Violences conjugales : il faut en parler
Reconnu coupable de violences habituelles, un Hyérois a été condamné à deux ans de prison ferme. La victime au visage tuméfié par les coups a osé parler après des années de terreur
Faire semblant de ne pas voir. Fermer les yeux sur les hémétomes d’un bras, un oeil noirci « par une mauvaise chute dans l’escalier ». Ou ne pas savoir comment réagir. Face à la difficulté pour un tiers de révéler des faits de violences conjugales, subies souvent par des femmes mais aussi par des hommes, les services de police incitent les témoins à alerter leurs services. À signaler des situations insoutenables avant que celles-ci basculent dans l’horreur. Pour éviter les coups jusqu’à la mort, dans l’indifférence générale. Pour briser ce huis clos familial entre un tyran et sa victime.
Vingt-cinq ans de vie commune et la gifle de trop. La gifle succèdant à des pluies de coups de poing et des humiliations quasi quotidiennes qui ont réduit une femme, d’une quarantaine d’années, à souffrir en silence. À culpabiliser de dénoncer son tyran domestique: son mari. Le père de ses deux enfants. Ce bourreau familial qui, le 10 janvier 2017, a massacré le visage de celle qu’il a juré « aimer » devant le tribunal correctionnel de Toulon où il a été jugé, il y a quelques jours, pour violences habituelles, suivies d’une incapacité supérieure à huit jours – en l’espèce 10 jours – devant le tribunal correctionnel de Toulon. Ce Hyérois de 46 ans, oisif et dont l’unique activité est la consommation d’alcool, a attendu le retour de son épouse du travail pour l’agresser violemment à coups de parapluie et de guitare.
Un médecin qui ne voit pas
Lors de sa comparution immédiate, il a tout osé, allant du : « je sais qu’elle me trompe et elle ne veut pas me le dire »au« c’est elle qui m’a demandé de la frapper. » Lors des investigations diligentées par Mme Piana, commissaire de Hyères (voir ci-dessous), les enquêteurs vont découvrir qu’il ne s’agit pas d’un acte isolé. Des témoins – dont l’employeur de la victime – évoquent leurs doutes (« Une fois, elle est venue travailler avec des lunettes de soleil »), mais aussi des certitudes: le 3 janvier, cette mère de famille a également subi des assauts de violences de son mari. Et là, le pire s’ajoutant à l’ignoble, les policiers découvrent que ce fameux 3 janvier, la victime a bénéficié d’un arrêt… maladie. Comment le médecin traitant n’a-t-il pas constaté les coups ? Pourquoi n’a-t-il pas fait un signalement ? Simplement, comme le relateront la présidente du tribunal et le procureur, « parce que le médecin n’a pas vu la patiente. C’est le mari qui s’est déplacé chez le médecin pour faire établir l’arrêt pour une grippe. Ce jour-là, cette femme avait le visage tuméfié ! », ont dénoncé les magistrats. Il a, par ailleurs, été fait mention de plusieurs arrêts maladie accordés durant l’année 2016.
Le tyran domestique a été écroué
Lors de son interrogatoire, l’homme a reconnu être violent depuis des années. « Mais pas tous les jours. Et parfois, elle tombait seule. Elle s’embronche », minimise-t-il. La justice l’a poursuivi pour une période allant de 2014 à janvier 2017. La période précédente étant prescrite. Pour ces faits particulièrement graves, M. Kerfridin, le représentant du parquet de Toulon, a requis deux ans de prison dont un an avec sursis. Le tribunal est allé au-delà en prononçant deux ans de prison avec maintien en détention. Le mari tortionnaire a été écroué.