« Les emmerdes en escadrille »
Fort de sa longue expérience politique, Jacques Chirac aimait les aphorismes de corps de garde. Comme celui-ci : « Les emmerdes volent toujours en escadrille. » François Fillon découvre, depuis une semaine, la justesse de ce propos. Pas un jour sans que ne rebondisse la chronique de la rémunération de son épouse Penelope comme le montrent les nouvelles révélations du Canard enchaîné. Certes, le candidat de la droite s’emploie à éteindre l’incendie mais, pour l’heure, rien n’y fait. La terrible loi de la transparence s’est mise en marche. Tous les faits et gestes passés et présents de François Fillon vont être disséqués. Le candidat va se retrouver nu. Traqué sur son patrimoine, ses activités et même sa vie privée. Seule une décision de justice nette, définitive, peut bloquer cet engrenage. Et encore ! Car le mal est fait. Sa trace sur la Toile, cette gigantesque poubelle de l’information où se mêlent le vrai et le faux, est indélébile. Certes, cette présidentielle est devenue si imprévisible que la suite peut nous réserver encore bien des surprises. Nul ne peut dire que la candidature Fillon est, déjà, dans une impasse définitive mais sa situation est d’autant plus difficile qu’il a remporté la primaire sur le thème de la probité. Lorsqu’on s’avance sur ce terrain, il faut être à l’abri de tout. On ne peut exiger du pays des efforts lorsqu’on commet soi-même des écarts. Faire travailler son épouse ou un membre de sa famille n’en est pas un. Le rapport public annuel remis le novembre par Noëlle Lenoir, déontologue à l’Assemblée nationale, le souligne : « L’emploi d’un proche parmi les collaborateurs n’est généralement pas critiqué en tant que tel, le lien de confiance entre le parlementaire et son assistant étant absolument primordial. » Ce rapport précise, ensuite, que «la rémunération d’un emploi familial est limité à % du crédit collaborateur. » Ce crédit mensuel s’élève, aujourd’hui, à €. Ce plafond de % semble avoir été respecté tant que Penelope Fillon a été rémunérée, entre et , par son mari député. Sa rémunération, en revanche, a bondi lorsqu’il a cédé son siège à son suppléant mais il ne s’agissait plus d’un emploi familial. En vérité, tout se joue sur la réalité de cet emploi. Le rapport Lenoir le précise : « Sont jugés inacceptables les emplois de complaisance politique ou non qui ne correspondent pas à un travail effectif au Parlement ou en circonscription surtout lorsqu’ils s’avèrent émarger à un haut niveau sur le crédit collaborateur des députés. » C’est sur ce point que la justice tranchera. Rien, cependant, ne pourra gommer la faute initiale de François Fillon : nul en politique n’est plus exposé aux attaques que le donneur de leçons. L’exemplarité ne peut souffrir d’aucune faille.
« Sa trace sur la Toile, cette gigantesque poubelle de l’information où se mêlent le vrai et le faux, est indélébile. »