se lancer dans un simple aller-retour sur 60 mètres, départ arrêté et montrer leur parfaite maîtrise des voitures par une épreuve de freinage et de braquage. En cette année 1935, le Rallye fut remporté par Olga Thibault sur une Peugeot 201. La compétitio­n a existé jusqu’en 1975, trois ans après la mort de son fondateur, le comte de Rohan-Chabot. Il couronna en 1975 sa première gagnante étrangère, l’Allemande Christine Beckers. Cette année-là, la compétitio­n fut inscrite pour la première fois au Championna­t d’Europe des Rallyes. La célèbre conductric­e Michèle Mouton, née à Grasse, y courut sa première compétitio­n comme pilote en 1974. Là, on n’était plus dans l’élégance mondaine des débuts mais bel et bien dans la performanc­e sportive. avait lui-même pris l’initiative. Il était avisé, le 5 mars, que le Führer ne pouvait le recevoir par suite d’une indisposit­ion et que son voyage était ajourné. Aucune expression de regret ou d’excuse n’accompagna­it cette communicat­ion officielle. Elle était d’autant plus surprenant­e que la veille encore, le chancelier visitait une exposition automobile… » On sent là beaucoup d’inquiétude…

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(©L’Illustrati­on) (© L’Illustrati­on) À Bandol, le club nautique offre des fleurs aux concurrent­es. L’arrivée à Saint-Raphaël, où une épreuve de freinage et de braquage est prévue. Le Rallye automobile féminin ParisSaint-Raphaël est l’occasion de montrer de quoi les femmes sont capables...

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