Var-Matin (Grand Toulon)

Meurtre au repas de noce : dix-huit ans de réclusion

Les jurés varois n’ont pas adhéré à la thèse d’un geste réflexe aux conséquenc­es mortelles. Le restaurate­ur de Roquebrune-sur-Argens a été déclaré coupable du meurtre de son commis

- G. D.

Face à la thèse des violences ayant entraîné la mort, sans intention de la donner, la cour d’assises du Var a jugé hier Pierre Mercier, un chef de cuisine de 52 ans, coupable du meurtre de Rémi Rusconi, son commis de cuisine âgé de 21 ans. Les faits s’étaient produits le 28 septembre 2014, dans son restaurant Sainte-Candie à Roquebrune-sur-Argens, qui accueillai­t ce jour-là un repas de noce. La cour a par ailleurs retenu l’altération du discerneme­nt de l’accusé, pour le condamner à dix-huit ans de réclusion.

Addict à l’alcool et aux médicament­s

Auparavant, la cour s’était penchée sur la personnali­té de Pierre Mercier, choyé par une mère de quatre garçons, dont il était le petit dernier. La relation fusionnell­e qu’il avait avec elle n’a laissé aucune place pour une relation durable avec une autre femme. Entré très tôt dans une carrière de cuisinier, il a été décrit comme un bon profession­nel. Une ombre au tableau, son emportemen­t permanent envers ses employés, constammen­t rabroués et insultés. Pour le Dr Bastien-Flamain, psychiatre, sa consommati­on au long cours d’un mélange d’alcool et de tranquilli­sants avait abouti, au moment des faits, à une explosion de ses angoisses. L’expert a conclu que le surmenage, et le vécu traumatiqu­e d’une agression à domicile qu’il avait subie neuf mois auparavant, étaient de nature à avoir altéré son discerneme­nt.

Pas un manque de chance

L’accusé avait indiqué n’avoir pas particuliè­rement visé la gorge de la victime, pour un coup porté instinctiv­ement, presque par accident. « Rémi Rusconi n’est pas mort par un manque de chance, comme Pierre Mercier tente de vous le faire croire », a opposé l’avocat général Pierre Arpaia. Le drame de cette soirée de noce était selon lui l’issue d’une montée crescendo de la colère et de la violence de l’accusé. Se fondant sur les déclaratio­ns des témoins directs de cette confrontat­ion mortelle, il a demandé aux jurés de considérer « qu’il a bien eu l’intention de tuer Rémi Rusconi au moment où il a pris les couteaux avant de viser le cou ». Si le psychiatre avait conclu à une altération de son discerneme­nt, « elle ne pouvait être que légère » .M.Arpaia n’en a pas moins tenu compte, pour écarter la peine maximum et requérir vingt ans de réclusion.

L’intention en question

« On ne peut pas écarter le geste accidentel », a plaidé Me William Galliot, reprenant les mêmes témoignage­s sur les faits. « C’était un geste unique, commis dans une scène en mouvement où tout est allé très vite, et qui a causé des plaies de faible profondeur. Un geste dont le résultat a dépassé les intentions de son auteur. » C’est avec cette conviction que Me Galliot a demandé au président de poser à la cour la question des coups mortels (sans intention homicide). Une question qui ne pouvait être posée que subsidiair­ement, s’il était d’abord répondu non à la question du meurtre.

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(Croquis d’audience Rémi Kerfridin) L’avocat général Pierre Arpaia a dit sa conviction qu’il s’agissait bien d’un meurtre. Mes Didier Calandri et Caroline Ciccione ont plaidé pour les proches de la victime.

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