« Plus complexe et intéressant qu’on le décrit »
Maurice Szafran, écrivain, éditorialiste à Challenges, auteur des entretiens
Ancien PDG de Marianne, le journaliste et écrivain Maurice Szafran, plutôt classé à gauche, a conduit les entretiens avec Christian Estrosi. Il porte sur lui un regard pour le moins bienveillant.
Comment sont nés ces entretiens ? Nous avions l’habitude de parler de politique ensemble depuis quelques années. L’idée est donc venue naturellement. Il y a eu une envie partagée de faire ce livre.
Christian Estrosi vous a-t-il imposé des contraintes ? Aucune espèce de contrainte. Les thèmes étaient assez évidents. J’ai conduit les entretiens totalement à ma guise. La liberté mutuelle a été complète.
Il y a beaucoup d’ironie dans vos échanges. Au point qu’elle semble parfois factice… Je n’ai pas eu cette impression. Le but était de titiller Christian Estrosi, de l’interpeller sur des reproches qui peuvent lui être faits, sur son aspect droitier et sécuritaire. La partie sur l’attentat est importante, des accusations sévères ont été portées contre lui, d’avoir rompu l’unité nationale. Il fallait bien que nous allions au fond de ces questions-là. Mais il n’y a eu aucune ironie de ma part. Simplement, la volonté qu’il réponde aux questions.
Au bout du compte, vous a-t-il convaincu ? Avez-vous fait le tour de ses contradictions ? Le but n’était pas de me convaincre, juste d’intéresser les lecteurs. Je pense qu’ils se rendront compte de ce que je savais depuis bien longtemps : le personnage est autrement plus complexe et intéressant que ce qu’une partie de la presse en décrit. Il a des convictions fortes sur tous les sujets qui préoccupent les Français, la sécurité, la politique sociale, la laïcité. Et il est parfois très courageux et en rupture avec la pensée dominante. Sur la laïcité par exemple, il s’inscrit a contrario d’une laïcité dure de type Valls, ce qui est assez rare à droite.
Cède-t-il au populisme ? Je ne comprends pas l’accusation de populisme. Tous les hommes politiques cherchant les suffrages du peuple font du populisme. Non, je ne trouve pas qu’il soit populiste. Sur la laïcité, on y revient, il a des positions à rebours des populistes. Les hommes politiques sont plus complexes que l’image qu’ils dégagent et de ce point de vue-là, il est caractéristique.
Vous dites à la fin du livre qu’il a progressé. En quoi ? Il a progressé comme chacun de nous, mais de façon plus spectaculaire. Même s’il est très libéral et si ce n’est pas ma ligne sociale, il a beaucoup de choses à dire en économie, qui n’était pas considérée comme sa spécialité. Il est aussi bien plus cultivé que son image. Il a travaillé ses dossiers, il maîtrise bien les techniques financières, il sait de quoi il parle.