Hôpital : « Nous sommes en crise de croissance »
Surfant sur la vague d’une activité depuis l’ouverture de Sainte-Musse, Michel Perrot, directeur du centre hospitalier intercommunal Toulon - La Seyne, entend « trouver un équilibre financier »
Le paquebot de 3 250 agents de santé propulsé en cinq ans par une croissance soutenue du nouvel hôpital Sainte-Musse gîte légèrement en ce début de rentrée. Contraint de corriger, à hauteur de 3 millions d’économies, la copie budgétaire, Michel Perrot, à la barre depuis dix ans du Centre hospitalier intercommunal Toulon - La Seyne (Chits), a l’intention de maintenir le cap. Le commandant n’ignore pas qu’il navigue sur une mer déjà agitée par le flot des voix blanches de représentants des personnels et des médecins urgentistes (lire nos précédentes éditions).
L’activité de l’hôpital continue-t-elle de croître ? Le CHITS termine un quinquennat avec, notamment, % de croissance en séjours hospitaliers, % de consultants supplémentaires et % de passages aux urgences supplémentaires. En , nous avions une croissance régulière de , % de séjours. La composition de ceux-ci se modifie avec moins de séjours de plus de deux jours et davantage de très courts séjours avec le développement de l’activité ambulatoire (lits fermés la nuit et le weekend). Nous avons ouvert en une unité supplémentaire de chirurgie ambulatoire, l’activité s’étant accrue de plus de % par rapport à .
Face à cette forte activité, vous êtes confrontés à un manque de lits… Nous connaissons encore une très forte activité. Nous souffrons toujours d’une difficulté majeure à transférer des patients de nos services de médecine et qui ont besoin de prolonger leur séjour dans une autre structure adaptée en services de soins de suite.
Il est reproché un manque d’anticipation pour faire cohabiter les flux de patients des urgences et ceux déjà hospitalisés. Qu’en dites-vous ? Ce n’est pas le diagnostic qu’il faut faire. Si nous avions la possibilité de transférer nos patients au plus vite dans les services de soins de suite, nous diminuerions la durée moyenne de séjours de nos patients en service médecine et nous pourrions accueillir plus de nouveaux patients. Quand on remonte la chaîne, cela embolise les services de médecine et le service des urgences n’a, de fait, pas de lits à sa disposition.
Comment expliquez-vous cette difficulté ? Ces patients, notamment les plus âgés, ont une prise en charge assez lourde et sont assez rapidement refusés par les autres établissements de soins de suite. Ces établissements ne sont pas très demandeurs de ce type de patients à la vue de la lourdeur des soins qui se prolongent.
Autre problématique : les contraintes budgétaires… Notre établissement vit une crise de croissance. L’activité nous a demandé beaucoup d’énergie. Nous ne grossissons pas plus d’un tiers en cinq ans comme cela. Aujourd’hui se pose la question financière. L’Agence régionale de santé, en rejetant notre budget, surligne cette difficulté de retrouver une trajectoire financière, alors même que nous avons été assez déstabilisés par cette activité importante et inhabituelle, et que nous avons dû l’assumer depuis cinq ans. Il y a un nouvel équilibre à trouver entre nos dépenses et nos recettes. L’ARS nous met sous pression, mais peut-être est-elle nécessaire pour nous conduire à la correction de la trajectoire, c’est-à-dire des grands équilibres de l’hôpital : l’activité et son financement. Il nous faut retrouver un équilibre qui ne remette pas en cause l’activité. Il faut aussi relativiser : on nous demande M€ d’économie sur M€ budgétisés. Notre déficit prévisionnel de , M€ représente à peine % du budget.
Quelles en seront les conséquences ? Clairement, il ne s’agit pas de diminuer la possibilité de soigner à l’hôpital de Toulon, ni de diminuer le potentiel des aides soignantes ou des infirmières. Nous ne renoncerons pas à des activités comme, par exemple, la recherche clinique qui nous apporte des moyens supplémentaires. Par contre, il faut s’interroger sur le fonctionnement de tous nos services supports (services logistiques : cuisine, blanchisserie, garage, magasins et services médicotechniques, laboratoires…) pour voir dans quelle mesure ils sont adaptés ou non, à la fois à la croissance d’activités et aux possibilités financières de l’établissement. L’enjeu est là. On nous demande une traduction immédiate de ces efforts. Mais intervenir sur tout ce qui n’est pas nos services cliniques demande du temps.
Est-ce à flux tendus dans tous les services ? Nous sommes restés assez raisonnables sur le volume des effectifs ( agents en plus sur trois ans).
Le climat reste-t-il sous tension à Clemenceau ? J’ai chargé la directrice des soins de suivre, au plus près, les activités de Clemenceau, d’être attentive et de venir en soutien de l’encadrement. Nous avons aussi procédé à quelques changements.